Les problèmes liés au système de paye Phénix; Les centres d’appels — Agence du revenu du Canada
Déclaration d’ouverture au Comité sénatorial permanent des finances nationales
Les problèmes liés au système de paye Phénix
(Rapport 1 — Rapports de l’automne 2017 du vérificateur général du Canada)
Les centres d’appels — Agence du revenu du Canada
(Rapport 2 — Rapports de l’automne 2017 du vérificateur général du Canada)
Le 31 janvier 2018
Michael Ferguson, Comptable professionnel agrééCPA, Comptable agrééCA
Fellow comptable professionnel agrééFCPA, Fellow comptable agrééFCA (Nouveau-Brunswick)
Vérificateur général du Canada
Monsieur le Président, je vous remercie de nous donner l’occasion de discuter de nos rapports de l’automne 2017 sur les problèmes liés au système de paye Phénix et sur les centres d’appels de l’Agence du revenu du Canada. Je suis accompagné des directeurs principaux responsables de ces audits, Messieurs Jean Goulet et Martin Dompierre.
Je vais résumer pour le Comité les constatations pertinentes de ces audits; toutefois, il est important de noter que nos travaux ont pris fin en septembre 2017.
Voyons d’abord notre audit du système de paye Phénix. En 2009, le gouvernement du Canada a entamé la transformation des processus d’administration de la paye de ses 290 000 employés. Cette initiative visait deux projets. L’un consistait à centraliser les services de paye pour 46 ministères et organismes qui employaient environ 70 % de tous fonctionnaires fédéraux. L’autre consistait à remplacer le système de paye vieux de 40 ans, qui était utilisé par 101 ministères et organismes, par un nouveau système appelé Phénix.
Depuis le lancement de Phénix en février 2016, il est arrivé souvent que le gouvernement fédéral ne puisse pas payer les fonctionnaires fédéraux le bon montant ou au bon moment. Nous avons examiné si Services publics et Approvisionnement Canada avait travaillé avec les ministères et organismes retenus pour régler les problèmes de paye de Phénix, de sorte que les employés du gouvernement reçoivent le montant exact de leur paye, au bon moment.
Cet audit est important parce que les problèmes de paye du gouvernement ont une incidence financière sur des dizaines de milliers de fonctionnaires et qu’il faut corriger le système.
Nous avons constaté que les problèmes de paye n’ont fait qu’augmenter tout au long de notre audit. Un an et demi après le lancement du système par le gouvernement, le nombre de fonctionnaires en attente du traitement d’une demande d’intervention de paye dépassait les 150 000, pour les 46 ministères et organismes dont les services de paye avaient été centralisés. Ces 150 000 employés attendaient le traitement d’environ 500 000 demandes d’intervention de paye. Ce chiffre exclut les demandes en attente dans les 55 ministères et organismes dont les services de paye n’étaient pas centralisés, et les demandes en attente liées aux conventions collectives récemment signées avec les syndicats de la fonction publique fédérale.
Le problème a tellement augmenté que fin juin 2017, la valeur des erreurs non corrigées dans la paye des fonctionnaires dépassait plus d’un demi-milliard de dollars. Ce montant englobait les sommes dues à des fonctionnaires qui avaient été sous-payés et les sommes dues à l’État par des fonctionnaires qui avaient été trop payés.
Les ministères et organismes ont fait face à des problèmes depuis le lancement de Phénix. Cependant, il a fallu quatre mois à Services publics et Approvisionnement Canada pour admettre la gravité des problèmes de traitement de la paye. Depuis, le Ministère a réagi, mais il n’a mis en place que quelques solutions permanentes. En fait, 16 mois après l’apparition des problèmes, il n’y avait toujours pas de structure de gouvernance en place.
À notre avis, la solution aux problèmes de paye de Phénix est à deux volets. Il faut d’abord payer les gens le bon montant au bon moment. Cependant, après cela, il restera du travail à faire pour que le système traite la paye de manière efficiente.
Services publics et Approvisionnement Canada nous a dit qu’il concevait un plan exhaustif, avec des données détaillées sur le coût, pour régler les problèmes de paye. Cependant, ce plan n’était pas prêt à la fin de notre audit.
Pour appliquer une solution viable, le gouvernement doit déterminer les causes fondamentales des problèmes et s’y attaquer, surveiller de près les mesures pour régler les problèmes et s’assurer d’une collaboration solide entre Services publics et Approvisionnement Canada, le Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et les ministères et organismes touchés.
À notre avis, il faudra des années pour régler les problèmes de paye de Phénix, et cela coûtera plus que les 540 millions de dollars estimés par les organisations du gouvernement. Nous avons constaté que l’État australien du Queensland avait fait face à une situation semblable; il lui a fallu huit ans et plus de 1,2 milliard de dollars pour régler la plupart de ces problèmes.
Parlons maintenant de notre audit des centres d’appels de l’Agence du revenu du Canada. Ces centres d’appels sont une source importante d’information sur l’impôt pour la population.
Nous avons examiné si les centres d’appels de l’Agence avaient donné aux Canadiens des renseignements exacts en temps opportun. Nous avons aussi examiné les méthodes de l’Agence pour évaluer le rendement de ses centres d’appels et en rendre compte.
Dans l’ensemble, nous avons constaté que l’Agence n’avait pas donné des renseignements exacts en temps opportun. L’Agence a bloqué 29 millions d’appels, soit plus de la moitié des appels reçus. Elle surveillait le temps d’attente d’un appelant voulant parler à un agent. Si le temps d’attente moyen approchait les deux minutes, l’Agence bloquait l’appel — habituellement en activant une tonalité d’occupation — ou le dirigeait au système de libre-service automatisé.
L’Agence nous a dit que les appelants préféreraient entendre la tonalité d’occupation ou un message automatisé plutôt qu’attendre plus de deux minutes avant de parler à un agent. Cependant, elle n’a pas sondé les appelants pour confirmer cette hypothèse. Les appelants devaient donc faire en moyenne trois ou quatre tentatives d’appel par semaine; et même après plusieurs tentatives, certains appelants n’arrivaient pas à parler à un agent.
Nos tests ont révélé que le taux d’erreurs des agents était beaucoup plus élevé que celui estimé par l’Agence. Les agents des centres d’appels nous ont donné des renseignements inexacts près de 30 % du temps. Ce pourcentage est semblable aux résultats d’autres évaluations et beaucoup plus haut que le taux d’erreur estimé par l’Agence.
Nous avons constaté que le système de contrôle qualité de l’Agence ne testait pas l’exactitude des réponses des agents de manière efficace et que les résultats de ces tests n’étaient donc pas fiables. Dans la plupart des cas, par exemple, les agents savaient que l’appel était surveillé, ce qui a pu les inciter à modifier leur comportement pour améliorer leur rendement.
Enfin, selon l’Agence, environ 90 % des appelants avaient pu joindre le système de libre-service automatisé ou un agent. Toutefois, nous avons constaté que le pourcentage ne tenait pas compte des appels bloqués, soit plus de la moitié du volume total d’appels.
Si on prend en considération les appels bloqués, seulement 36 % des appels faits aux centres d’appels de l’Agence ont été pris par un agent ou le système de libre-service automatisé et ont duré au moins une minute.
Nous sommes heureux d’indiquer que les ministères et organismes visés par ces audits ont accepté toutes nos recommandations et se sont engagés à prendre les mesures qui s’imposent.
Monsieur le Président, je termine ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serons heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.