2023 — Rapports 5 à 9 de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada Rapport de l’auditeur indépendentRapport 6 — La résistance aux antimicrobiens

2023 — Rapports 5 à 9 de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada

Rapport 6 — La résistance aux antimicrobiens

Rapport 6 — La résistance aux antimicrobiens

Survol

Dans l’ensemble, le gouvernement fédéral n’a pas pris suffisamment de mesures pour s’attaquer à la résistance croissante aux médicaments antimicrobiens, comme les antibiotiques, pour mieux protéger la santé des Canadiennes et des Canadiens. L’Organisation mondiale de la Santé classe la résistance aux antimicrobiens parmi les dix plus grandes menaces à la santé publique mondiale, et les répercussions de cette résistance sur la population canadienne sont connues. L’histoire nous montre, comme cela a été le cas pendant la pandémie de COVID‑19, que dans le domaine des soins de santé, le coût d’une mauvaise préparation se mesure en nombre de vies perdues.

La lutte contre la résistance aux antimicrobiens au Canada requiert le déploiement d’efforts coordonnés par tous les ordres de gouvernement et toutes les parties prenantes. En juin 2023, après la fin de la période d’audit, mais avant la publication de notre rapport, l’Agence de la santé publique du Canada a publié le Plan d’action pancanadien sur la résistance aux antimicrobiens. Nous avons constaté que l’Agence avait travaillé avec les provinces et les territoires pour élaborer le plan. Toutefois, de nombreux éléments importants, comme des résultats concrets, des calendriers et une description des responsables de chaque mesure, n’étaient pas inclus dans le plan. Sans ces éléments essentiels, il est peu probable que celui‑ci aboutisse à des mesures significatives et produise les résultats souhaités.

Nous avons également constaté que l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada, qui sont responsables d’améliorer l’accès du Canada à de nouveaux antimicrobiens, n’avaient pas pris suffisamment de mesures pour accroître l’accès du marché à de nouveaux médicaments antimicrobiens disponibles dans d’autres pays. Les deux organisations savent qu’une combinaison de mesures incitatives réglementaires et économiques serait nécessaire pour encourager les entreprises à offrir de nouveaux antimicrobiens sur le marché canadien.

Nous avons constaté que certains progrès avaient été réalisés depuis notre dernier audit sur la résistance aux antimicrobiens en 2015. Par exemple, dans notre premier audit, nous avions indiqué que des données additionnelles sur la résistance aux antimicrobiens et l’utilisation de ces derniers étaient nécessaires pour dégager les tendances et appuyer la prise de décisions éclairées. Depuis, l’Agence de la santé publique du Canada a amélioré sa collecte de données. Cependant, des lacunes persistent, surtout en ce qui concerne la résistance aux antimicrobiens dans certaines populations vulnérables et dans l’environnement.

Santé Canada, en tant que ministère responsable de l’évaluation et de la surveillance de l’innocuité, de l’efficacité et de la qualité des antimicrobiens utilisés chez les humains et les animaux, avait renforcé sa surveillance en apportant des changements aux règlements et aux politiques pour préserver l’efficacité des antimicrobiens. Par exemple, le Ministère exige maintenant que les entreprises soumettent des rapports annuels sur les ventes d’antimicrobiens importants utilisés chez les animaux destinés à l’alimentation. Toutefois, nous avons constaté que le Ministère n’avait pas évalué si les changements qu’il avait mis en œuvre fonctionnaient comme prévu pour préserver l’efficacité des antimicrobiens.

  Les constatations et les données clés

  • Chaque année, près de cinq millions de décès dans le monde sont associés à la résistance aux antimicrobiens, que l’Organisation mondiale de la Santé a qualifiée de « pandémie silencieuse » en 2022.
  • D’après des travaux de recherche financés par l’Agence de la santé publique du Canada, il est estimé qu’en 2018, 26 % des infections au Canada avaient résisté aux antimicrobiens de première ligne et que 5 400 décès étaient attribuables à la résistance aux antimicrobiens.
  • Selon le Conseil des académies canadiennes, d’ici 2050, le taux de résistance aux antimicrobiens devrait atteindre 40 %, ce qui devrait se traduire par une hausse des décès annuels estimée à 13 700 au Canada.
  • Le financement fédéral pour des activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens autres que la recherche a été approuvé pour la première fois en 2021. Néanmoins, nous avons constaté qu’environ les deux tiers du financement consacré à des activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens autres que la recherche provenaient de budgets existants en 2021‑2022 et en 2022‑2023.
  • Nous avons constaté que les Canadiennes et les Canadiens n’avaient pas accès à 19 antibiotiques sur les 29 que l’Organisation mondiale de la Santé avait classés comme antibiotiques de réserve ou de dernier recours.

  Pourquoi avons-nous effectué cet audit?

