Printemps 2014 — Rapport du vérificateur général du Canada Chapitre 4 — Augmenter la capacité des pénitenciers — Service correctionnel Canada
Printemps 2014 — Rapport du vérificateur général du Canada
Chapitre 4 — Augmenter la capacité des pénitenciers — Service correctionnel Canada
Introduction
Objet de l’audit
Observations et recommandations
Accroître la capacité des établissements
En général, les besoins à court terme en matière de logement sont satisfaits
Il y a encore une surpopulation carcérale dans certaines régions
Environ la moitié des établissements du SCC fonctionnaient au maximum de leur capacité pondérée ou au-delà de celle-ci
Les travaux d’agrandissement ne comportent pas l’ajout de cellules d’isolement ni d’aires réservées aux services de santé
Frais d’exploitation des établissements agrandis
Les établissements ont été agrandis en l’absence d’information complète sur la planification
Les économies découlant de la fermeture de pénitenciers sont moins élevées que prévu
Les pressions en matière de capacité limitent la réadaptation des délinquants
Conclusion
À propos de l’audit
Annexe — Tableau des recommandations
Pièces :
4.1 — En mars 2013, le SCC comptait plus de délinquants que de cellules individuelles
4.2 — La pression carcérale prévue est maîtrisée à court terme
4.3 — Les taux d’occupation moyens (en 2012-2013) révèlent une surpopulation carcérale à certains niveaux de sécurité
4.4 — Les frais de détention varient selon le niveau de sécurité de l’établissement
4.5 — Les délinquants peuvent être admissibles à différents types de libérations pendant toute la durée de leur peine
Rapport d’audit de performance
Le présent rapport fait état des résultats d’un audit de performance réalisé par le Bureau du vérificateur général du Canada en vertu de la Loi sur le vérificateur général.
Un audit de performance est une évaluation indépendante, objective et systématique de la façon dont le gouvernement gère ses activités et ses ressources et assume ses responsabilités. Les sujets des audits sont choisis en fonction de leur importance. Dans le cadre d’un audit de performance, le Bureau peut faire des observations sur le mode de mise en œuvre d’une politique, mais pas sur les mérites de celle-ci.
Les audits de performance sont planifiés, réalisés et présentés conformément aux normes professionnelles d’audit et aux politiques du Bureau. Ils sont effectués par des auditeurs compétents qui :
- établissent les objectifs de l’audit et les critères d’évaluation de la performance;
- recueillent les éléments probants nécessaires pour évaluer la performance en fonction des critères;
- communiquent les constatations positives et négatives;
- tirent une conclusion en regard des objectifs de l’audit;
- formulent des recommandations en vue d’apporter des améliorations s’il y a des écarts importants entre les critères et la performance évaluée.
Les audits de performance favorisent une fonction publique soucieuse de l’éthique et efficace, et un gouvernement responsable qui rend des comptes au Parlement et à la population canadienne.
Introduction
4.1 Le Service correctionnel du Canada (SCC) est chargé de garder en toute sécurité les délinquants condamnés par les tribunaux à une peine d’emprisonnement de deux ans ou plus. Il lui incombe également de les préparer à leur réinsertion sociale en toute société à leur libération. Au cours de l’exercice 2012-2013, le SCC a dépensé environ 2 milliards de dollars, ou 82 % de son budget de fonctionnement, à la garde des délinquants et aux programmes destinés à leur réadaptation. Ces dépenses ont augmenté de 17 % au cours des cinq dernières années, en raison notamment de l’augmentation de la population carcérale. En mars 2013, il y avait 15 224 personnes incarcérées dans 57 pénitenciers fédéraux au Canada. En outre, 7 700 délinquants étaient sous surveillance dans la collectivité, dont certains qui étaient logés dans des établissements résidentiels communautaires du SCC.
4.2 Le SCC exploite des pénitenciers dans cinq régions : le Pacifique, les Prairies, l’Ontario, le Québec et l’Atlantique. Chaque région dispose de pénitenciers offrant divers niveaux de sécurité (soit sécurité maximale, moyenne ou minimale), d’établissements pour femmes, ainsi que d’unités spécialisées pour l’évaluation initiale des délinquants et les services de santé mentale. Deux régions disposent également de pavillons de ressourcement pour les Autochtones.
4.3 Le SCC a pour objectif de placer les détenus dans des cellules individuelles. La double occupation des cellules (soit deux détenus gardés dans une cellule conçue pour un seul) ne devrait être qu’une mesure temporaire. En outre, des lits sont réservés dans des établissements communautaires pour les délinquants libérés qui ont besoin d’être logés, notamment en raison du type de mise en liberté dont ils bénéficient ou des conditions imposées par la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Le SCC collabore aussi avec environ 200 autres organisations partout au Canada qui fournissent un logement à des personnes qui sont sous surveillance dans la collectivité.
