Déclaration d’ouverture devant le Comité permanent des comptes publics
La gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations — Services aux Autochtones Canada
(Rapport 8 — Rapports de 2022 de la vérificatrice générale du Canada)
Le 25 novembre 2022
Karen Hogan, Fellow comptable professionnelle agrééeFCPA, Fellow comptable agrééeFCA
Vérificatrice générale du Canada
Monsieur le Président, je vous remercie de nous donner l’occasion de discuter de notre rapport sur la gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations, qui a été déposé à la Chambre des communes le 15 novembre 2022. Je tiens à reconnaître que cette audience se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabe. Je suis accompagnée aujourd’hui de Glenn Wheeler et de Doreen Deveen, qui ont dirigé cet audit.
La fréquence et la gravité des situations d’urgence comme les inondations et les feux de forêt augmentent partout au Canada. Ces situations d’urgence touchent de façon disproportionnée les collectivités des Premières Nations en raison de leur éloignement géographique et de leur contexte socioéconomique. Au cours des 13 dernières années, les collectivités des Premières Nations ont vécu plus de 1 300 situations d’urgence qui ont entraîné l’évacuation et le déplacement de plus de 130 000 personnes.
Pour faire écho à notre audit de 2013 à ce sujet, nous avons conclu que Services aux Autochtones Canada n’avait pas fourni aux collectivités des Premières Nations le soutien dont elles avaient besoin pour gérer les urgences d’origine naturelle.
Au cours des quatre dernières années, le Ministère a dépensé environ 828 millions de dollars pour la gestion des urgences touchant les collectivités des Premières Nations. Nous avons constaté que les mesures prises par le Ministère visaient plutôt à réagir aux urgences qu’à les prévenir. Malgré les nombreux projets d’infrastructure cernés par les collectivités des Premières Nations qui permettraient d’atténuer les répercussions des situations d’urgence, le Ministère avait un arriéré de 112 projets qu’il avait approuvés, mais qu’il n’avait pas financés.
Les dépenses de Services aux Autochtones Canada liées aux activités d’intervention en situation d’urgence et de rétablissement étaient trois fois et demie plus élevées que les dépenses visant à aider les collectivités à s’y préparer ou à en atténuer les répercussions. Selon Sécurité publique Canada, pour chaque dollar investi dans les efforts de préparation et d’atténuation, six dollars peuvent être économisés en coûts d’intervention et de rétablissement en cas d’urgence.
En dépit de notre recommandation de 2013, Services aux Autochtones Canada n’avait toujours pas recensé les collectivités des Premières Nations ayant le plus besoin de soutien pour renforcer leur capacité à se préparer aux situations d’urgence. Un tel recensement permettrait au Ministère de cibler ses investissements en conséquence.
Par exemple, la construction de ponceaux et de digues pour prévenir les inondations saisonnières aiderait à réduire le plus possible l’incidence sur les personnes et à faire baisser le coût des activités d’intervention d’urgence et de rétablissement. Jusqu’à ce que le Ministère se concentre sur la prévention et l’investissement dans les infrastructures, les collectivités sont susceptibles de continuer à subir des répercussions plus marquées des situations d’urgence.
Nous avons également constaté que les besoins des collectivités des Premières Nations concernant leur capacité n’avaient pas été cernés. Par exemple, bien que le Ministère ait accordé du financement aux Premières Nations pour l’embauche d’environ 190 coordonnatrices et coordonnateurs de la gestion des urgences à temps plein et à temps partiel, il ne savait pas si ce nombre était suffisant pour que les Premières Nations disposent de la capacité requise pour gérer les urgences.
Depuis 2009, 268 collectivités ont été évacuées, certaines plus d’une fois. Même si la majorité de ces évacuations ont duré moins d’un mois, 90 d’entre elles ont duré plus de trois mois, et certaines ont même duré plusieurs années. Une de ces évacuations dure depuis plus de 10 ans.
Services aux Autochtones Canada ne s’est pas assuré que les services d’urgence offerts étaient adaptés sur le plan culturel et qu’ils étaient comparables à ceux offerts aux municipalités de taille semblable dans des situations similaires. Le Ministère n’a pas défini ce qui constituait des services comparables. Il n’a pas non plus surveillé rigoureusement les services offerts aux collectivités des Premières Nations par les provinces et les autres fournisseurs de services.
Services aux Autochtones Canada a accepté nos sept recommandations.
En 2011, Sheila Fraser, à la fin de son mandat en tant que vérificatrice générale du Canada, a employé le mot « inacceptable » pour résumer son impression des mesures prises par le gouvernement après 10 ans d’audits et de recommandations connexes sur les enjeux touchant les Premières Nations. Cinq ans plus tard, Michael Ferguson, mon prédécesseur, a qualifié la situation de « plus qu’inacceptable ». Aujourd’hui, plusieurs décennies d’audits ont montré que les programmes et les engagements du gouvernement n’ont pas servi les peuples autochtones du Canada, et ce, de nombreuses fois. Il me paraît évident que les discours fermes ne suffisent pas pour opérer un changement — il faut prendre des mesures concrètes pour corriger ces problèmes de longue date, et le gouvernement doit être tenu responsable de ses actes.
Monsieur le Président, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serions heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.