Automne 2016 — Rapports de la commissaire à l’environnement et au développement durable Le point de vue de la commissaire

Automne 2016 — Rapports de la commissaire à l’environnement et au développement durableLe point de vue de la commissaire

Les efforts du gouvernement fédéral pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030

Voilà maintenant un peu plus d’un an que l’Organisation des Nations Unies se réunissait à New York avec ses 193 États membres, dont le Canada, pour adopter à l’unanimité le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Ce Programme s’articule autour de 17 objectifs de développement durable (ODD) et de 169 cibles associées en vue d’éliminer l’extrême pauvreté et la faim, de protéger la biodiversité et les écosystèmes de la planète, et d’assurer la paix et la prospérité pour tous.

Les ODD et leurs cibles associées recoupent les trois volets du développement durable : social, économique et environnemental. Cette perspective plus large est nécessaire pour s’engager concrètement dans la voie du développement durable, à l’échelle de la planète, dans l’intérêt des générations présentes et futures.

En tant que souverain du deuxième plus vaste territoire et du plus long littoral au monde, le Canada – et en particulier le gouvernement fédéral – joue un rôle substantiel dans la réalisation des ODD.

En vertu de la Loi sur le vérificateur général, le commissaire à l’environnement et au développement durable doit évaluer les progrès réalisés par les ministères et organismes fédéraux en matière de développement durable et en faire rapport au Parlement. Dans nos rapports à venir, nous prévoyons examiner les engagements pris par le gouvernement du Canada, au pays et à l’étranger, par rapport aux 17 objectifs et 169 cibles inscrits dans le Programme 2030, ainsi que l’infrastructure prévue pour en soutenir la mise en œuvre. Cette intention cadre avec les discussions qui ont cours actuellement à l’international, parmi les institutions d’audit.

Examen de l’ébauche de la Stratégie fédérale de développement durable 2016-2019

Cette année, dans notre Examen et observations sur l’ébauche de la Stratégie fédérale de développement durable 2016-2019 (SFDD), nous avons été heureux de constater que les objectifs proposés étaient liés aux ODD, et que l’ébauche de la SFDD reprenait des enjeux importants qui reflétaient en partie les défis environnementaux qui se posent au Canada. Par contre, l’ébauche de la SFDD passe sous silence les 169 cibles associées aux ODD. Étant donné la tangente fortement environnementale de l’ébauche, il est clair qu’il reste beaucoup de travail à faire pour réaliser le plein potentiel de la SFDD. Cette stratégie doit en effet aborder de façon plus complète les défis touchant le développement durable auxquels sont confrontés les Canadiens et les Canadiennes. Nous avons encouragé le gouvernement du Canada à se pencher sur des façons d’intégrer les cibles découlant des ODD à la version définitive de la SFDD.

Dans son rapport intitulé La durabilité fédérale pour les générations futures—Rapport à la suite de l’évaluation de la Loi fédérale sur le développement durable présenté en juin 2016, le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes déclare : « Si le gouvernement veut, comme il l’a annoncé en 2015, prendre des mesures audacieuses et porteuses de transformation pour favoriser le développement durable – et notamment respecter ses engagements concernant les changements climatiques – il est indéniable qu’il doit améliorer la SFDD. » Je suis heureuse de constater que ce rapport préconise plusieurs changements à la Loi fédérale sur le développement durable, y compris l’élargissement de l’approche à l’échelle gouvernementale. Ainsi, un plus grand nombre de comités et de ministères auraient un rôle à jouer en ce qui concerne la SFDD, et mes rapports seraient transmis à des comités parlementaires additionnels, en plus du Comité permanent de l’environnement et du développement durable.

Menaces pesant sur les stocks de poissons au Canada et dans le monde

Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, plus de 30 % des stocks de poissons de la planète sont probablement exploités à un rythme insoutenable. L’amélioration des méthodes de pêche a facilité la surpêche. Par ailleurs, le réchauffement et l’acidification des océans associés aux changements climatiques ont également des conséquences sur la santé des écosystèmes marins.

L’importance de gérer les stocks de poissons de manière durable est indéniable : en 2015, la valeur des exportations canadiennes de poissons et de fruits de mer a atteint six milliards de dollars. Environ 600 collectivités canadiennes dépendent de la pêche et des industries de transformation connexes pour leur subsistance, sans oublier les nombreuses collectivités autochtones qui dépendent aussi du poisson, non seulement pour se nourrir, mais aussi à des fins sociales, rituelles et commerciales.