  • La résistance aux antimicrobiens représente déjà une menace pour la vie et la santé humaines au Canada et dans le reste du monde.
  • Non seulement la résistance aux antimicrobiens diminue l’efficacité des antimicrobiens existants, mais elle nécessite l’utilisation de médicaments de dernier recours plus coûteux et qui peuvent aussi perdre de leur efficacité au fil du temps dans le système de soins de santé.
  • Outre le coût humain et les coûts des soins de santé, la résistance aux antimicrobiens entraîne également des coûts élevés pour l’économie et les moyens de subsistance des Canadiennes et des Canadiens.
  • La réduction de la résistance aux antimicrobiens au Canada nécessite une réponse nationale coordonnée qui prévoit des responsabilités clairement définies, des livrables concrets, des échéanciers précis et des résultats mesurables.
  • Dans les dernières décennies, la mise au point de nouveaux médicaments antimicrobiens a ralenti au Canada et partout dans le monde, de sorte qu’il est encore plus important de préserver l’efficacité des médicaments disponibles.

  Aperçu de nos recommandations

  • L’Agence de la santé publique du Canada, en collaboration avec Santé Canada, l’Agence canadienne d’inspection des aliments et Agriculture et Agroalimentaire Canada, devrait mobiliser des partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux ainsi que des parties prenantes afin d’achever, d’exécuter et de surveiller le Plan d’action pancanadien sur la résistance aux antimicrobiens.
  • Santé Canada devrait terminer son examen des antimicrobiens à usage vétérinaire dont la durée d’utilisation est indéterminée ou prolongée et accorder la priorité à la modification des étiquettes de produits en examinant, par exemple, le degré d’importance de ces antimicrobiens pour la médecine humaine et la fréquence de vente de ces produits.
  • L’Agence de la santé publique du Canada, en collaboration avec Santé Canada ainsi que des partenaires et parties prenantes fédéraux, provinciaux et territoriaux, devrait utiliser les données nationales sur la résistance aux antimicrobiens et l’utilisation de ceux‑ci pour déterminer de quels antimicrobiens les Canadiennes et Canadiens ont le plus besoin et mettre en œuvre des mesures pour favoriser l’accès à ces médicaments sur le marché.

Consultez le rapport intégral pour lire toutes nos observations, analyses, recommandations et les réponses des entités auditées.

Logo des objectifs de développement durable des Nations UniesObjectif de développement durable numéro 3 des Nations Unies : Bonne santé et bien-être

L’Agence de la Santé publique du Canada est également responsable de la collecte de données liées à l’indicateur de l’objectif de développement durable numéro 3 des Nations Unies (Bonne santé et bien-être) concernant le « pourcentage de septicémies causées par un organisme résistant aux antimicrobiens donné ».

Visitez notre page « Le développement durable et le Bureau du vérificateur général du CanadaBVG » pour en apprendre davantage sur le développement durable au BVG.

Visuels choisis

L’approche « Un monde, une santé » tient compte de l’interrelation qui existe entre les humains, les animaux et l’environnement dans le contexte de la résistance aux antimicrobiens
L’interrelation entre les humains, les animaux et l’environnement

Source : Adapté de « Lutter contre la résistance aux antimicrobiens et optimiser leur utilisation : un cadre d’action pancanadien » de l’Agence de la santé publique du Canada, 2017

Version textuelle

L’image illustre l’interrelation entre les humains, les animaux et l’environnement dans le contexte de la résistance aux antimicrobiens, qui est reconnue dans l’approche « Un monde, une santé ».

La résistance aux antimicrobiens se propage entre les animaux, entre les humains et dans l’environnement, notamment par de l’eau et des fertilisants contaminés. Elle se propage ensuite entre les animaux et les humains, notamment par les aliments, puis entre les humains, les animaux et l’environnement.

Environ les deux tiers des fonds dépensés récemment par les quatre organisations fédérales pour des activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens examinées dans le cadre de l’audit provenaient de fonds non réservés (budgets existants)
Graphique illustrant les types de financement utilisés dans le cadre des activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens

Source : D’après des estimations de l’Agence de la santé publique du Canada, de Santé Canada, de l’Agence canadienne d’inspection des aliments et d’Agriculture et Agroalimentaire Canada

Version textuelle

Ce tableau illustre les différents types de financement auxquels ont eu recours les quatre organisations fédérales pour mener des activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens qui ont été examinées dans le cadre du présent audit au cours des exercices 2021‑2022 et 2022‑2023.

Les 3 types de financement utilisés étaient les fonds non réservés provenant des budgets existants, le financement de la recherche et les fonds prévus dans le budget de 2021. Les fonds réservés visent les activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens du gouvernement du Canada.

En 2021‑2022, les quatre organisations ont dépensé 3 670 000 $ provenant de budgets existants (68 %), 1 730 000 $ provenant du financement de la recherche (32 %) et 38 000 $ provenant des fonds prévus dans le budget 2021 (1 %) pour les activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens.

En 2022‑2023, elles ont dépensé 7 670 000 $ provenant des budgets existants (65 %), 1 550 000 $ provenant du financement de la recherche (13 %) et 2 580 000 $ provenant des fonds prévus dans le budget de 2021 (22 %) pour les activités de lutte contre la résistance aux antimicrobiens.

