Déclaration d’ouverture au Comité sénatorial permanent des finances nationales
Les vaccins contre la COVID-19
(Rapport 9 — Rapports de 2022 de la vérificatrice générale du Canada)
Les prestations spécifiques liées à la COVID-19
(Rapport 10 — Rapports de 2022 de la vérificatrice générale du Canada)
Le 15 février 2023
Karen Hogan, Fellow Comptable professionnelle agrééeFCPA
Vérificatrice générale du Canada
Monsieur le Président, je vous remercie de nous donner l’occasion de discuter des deux rapports liés à la COVID‑19 que nous avons présentés au Parlement le 6 décembre 2022. Je tiens d’abord à reconnaître que cette audience se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabe. Je suis accompagnée ce soir de mon sous-vérificateur général, Andrew Hayes, ainsi que de Susan Gomez et de Mélanie Cabana, qui ont dirigé les audits.
Commençons par notre audit des vaccins contre la COVID‑19. Dans le cadre de cet audit, nous avons examiné la façon dont le gouvernement fédéral a acheté et autorisé des vaccins et sur la façon dont il les a distribués aux provinces et aux territoires pour appuyer le plus vaste programme d’immunisation de l’histoire du pays.
Dans l’ensemble, nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada et Services publics et Approvisionnement Canada avaient collaboré de manière à répondre au caractère urgent de la pandémie. Entre décembre 2020 et mai 2022, le gouvernement fédéral a payé pour 169 millions de doses de vaccins. Plus de 84 millions de doses ont été administrées à des personnes admissibles partout au pays.
En 2020, Services publics et Approvisionnement Canada a conclu des ententes d’achat anticipé avec sept compagnies qui avaient démontré le potentiel de mettre au point des vaccins viables. Cela a été fait de telle sorte que le Canada puisse obtenir suffisamment de doses pour vacciner toutes les personnes admissibles une fois les vaccins disponibles.
Nous avons constaté que Santé Canada avait suivi un processus systématique pour autoriser les vaccins contre la COVID‑19 et qu’il avait ajusté son processus pour accélérer les approbations. Par exemple, le Ministère examinait l’information fournie par les fabricants au fur et à mesure qu’elle était mise à sa disposition au lieu d’attendre de recevoir une demande complète.
En moyenne, l’Agence de la santé publique du Canada a livré les vaccins dans les deux jours suivant la réception de la demande d’une province ou d’un territoire. Il s’agit d’une réussite compte tenu de la logistique nécessaire au transport de matériaux sensibles aux variations de température vers des endroits parfois éloignés.
Nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada avaient recueilli et analysé des données de surveillance des vaccins contre la COVID‑19 afin d’assurer le suivi de l’innocuité, de la couverture et de l’efficacité des vaccins. Cependant, étant donné que les ententes avec les provinces et les territoires concernant l’échange des données n’avaient pas été finalisées, l’Agence a eu du mal à communiquer efficacement des données détaillées à l’échelle des cas sur la surveillance de la sécurité à Santé Canada, à l’Organisation mondiale de la santé et aux compagnies de vaccins.
Nous avons constaté que les problèmes liés à l’échange de renseignements nuisaient aussi à la capacité de l’Agence de la santé publique du Canada de recueillir des renseignements précis sur l’inventaire, le gaspillage et les dates de péremption. Les retards dans la mise en œuvre d’importantes fonctionnalités de ConnexionVaccin ont également contribué à l’incapacité de l’Agence à assurer un suivi du gaspillage.
À la fin de mai 2022, 32,5 millions de doses de vaccins contre la COVID‑19 se trouvaient dans les stocks fédéraux, provinciaux et territoriaux au Canada. Ces stocks valaient environ 1 milliard de dollars. De plus, 50,6 millions de doses étaient considérées comme excédentaires et ont été offertes sous forme de dons.
Entre décembre 2020 et le 31 mai 2022, date marquant la fin de la période visée par notre audit, 15,1 millions de doses ont été gaspillées. L’Agence de la santé publique du Canada nous a informé que de juin à décembre 2022, 11 millions de doses supplémentaires avaient atteint leur date de péremption avant d’avoir pu être utilisées ou données. De nombreuses raisons peuvent expliquer le gaspillage, et compte tenu de la nature changeante de la pandémie, il fallait s’attendre à un certain gaspillage.