La planification est essentielle pour assurer la pérennité des stocks de poissons pour les générations présentes et futures. Notre audit a révélé que Pêches et Océans Canada avait des plans de gestion intégrée des pêches pour 110 des 154 principaux stocks de poissons, y compris ceux ayant la plus forte valeur économique. Le Ministère n’avait toutefois pas de plan d’action pour 26 des 44 autres stocks, et les plans pour les 18 stocks restants étaient désuets, sans que le Ministère ait établi d’échéancier pour rectifier la situation. De plus, le Ministère n’avait ni plan ni échéancier pour 12 des 15 principaux stocks de poissons qu’il avait classé dans la zone critique et qui nécessitaient des plans de rétablissement.

Notre audit a également fait ressortir qu’il manquait à Pêches et Océans Canada des informations essentielles sur le nombre de poissons dans l’océan et sur les poissons capturés. Le Ministère doit disposer d’informations à jour et fiables pour gérer les pêches canadiennes de façon à soutenir la conservation et l’exploitation durable des ressources, et à favoriser la prospérité économique des populations qui dépendent de la pêche pour leur subsistance.

Gérer les risques que présente l’énergie nucléaire

Quatre centrales nucléaires sont en activité au Canada. La Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) réglemente l’utilisation de l’énergie et des substances nucléaires en vertu de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires. Elle exerce ses responsabilités pour que l’environnement ainsi que la santé et la sécurité des Canadiennes et des Canadiens soient protégés, et pour que le Canada s’acquitte de ses engagements internationaux en ce qui concerne l’utilisation pacifique de l’énergie nucléaire.

Le nucléaire est une importante source d’énergie, mais il est porteur de risques qui doivent être bien gérés. Les inspections des centrales comptent parmi les premiers outils de contrôle utilisés par la CCSN pour assurer aux Canadiennes et aux Canadiens que les centrales nucléaires sont exploitées de façon sécuritaire, dans le respect des exigences réglementaires et des conditions de leurs permis. Nous avons constaté que la CCSN n’était pas en mesure de montrer qu’elle disposait de processus adéquats, systématiques et fondés sur le risque pour planifier ses inspections des centrales nucléaires. Pour assurer aux Canadiennes et aux Canadiens que les centrales nucléaires sont exploitées de façon sécuritaire, la CCSN doit pouvoir montrer que les inspections qu’elle effectue sont appropriées tant en nombre qu’en type, et qu’elles se déroulent dans le respect des pratiques établies par la Commission.

L’exécution des évaluations environnementales stratégiques

Nous avons poursuivi cette année les audits annuels de ministères et d’organismes choisis que nous avons amorcés en 2013, en nous penchant cette fois sur les progrès réalisés par le ministère de la Justice du Canada, la Défense nationale, Parcs Canada, Services publics et Approvisionnement Canada, et Anciens Combattants Canada en ce qui concerne l’exécution d’évaluations environnementales stratégiques des projets de programmes et de politiques qu’ils soumettent à l’approbation de leur ministre et du Cabinet.

Comme dans nos rapports antérieurs, nous avons constaté que la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes n’avait pas été suivie pour la plupart des projets de politiques, de plans et de programmes soumis à l’approbation d’un ministre ou du Cabinet. Seul Parcs Canada fait exception.

Afin de prendre des décisions éclairées, les ministres doivent disposer d’une information complète sur les effets environnementaux importants potentiels des projets qui leur sont soumis pour approbation. Cette information devrait par ailleurs inclure une indication de la mesure dans laquelle les projets de politiques, de plans et de programmes cadrent avec les objectifs et cibles articulés dans la Stratégie fédérale de développement durable.

Les ministères et organismes gouvernementaux doivent tenir compte des retombées environnementales de leurs décisions, et nous savons désormais qu’il est possible de le faire. Parcs Canada fait figure d’exemple à suivre pour les autres ministères et organismes gouvernementaux.

Conclusion

Tout bien considéré, nos rapports de l’automne 2016 dénotent que les progrès à l’échelle du gouvernement fédéral sont encourageants – notamment en ce qui concerne la Stratégie fédérale de développement durable. Cependant, au sein même des ministères et organismes, nous notons des lacunes et des faiblesses. Nos rapports viennent donc souligner combien il est important que les ministères et organismes fédéraux maintiennent leurs efforts ciblés pour avancer dans la voie du développement durable.

Le Canada dispose de 14 années pour contribuer à l’atteinte des ODD auxquels il a souscrit en 2015, avec 192 autres pays. Le Bureau du vérificateur général du Canada continuera d’appuyer les efforts que déploie le gouvernement fédéral pour réaliser le Programme de développement durable à l’horizon 2030. Le Bureau travaillera pour élaborer une façon d’auditer les progrès accomplis en vue de la réalisation du Programme 2030, il surveillera les progrès réalisés par les ministères et organismes en matière de développement durable et il fera rapport au Parlement sur la question de savoir si les institutions gouvernementales sont efficaces, responsables et transparentes.