Déclaration d’ouverture au Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles
Étude sur les changements climatiques : L’industrie canadienne du pétrole et du gaz
Le 27 avril 2023
Jerry V. DeMarco
Commissaire à l’environnement et au développement durable
Merci, Madame la Présidente, nous sommes heureux de comparaître devant votre comité dans le cadre de son étude sur les changements climatiques et l’industrie canadienne du pétrole et du gaz. Je tiens tout d’abord à reconnaître que cette audience se déroule sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinaabe. Je suis accompagné aujourd’hui de Kimberley Leach et de James McKenzie, qui étaient responsables de plusieurs de nos rapports d'audit sur ce sujet.
Le Bureau du vérificateur général du Canada a présenté plusieurs rapports sur les changements climatiques au cours des dernières années. Afin de laisser plus de temps pour les questions, je vais donner un bref aperçu de quatre de nos récents rapports d'audit ainsi que notre rapport rétrospectif de 2021 sur les leçons tirées de la performance du Canada dans le dossier des changements climatiques depuis 1990.
Notre rapport rétrospectif de 2021 comprend huit leçons tirées de l’action et de l’inaction du Canada tout au long de cette crise climatique qui persiste, y compris la dépendance économique du Canada à l’égard de secteurs à forte intensité d’émissions, comme le secteur pétrolier et gazier.
La production pétrolière et gazière représente la plus grande part des émissions de gaz à effet de serre du Canada par secteur économique. La production croissante de pétrole et de gaz demeure un obstacle à l’atteinte des cibles climatiques nationales et internationales.
Le Canada s’est engagé, entre autres, à réduire sa dépendance aux combustibles fossiles pour favoriser une économie à faibles émissions de carbone en vue d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050. Dans la deuxième section de notre rapport, nous avons recensé plusieurs possibilités de relever les défis d’une telle transition.
Dans le cadre de notre audit de 2022 sur une transition équitable vers une économie à faibles émissions de carbone, nous avons constaté qu’à mesure que le gouvernement se tournait vers des nouvelles solutions à faibles émissions de carbone, il n’était pas prêt à fournir le soutien nécessaire à plus de 50 collectivités et 170 000 travailleuses et travailleurs qui ont des emplois directs dans le secteur des combustibles fossiles.
Nous avons aussi constaté qu’en tant que ministère responsable, Ressources naturelles Canada avait fait très peu pour présenter une loi sur la transition équitable. Depuis notre audit, le Ministère a annoncé un plan provisoire de création d’emplois durables, mais aucune mesure législative n’a encore été présentée.
Je passerai maintenant à notre audit de 2022 sur la tarification du carbone. La tarification de la pollution causée par le carbone amène les consommateurs et les producteurs à changer de comportement, ce qui permet de réduire l’ensemble des émissions de gaz à effet de serre. Une tarification efficace du carbone est donc cruciale pour permettre au Canada de réussir à réduire de manière considérable ses émissions de gaz à effet de serre.
Nous avons constaté que les exigences fédérales à l’égard des grands émetteurs continuaient d’affaiblir le principe du « pollueur payeur » en permettant des systèmes de tarification provinciaux moins rigoureux dans certaines régions du pays. De plus, les collectivités autochtones et d’autres groupes au sein de la société demeuraient touchés de façon disproportionnée par les systèmes de tarification du carbone.
Notre audit de 2021 du Fonds de réduction des émissions pour le secteur pétrolier et gazier visait à examiner les mesures prises en réponse à la pandémie de COVID‑19 pour réduire les émissions tout en préservant les emplois et en attirant les investissements dans les sociétés pétrolières et gazières.
Nous avons constaté que le programme avait été mal conçu, car il n’établissait pas de lien entre le financement reçu et les réductions d’émissions nettes provenant d’exploitations pétrolières et gazières classiques côtières et infracôtières. Par exemple, pour 27 des 40 projets que nous avons examinés, les sociétés ont indiqué dans leur demande que le financement leur permettrait d’accroître leurs niveaux de production. Si la production augmente, les émissions connexes augmentent aussi, mais ces augmentations n’ont pas été prises en compte dans les projections de Ressources naturelles Canada.
Enfin, comme vous le savez peut-être, notre audit des règlements sur les gaz à effet de serre a été déposé au Parlement la semaine dernière. Nous avons constaté qu’Environnement et Changement climatique Canada ne savait pas dans quelle mesure les règlements sur les gaz à effet de serre que nous avons examinés contribuaient à l’atteinte de l’objectif global de réduction des émissions du Canada. L’approche adoptée par le Ministère pour mesurer les émissions ne permettait pas d’associer les résultats à des règlements en particulier. Les règlements sont un élément important de l’atteinte de la cible de réduction des émissions du Canada. Toutefois, sans information complète sur les répercussions, le gouvernement fédéral ne sait pas s’il utilise les bons outils pour réduire suffisamment les émissions en vue d’atteindre cette cible.
Même si le gouvernement s’est engagé à maintes reprises à réduire les émissions du Canada, celles-ci ont augmenté d’environ 14 % de 1990 à 2021. Depuis la signature de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques en 1992, le Canada est le pays le moins performant du Groupe des 7G7.
Le Canada n’a pas atteint une seule cible de réduction des émissions au cours des trois dernières décennies, alors qu’il a continué d’accroître la production de pétrole et de gaz. Le temps presse lorsqu’il est question des changements climatiques et il ne reste que peu de temps pour prévenir leurs effets catastrophiques.
Madame la Présidente, je termine ainsi ma déclaration. Nous serions heureux de répondre aux questions des membres du Comité. Merci.