4.4 Bon nombre de pénitenciers au Canada ont été construits dans les années 1960 et 1970. En 2007, le ministre de la Sécurité publique a demandé un examen indépendant sur l’exploitation des pénitenciers canadiens, le problème du vieillissement des infrastructures et le coût de leur entretien. L’examen a fait ressortir que de nombreux pénitenciers étaient inadéquats pour gérer la population de délinquants. Il a recommandé de remplacer les pénitenciers vétustes et peu efficaces par de nouveaux établissements.
4.5 En 2009, le SCC avait prévu que des réformes de la justice pénale rallongeraient les peines de bon nombre de condamnés et feraient augmenter la population carcérale. Les changements législatifs, en vigueur depuis 2008, comprenaient des peines minimales obligatoires, l’élimination de la mise en liberté par la procédure d’examen expéditif et des restrictions du temps alloué pour détention présentencielle. Une analyse effectuée par le SCC a révélé qu’il y avait un risque de surpopulation dans ses établissements, car il n’y avait pas suffisamment de places pour absorber l’augmentation prévue de la population carcérale.
4.6 En octobre 2009, le SCC a été autorisé à dépenser 751 millions de dollars sur cinq ans pour agrandir ses établissements en installant 2 594 lits superposés et en ajoutant 2 752 nouvelles cellules. L’organisme a aussi reçu une approbation de principe pour la construction de cinq nouveaux pénitenciers, au coût de 960 millions de dollars, sous réserve de l’élaboration d’un plan de logement à long terme.
4.7 En avril 2012, le gouvernement a annoncé la fermeture de trois établissements afin de réduire les frais d’exploitation dans le cadre du plan d’action pour la réduction du déficit. Il a également indiqué qu’il n’avait pas l’intention de faire construire de nouveaux établissements. En juillet de cette même année, il a annoncé qu’il n’irait pas de l’avant avec la construction des nouveaux établissements prévus parce que le SCC avait reconnu que la population carcérale n’avait pas augmenté autant que prévu. Le SCC a donc remis une somme de 1,48 milliard de dollars qui lui avait été accordée expressément pour financer la construction de nouvelles installations et leur exploitation en vue de répondre à l’augmentation de la population carcérale, laquelle ne s’est pas produite.
Objet de l’audit
4.8 L’audit avait pour objectif de déterminer si le Service correctionnel du Canada (SCC) avait augmenté la capacité de ses établissements correctionnels de manière à répondre à ses besoins de façon rentable. Nous avons examiné la méthode utilisée par le SCC pour estimer l’augmentation de la population carcérale et établir ses plans d’agrandissement. L’audit a porté sur la période allant d’avril 2010 à septembre 2013. La section intitulée À propos de l’audit, à la fin du chapitre, donne des précisions sur l’objectif, l’étendue, la méthode et les critères de l’audit.
Observations et recommandations
Accroître la capacité des établissements
4.9 Le Service correctionnel du Canada (SCC) doit s’assurer d’avoir suffisamment de cellules pour loger les détenus dont il a la garde. Le nombre de places opérationnelles dans un pénitencier peut varier selon la mise en service de nouvelles cellules ou la mise hors service d’autres cellules qui doivent être rénovées ou entretenues. La population carcérale peut aussi fluctuer selon le nombre de personnes incarcérées après le prononcé de leur peine ou à la suite d’une révocation de leur libération, ou encore en raison de transfèrements entre les pénitenciers ou de mises en liberté dans la collectivité.
4.10 En 2009, le SCC prévoyait une augmentation importante et rapide du nombre de détenus sous garde fédérale, surtout en raison de changements apportés aux dispositions législatives sur les peines. Il prévoyait que la population carcérale passerait de 14 200 en 2009 à environ 18 450 en mars 2013, ce qui représente une augmentation d’environ 30 %. Il lui fallait donc agir rapidement pour pouvoir prendre en charge 4 250 détenus de plus.
En général, les besoins à court terme en matière de logement sont satisfaits
4.11 Nous avons examiné si le SCC avait défini ses besoins en matière de logement pour s’assurer d’avoir une capacité suffisante pour le nombre de délinquants sous sa garde. En 2012, le SCC a constaté qu’il avait surestimé l’accroissement de la population carcérale : celle-ci n’avait pas augmenté autant que prévu après l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions législatives sur les peines. Par conséquent, l’organisme a actualisé ses prévisions et a projeté une croissance plus modeste de la population carcérale, soit environ 15 270 détenus d’ici mars 2013. Nous avons constaté que ces nouvelles estimations étaient conformes à ce que nous avons observé en mars 2013, alors que le SCC avait sous sa garde environ 15 224 détenus au Canada.
