L’élevage du saumon; Assurer la durabilité des principaux stocks de poissons du Canada — Pêches et Océans Canada
Déclaration d’ouverture au Comité sénatorial permanent des pêches et des océans
L’élevage du saumon
Assurer la durabilité des principaux stocks de poissons du Canada — Pêches et Océans Canada
22 novembre 2018
Julie Gelfand
Commissaire à l’environnement et au développement durable
Monsieur le Président, je suis heureuse d’être ici aujourd’hui pour discuter de mon rapport du printemps 2018 sur l’élevage du saumon et d’autres récents rapports qui se rapportent aux pêches. Je suis accompagnée de Sharon Clark, la directrice principale chargée de ces audits.
Dans notre audit sur l’élevage du saumon, nous avons examiné si Pêches et Océans Canada et l’Agence canadienne d’inspection des aliments avaient surveillé l’élevage du saumon de manière à protéger le poisson sauvage. Cette industrie pose en effet des risques pour le poisson sauvage, notamment en l’exposant à des maladies, à des médicaments et à des pesticides. Nous avons examiné comment les risques étaient gérés en Colombie-Britannique et dans les provinces atlantiques, en particulier au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve-et-Labrador.
Nous avons constaté que Pêches et Océans Canada avait mené des recherches sur ces risques et sur d’autres. Nous avons aussi constaté que le Ministère avait déterminé les lieux où on pouvait installer ou agrandir les élevages de saumon, ainsi que les conditions d’exploitation des élevages.
Cependant, nous avons constaté que le Ministère ne surveillait pas la santé du poisson sauvage. En réponse au rapport de la Commission Cohen, le Ministère s’était engagé à effectuer dix évaluations des risques liés aux grandes maladies connues et de leurs effets sur les poissons sauvages. Cependant, nous avons constaté qu’il n’avait effectué qu’une seule de ces évaluations des risques. Le Ministère a annoncé récemment le lancement d’une deuxième évaluation des risques, qui vise le risque de transfert du réovirus pisciaire du saumon d’élevage de l’Atlantique. Toutefois, ni l’une ni l’autre de ces évaluations ne porte sur les risques liés aux maladies nouvelles et émergentes.
À notre avis, les lacunes que nous avons constatées dans l’évaluation et la surveillance indiquaient que le Ministère ne connaissait pas les effets de l’élevage du saumon sur la santé du poisson sauvage, ce qui va à l’encontre de l’approche de précaution.
Nous avons aussi constaté que Pêches et Océans Canada n’avait pas fait respecter adéquatement la réglementation sur l’élevage du saumon. Or, il est important de faire respecter cette réglementation puisqu’elle vise à protéger les poissons sauvages.
De même, le Ministère n’a pas défini de limites pour la quantité de médicaments et de pesticides que les fermes aquacoles peuvent utiliser pour traiter les maladies et les parasites. Or il est important de fixer des limites puisque les médicaments et les pesticides utilisés dans l’élevage du saumon peuvent nuire au poisson sauvage, surtout aux poissons vivant dans les fonds marins. Le Ministère n’a pas non plus défini de norme nationale pour les filets et les autres éléments d’équipement afin d’empêcher les évasions de poissons d’élevage.
Ces constatations nous ont amenés à conclure que Pêches et Océans Canada n’avait pas géré les risques posés par l’élevage du saumon de manière à protéger le poisson sauvage. Nous avons notamment recommandé au Ministère de préciser le niveau de risque pour le poisson sauvage qu’il accepte lorsqu’il facilite le développement de l’élevage du saumon. Nous avons aussi recommandé au Ministère de fixer des seuils à respecter pour les médicaments et les pesticides immergés ou rejetés dans les parcs en filet afin de réduire plus efficacement le danger pour le poisson sauvage.
À l’automne 2016, j’ai présenté au Parlement un rapport d’audit sur la durabilité des principaux stocks de poissons au Canada. Nous avons constaté que pour 12 des 15 principaux stocks de poissons qui se trouvaient dans la zone critique et qui étaient toujours pêchés, le Ministère n’avait pas de plans de rétablissement, notamment pour certains stocks de morue, de maquereau, de hareng et de pétoncle. Continuer de pêcher des poissons dans la zone critique sans prévoir de plans de rétablissement accroît le risque d’effondrement des stocks.
Nous avons constaté que Pêches et Océans Canada n’avait pas de plans de gestion intégrée des pêches assortis d’information actualisée sur les stocks pour près de 30 % des principaux stocks de poissons du Canada, y compris ceux ayant la plus grande valeur économique.
Le Ministère a indiqué que plus de 50 % des stocks n’avaient pas tous les points de référence permettant de les classer selon le Cadre de l’approche de précaution. Ces points de référence servent à classer les principaux stocks de poissons dans la zone saine, la zone de prudence ou la zone critique. Cela signifiait que le Ministère était moins certain de la santé de ces stocks. En outre, le Ministère a placé la santé de 16 % des stocks dans la catégorie « inconnu ».
Sans cette information, Pêches et Océans Canada ne peut garantir que les pêches sont gérées de manière durable au profit des générations présentes et futures.
Nous avons aussi présenté au Parlement en octobre de cette année un rapport sur la protection des mammifères marins. Nous avons constaté que ce n’est qu’après que 12 baleines noires de l’Atlantique Nord (une espèce en voie de disparition) ont été trouvées mortes dans l’estuaire du Saint-Laurent que Pêches et Océans Canada et d’autres organisations fédérales ont commencé à coopérer pour protéger certains de nos mammifères marins. Des pêches ont été fermées et la vitesse des bateaux a été réduite dans certaines zones.
Nous avons aussi constaté que le gouvernement n’utilisait pas de manière adéquate les autres outils à sa disposition pour protéger la plupart de nos mammifères marins, tels que la Loi sur les espèces en péril, les zones de protection marine et la Politique sur la gestion des prises accessoires.
Nous nous pencherons davantage sur les pêches dans mes rapports du printemps 2019, qui comprendront un rapport sur les espèces aquatiques envahissantes.
Je conclus ainsi ma déclaration d’ouverture. Nous serons heureuses de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.