L’accès du Canada à 13 nouveaux antibiotiques de dernier recours était inférieur à celui de bon nombre de pays en 2020
Tableau comparant l’accès de sept pays aux nouveaux antibiotiques de derniers recours

Source : D’après des données de l’Organisation mondiale de la santé et Oxford University Press, Patient Access in 14 High‑Income Countries to New Antibacterials Approved by the US Food and Drug Administration, European Medicines Agency, Japanese Pharmaceuticals and Medical Devices Agency, or Health Canada, 2010‑2020, 2022 et Santé Canada, Base de données sur les produits pharmaceutiques

Version textuelle

Ce tableau compare l’accès du Canada aux nouveaux antibiotiques de dernier recours à celui de six autres pays. Il s’agit de « nouveaux » antibiotiques qui sont commercialisés depuis 2010 et qui traitent les infections bactériennes d’une façon différente des médicaments auparavant offerts.

En 2020, les États‑Unis avaient accès à 13 nouveaux antibiotiques.

Le Royaume‑Uni avait accès à 8 nouveaux antibiotiques.

La Suède avait accès à 8 nouveaux antibiotiques.

La France avait accès à 6 nouveaux antibiotiques.

L’Italie avait accès à 5 nouveaux antibiotiques.

Le Japon avait accès à 2 nouveaux antibiotiques.

En 2020, le Canada avait accès à 1 nouvel antibiotique, mais avait obtenu l’accès au marché d’un autre antibiotique en 2021, mais celui-ci ne faisait pas partie de l’étendue de l’étude. (Source : Santé Canada, Base de données sur les produits pharmaceutiques)

Infographie

Infographie au sujet du rapport d’audit de 2023 sur la résistance aux antimicrobiens

Version textuelle

La résistance aux antimicrobiens

La résistance aux antimicrobiens entraîne des conséquences actuelles et prévisibles importantes pour la santé des Canadiennes et des Canadiens. L’histoire nous montre, comme cela a été le cas pendant la pandémie de COVID‑19, que dans le domaine des soins de santé, le coût d’une mauvaise préparation se mesure en nombre de vies perdues.

Le gouvernement fédéral n’a pas pris suffisamment de mesures pour s’attaquer à la résistance croissante aux médicaments antimicrobiens, comme les antibiotiques, et ainsi mieux protéger la santé de la population canadienne.

Faits saillants

L’Organisation mondiale de la Santé a déclaré en 2019 que la résistance aux antimicrobiens était l’une des dix principales menaces mondiales pour la santé publique.

Un plan d’action pancanadien sur la résistance aux antimicrobiens a été publié en juin 2023.

Les Canadiennes et les Canadiens n’avaient pas accès à près des deux tiers des médicaments sur le marché classés comme antibiotiques de dernier recours.

Il manque des éléments cruciaux au Plan d’action pancanadien sur la résistance aux antimicrobiens pour assurer sa mise en œuvre

Les éléments suivants sont indispensables pour accomplir des progrès significatifs dans la lutte contre la résistance aux antimicrobiens :

  • des livrables concrets
  • la désignation des responsables de chaque mesure
  • des échéanciers

La lutte contre la résistance aux antimicrobiens au Canada requiert le déploiement d’efforts coordonnés par tous les ordres de gouvernement et toutes les parties prenantes.

Des lacunes persistent dans les données sur la résistance aux antimicrobiens et l’utilisation de ceux‑ci

L’Agence de la santé publique du Canada a fait des progrès dans la collecte de données sur la résistance aux antimicrobiens et l’utilisation de ceux‑ci, mais ces données demeurent limitées, en particulier en dehors des hôpitaux et chez les populations vulnérables.

Des lacunes persistent dans les trois catégories de données suivantes sur la résistance aux antimicrobiens et l’utilisation de ceux‑ci :

  • données pour comprendre quand et comment les antimicrobiens sont utilisés;
  • données pour dégager et comprendre les tendances en matière de résistance aux antimicrobiens;
  • données intégrées pour comprendre la transmission.

Le gouvernement fédéral n’a pas pris suffisamment de mesures pour obtenir des antibiotiques offerts dans d’autres pays

Le Canada n’a accès qu’à 2 des 13 nouveaux antibiotiques de dernier recours sur le marché pour traiter les infections bactériennes. Les États‑Unis, la Suède et le Royaume-Uni ont accès à entre 8 et 13 de ces nouveaux médicaments.

Ces données sur l’accès aux médicaments sur le marché proviennent de l’Organisation mondiale de la Santé; de « Patient Access in 14 High‑Income Countries to New Antibacterials Approved by the United StatesUS Food and Drug Administration, European Medicines Agency, Japanese Pharmaceuticals and Medical Devices Agency, or Health Canada, 2010–2020 » (en anglais seulement), Oxford University Press, 2022; et de la Base de données sur les produits pharmaceutiques de Santé Canada.

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Date de dépôt

  • 19 octobre 2023

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