4.12 Nous avons également examiné si le SCC avait une capacité suffisante pour assurer la garde en toute sécurité des détenus pendant les travaux d’agrandissement. En général, l’organisme a maintenu un nombre de cellules opérationnelles plus élevé que le nombre de détenus. Cette pratique permet de réparer et d’entretenir les cellules et de séparer les groupes incompatibles pour assurer la sécurité tant du personnel que des détenus. Nous avons constaté que le nombre de cellules inoccupées avait nettement diminué au cours des trois dernières années. Au début de 2013, il y avait plus de détenus que de cellules individuelles disponibles (voir la pièce 4.1). Certains établissements ont donc manqué de place et, à certains niveaux de sécurité, ont dû loger deux détenus par cellule.
Pièce 4.1 — En mars 2013, le SCC comptait plus de délinquants que de cellules individuelles
Niveau de sécurité | Nombre d’établissements** | Cellules disponibles | Nombre de délinquants (observés en mars 2013) |
---|---|---|---|
Hommes – Maximale | 7 | 2 389 | 1 945 |
Hommes – Moyenne | 19 | 7 500 | 7 993 |
Hommes – Minimale | 16 | 2 553 | 2 719 |
Hommes – Unités spécialisées* | 9 | 1 713 | 1 964 |
Femmes – Multiples niveaux de sécurité | 6 | 652 | 603 |
Total | 57 | 14 807 | 15 224 |
* Comprennent les établissements à multiples niveaux de sécurité et les établissements servant à l’évaluation initiale et aux services de santé mentale. ** Le nombre d’établissements ne comprend pas les pavillons de ressourcement dans les collectivités. Source : Service correctionnel Canada |
4.13 En octobre 2013, le SCC avait ajouté 1 988 lits superposés et construit 530 nouvelles cellules. Au moment de l’audit, l’organisme s’attendait à terminer la construction de 2 120 nouvelles cellules en mars 2014 et à achever la construction du reste des cellules au cours de l’exercice suivant. Il pourra ainsi loger jusqu’à 16 700 détenus dans des cellules individuelles. Nous avons toutefois constaté que selon les nouvelles prévisions du SCC, les établissements correctionnels fonctionneront encore une fois au maximum de leur capacité, ou au-delà de celle-ci, seulement quelques années après la construction des nouvelles cellules (voir la pièce 4.2). Nous avons demandé aux représentants du SCC s’ils avaient des plans pour régler la pénurie de places prévue. Ces derniers nous ont indiqué qu’aucun plan n’avait été finalisé. Au moment de l’audit, l’organisme réévaluait ses prévisions concernant la population de détenus et élaborait une stratégie de logement pour la période postérieure à 2018.
Pièce 4.2 — La pression carcérale prévue est maîtrisée à court terme
[Pièce 4.2 — version textuelle]
Source : Analyse par le BVG de données du Service correctionnel du Canada
Il y a encore une surpopulation carcérale dans certaines régions
4.14 Nous avons examiné si les agrandissements prévus dans les régions étaient proportionnels aux besoins régionaux et à l’augmentation prévue de la population carcérale. Nous avons demandé à de hauts fonctionnaires du SCC de nous donner des renseignements détaillés à l’appui de leurs décisions quant aux établissements à agrandir, par exemple les évaluations de l’âge et de l’état des pénitenciers, les pressions existantes en matière de capacité et les répercussions à long terme de ces décisions. Ces représentants n’ont pas été en mesure de nous fournir les renseignements en question et nous ont informés que la disponibilité des terrains à l’intérieur du périmètre sécurisé d’un établissement, où l’on pourrait construire de nouvelles cellules rapidement, avait été le principal facteur déterminant dans le choix des pénitenciers à agrandir.
4.15 Nous avons donc constaté que les agrandissements n’étaient pas proportionnels aux augmentations prévues de la population carcérale dans les différentes régions. Le SCC avait prévu accroître la capacité régionale de 350 à 750 cellules, selon la région, même s’il prévoyait que la population carcérale augmenterait beaucoup plus en Ontario et dans les Prairies. En septembre 2010, l’organisme a ajusté ses plans pour mieux tenir compte de la répartition de la population de détenus dans les régions. Toutefois, même avec cet ajustement, le SCC estime que les agrandissements ne lui permettront pas d’avoir suffisamment de places en Ontario et dans les Prairies, régions qui comptent la moitié de tous les détenus.
