Projet de loi C-520, Loi visant à soutenir l’impartialité politique des agents du Parlement
Déclaration d’ouverture au Comité permanent de l’accès à l’information, de la protection des renseignements personnels et de l’éthique
Projet de loi C-520, Loi visant à soutenir l’impartialité politique des agents du Parlement
Le 25 février 2014
Michael Ferguson, CPA, CA
FCA (Nouveau-Brunswick)
Vérificateur général du Canada
Monsieur le Président, je vous remercie de nous donner l’occasion d’exprimer notre point de vue sur le projet de loi C-520. Tout d’abord, j’aimerais vous assurer que mes employés et moi-même sommes déterminés à nous acquitter de nos responsabilités de manière équitable, indépendante, impartiale et non partisane. J’ai récemment signé une lettre à ce sujet avec plusieurs autres agents du Parlement.
Cette lettre contient plusieurs observations de nature technique concernant l’interaction entre certaines dispositions du projet de loi et le régime actuel qui gouverne les activités politiques des fonctionnaires. La lettre décrit les aspects du projet de loi à l’égard desquels nous aimerions des éclaircissements.
Selon l’article 6 du projet de loi, l’agent du Parlement qui entend occuper un poste partisan simultanément à ces fonctions d’agent du Parlement doit, dès que possible et avant de commencer à occuper ce poste, produire une déclaration écrite faisant état de son intention. À l’heure actuelle, en vertu de l’article 117 de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, je ne peux me livrer à aucune activité politique, sauf voter dans le cadre d’élections. La situation décrite à l’article 6 du projet de loi ne pourrait jamais se produire, et je ne voudrais pas que les citoyens aient l’impression, en lisant cet article, que ceci est possible.
D’autres aspects du projet de loi pourraient avoir des conséquences non voulues. Selon le régime législatif en vigueur, je nomme les employés de mon bureau conformément à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. Au BVG, les employés sont embauchés sur le principe du mérite. Le paragraphe 7(1) du projet de loi dispose que toute personne qui présente sa candidature à un poste doit, dès que possible après le début du processus de sélection, produire une déclaration écrite indiquant si elle a occupé ou non un poste partisan au cours des dix années précédentes. Or, le fait d’avoir déjà occupé un poste partisan ne pourrait pas influencer le processus de sélection. Ainsi, si un candidat déclarait avoir occupé dans le passé un poste partisan et qu’en raison du principe du mérite, il n’obtenait pas un poste, il pourrait, en vertu de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, contester notre décision de ne pas l’avoir embauché en alléguant que sa déclaration a influencé le processus de sélection. De plus, l’obligation de publier ce genre de renseignements personnels pourrait dissuader certaines personnes de postuler au Bureau.
L’article 9 du projet de loi stipule que je pourrais procéder à l’examen de toute allégation d’un député ou d’un sénateur selon laquelle une personne travaillant dans son bureau se serait conduite de façon partisane dans l’exercice de ses fonctions ou de ses responsabilités. Au terme d’un tel examen, je devrais remettre un rapport qui serait déposé devant les deux chambres. Il serait bon de préciser, pour ces nouveaux pouvoirs proposés en matière d’examen, ce qu’on entend par « conduite partisane » et d’établir le seuil d’éléments probants requis pour demander un examen. La Loi sur l’emploi dans la fonction publique dispose que la Commission de la fonction publique mène des enquêtes sur les allégations d’activités politiques concernant des fonctionnaires. La définition d’activités politiques est très vague dans la Loi et, à mon avis, pourrait englober la conduite partisane. De plus, le projet de loi ne prévoit pas de mécanisme de confidentialité pour protéger la réputation des employés dont la conduite, après examen, s’est révélée appropriée et non partisane. Il faudrait peut-être vérifier si les dispositions en matière d’enquête de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique n’offrent pas une méthode plus efficace d’assurer une surveillance indépendante. Compte tenu du chevauchement apparent entre le projet de loi et la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, la présence d’un témoin de la Commission de la fonction publique serait utile lors des délibérations du Comité.
Je recommande au Comité d’étudier plus en détail un troisième aspect du projet de loi, soit son incidence sur la protection de la vie privée des employés. J’ai déjà mentionné quelques conséquences possibles liées à l’embauche et aux enquêtes. Je souhaiterais maintenant aborder d’autres impacts possibles.
Une fois en vigueur, la loi exigera des déclarations écrites de tous nos employés, à savoir s’ils ont déjà occupé des postes partisans au cours des dix années précédant leur entrée au Bureau. De plus, les employés qui ont possiblement occupé de tels postes devront produire une déclaration précisant qu’ils se sont acquittés de leurs responsabilités de manière non partisane. Obliger certains employés à divulguer publiquement de telles informations pourrait avoir des conséquences négatives, par exemple en faisant connaître publiquement leur lieu de travail actuel. De plus, en dix ans, l’employé pourrait avoir changé d’allégeance politique. De tels facteurs pourraient inciter l’employé concerné à garder sous silence cette information, plutôt qu’à la divulguer. Pour ces raisons, les employés pourraient être réticents à produire une déclaration.
Le projet de loi vise tous les employés, quelles que soient leurs responsabilités. Le Comité voudra peut-être étudier si les objectifs du projet de loi pourraient toujours être atteints s’il visait uniquement les hauts fonctionnaires et les employés investis d’autorité et d’influence qui ont un rôle de supervision sur les travaux du Bureau.
En conclusion, j’aimerais parler brièvement des processus et des déclarations que nous exigeons actuellement des employés du Bureau pour nous assurer de respecter les normes d’audit professionnelles, notre code de valeurs et d’éthique ainsi que les lois en vigueur.
Chaque année, tous les employés remplissent une déclaration sur les conflits d’intérêts. Ils y reconnaissent, entre autres, leur obligation d’agir de façon non partisane, indépendante et impartiale. Au début de tous les audits, chaque personne qui participe à la mission doit remplir une déclaration exhaustive d’indépendance. Toute situation qui fait peser sur l’indépendance une menace réelle ou perçue est examinée par les hauts fonctionnaires et par le spécialiste du Bureau du vérificateur général en matière de valeurs et d’éthique.
Monsieur le Président, j’espère que ces observations seront utiles aux membres du Comité alors qu’ils amorcent leur étude du projet de loi C-520. Je répondrai avec plaisir à toutes vos questions.