Nous avons soulevé des préoccupations au sujet de l’échange de données sur la santé entre les autorités sanitaires fédérales et provinciales ou territoriales en 1999, en 2002, en 2008 et de nouveau en 2021. Ces problèmes de longue date, qui comprennent la mise en œuvre d’un cadre pancanadien d’échange de renseignements, doivent être réglés de toute urgence, car l’échange de données sur la santé est au cœur d’une surveillance efficace permettant d’assurer la sécurité de la population canadienne.
Je vais parler maintenant du deuxième rapport d’audit que nous avons publié en décembre. Cet audit a porté sur six programmes liés à la COVID‑19 visant à soutenir les particuliers et les employeurs pendant la pandémie. Nous avons cherché à savoir si Emploi et Développement social Canada et l’Agence du revenu du Canada avaient géré ces programmes de façon efficiente et efficace et si ces programmes avaient permis l’optimisation des ressources. Nous avons également examiné si les montants versés aux bénéficiaires étaient exacts et si ces bénéficiaires étaient admissibles, et si les procédures de recouvrement des paiements excédentaires et des paiements versés à des bénéficiaires inadmissibles avaient été mises en œuvre dans les meilleurs délais.
Au début de la pandémie, le Ministère et l’Agence ont versé de façon efficace les prestations liées à la COVID‑19 afin d’offrir rapidement une aide financière aux particuliers et aux employeurs. Pour accélérer le versement des paiements, le gouvernement a décidé de limiter les contrôles préalables au paiement et de se fier aux renseignements fournis par les demandeurs. En adoptant cette approche, il a reconnu qu’un travail de vérification après paiement serait nécessaire afin de vérifier que les paiements de prestations étaient exacts et versés aux bénéficiaires admissibles.
Au fil de la pandémie, les programmes ont été prolongés et modifiés, et le Ministère et l’Agence ont ajouté certains contrôles préalables au paiement. Toutefois, dans le cas de chacun des programmes, certains critères d’admissibilité ne faisaient pas l’objet d’un contrôle préalable au paiement.
Pour ce qui est de l’ensemble des programmes que nous avons audités, nous avons constaté que des paiements totalisant 4,6 milliards de dollars avaient été versés en trop à des personnes inadmissibles. Nous avons également estimé que des paiements d’au moins 27,4 milliards de dollars devraient être examinés de plus près afin de confirmer l’admissibilité des bénéficiaires.
Nous avons constaté que le nombre de vérifications après paiement que le Ministère et l’Agence avaient prévu de réaliser était peu élevé. Le Ministère et l’Agence n’ont pas prévu de vérifier tous les paiements pour lesquels les bénéficiaires étaient identifiés comme potentiellement inadmissibles.
Les efforts de recouvrement des montants exigibles étaient limités au moment où nous avons fait rapport. À l’été 2022, environ 2,3 milliards de dollars de paiements de prestations en trop liées à la COVID-19 avaient été recouvrés.
Bien que le versement efficace des prestations au début de la pandémie ait contribué à empêcher une augmentation de la pauvreté et des inégalités de revenu et soutenu la relance économique, je trouve préoccupant que peu de progrès aient été réalisés au chapitre de la vérification après paiement. Le gouvernement savait qu’en décidant de limiter les contrôles préalables au paiement, d’importants travaux de vérification après paiement seraient nécessaires ultérieurement. Cependant, ni les ressources ni les plans n’ont été suffisamment ajustés pour appuyer ce travail.
Le gouvernement fédéral a dépensé des milliards de dollars pour aider les gens en temps de crise, mais il ne sait pas si cet argent a toujours été versé à des bénéficiaires admissibles. Pour être juste envers l’ensemble des contribuables, le gouvernement doit effectuer un travail de vérification rigoureux. Après avoir identifié les paiements qui ont été versés à des bénéficiaires qui n'étaient pas admissibles, le gouvernement peut alors décider comment et quand il veut recouvrer ces montants. Peu importe l’approche qu’il adopte, il doit être clair et transparent avec les Canadiennes et les Canadiens.
Monsieur le Président, ainsi se termine ma déclaration d’ouverture. Nous serions heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.