4.16 Chaque pénitencier du SCC a une capacité pondérée, qui correspond généralement au nombre de cellules individuelles opérationnelles. Nous avons constaté qu’environ la moitié des établissements en Ontario et dans les Prairies avaient atteint ou dépassé leur capacité pondérée au cours des trois exercices considérés (de 2010-2011 à 2012-2013). Les établissements des régions de l’Atlantique et du Québec ont, quant à eux, atteint ou dépassé leur capacité pondérée en 2013, alors que la plupart des établissements de la région du Pacifique restaient en deçà de leur capacité. Même après la construction des nouvelles cellules, la population carcérale estimative dans les régions de l’Ontario et des Prairies restera plus élevée que le nombre de places disponibles.
4.17 Le SCC compte sur la double occupation de cellules pour satisfaire les besoins en matière de logement dans certains établissements. Il faut savoir que la politique de l’organisme stipule que la double occupation de cellules doit être une mesure temporaire, à utiliser seulement dans les aires approuvées, et ce, sans dépasser plus de 20 % de la population carcérale. Or, nous avons constaté qu’en Ontario et dans les Prairies, 26 % des détenus avaient été logés à deux dans une cellule au cours de l’exercice 2012-2013. Nous avons également constaté que, lors de ce même exercice, des pénitenciers avaient eu recours à la double occupation dans les aires d’isolement préventif ou dans des cellules de moins de 5 m2, ce qui va à l’encontre de l’esprit de la politique du SCC. Le SCC s’attend à ce que la double occupation de cellules se poursuive, même après la construction des nouvelles cellules.
4.18 Depuis janvier 2013, pour réduire la surpopulation, le SCC a augmenté le nombre de transfèrements de détenus entre les pénitenciers de l’Ontario et des Prairies et les pénitenciers du Pacifique et de l’Atlantique, où des places sont disponibles. Nous avons constaté que cela avait entraîné une augmentation des frais d’exploitation. Au cours de l’exercice 2010-2011, l’organisme a transféré 529 détenus, au coût de 1,5 million de dollars. Pendant les neuf premiers mois de 2013, les coûts ont grimpé, atteignant 3,4 millions de dollars pour le transfèrement de 908 détenus. Les représentants du SCC s’attendent à ce que le transfèrement de détenus sur de longues distances et les dépenses connexes se poursuivent une fois les agrandissements terminés.
Environ la moitié des établissements du SCC fonctionnaient au maximum de leur capacité pondérée ou au-delà de celle-ci
4.19 En 2009, le SCC avait prévu réaliser la plus grande partie de ses travaux d’agrandissement dans les établissements à niveau de sécurité élevé, car il souhaitait réduire au minimum la surpopulation dans ces établissements. À l’époque, l’organisme avait déterminé que la double occupation des cellules avait de lourdes conséquences, notamment une hausse des tensions, des agressions et des actes de violence. Il avait également relevé une augmentation des problèmes de sécurité pour le personnel et les détenus, surtout dans les pénitenciers à sécurité moyenne ou maximale. De fait, 63 % des nouvelles cellules ont été construites pour des établissements à sécurité moyenne ou maximale, 25 % pour des établissements à sécurité minimale, et 7 % pour les établissements de santé mentale. Les autres nouvelles cellules étaient prévues dans les établissements pour femmes, principalement des établissements à sécurité minimale.
4.20 Les pénitenciers fonctionnent au-delà de leur capacité pondérée lorsque le nombre de détenus dépasse le nombre de cellules individuelles disponibles et que la double occupation des cellules s’avère nécessaire. Dans le cas des établissements pour hommes, le SCC vise à exploiter ses établissements à sécurité maximale à un taux de 90 % de leur capacité pondérée et ses établissements à sécurité moyenne, à un taux de 95 %. Cette pratique lui donne la marge de manœuvre requise pour rénover les cellules, séparer les groupes incompatibles et assurer la sécurité du personnel et des détenus.
4.21 Nous avons examiné si le SCC avait une capacité suffisante pour assurer la garde en toute sécurité des détenus, en fonction du niveau de sécurité requis. Nous avons analysé les données communiquées par l’organisme pour trois exercices (2010-2011 à 2012-2013) afin de comparer le nombre de délinquants incarcérés et la capacité pondérée des pénitenciers, et ce, pour chaque niveau de sécurité et dans chacune des régions. Nous avons constaté qu’en 2012-2013 et au cours des trois exercices considérés, environ la moitié des établissements du SCC fonctionnaient régulièrement au maximum de leur capacité pondérée ou au-delà de celle-ci (voir la pièce 4.3).
Pièce 4.3 — Les taux d’occupation moyens (en 2012-2013) révèlent une surpopulation carcérale à certains niveaux de sécurité
[Pièce 4.3 — version textuelle]
Source : Analyse par le BVG de données de 2013 du Service correctionnel du Canada
4.22 Une fois les agrandissements terminés, le parc pénitentiaire devrait pouvoir absorber l’augmentation prévue de la population carcérale, à l’exception des services en santé mentale, des unités d’évaluation initiale et des établissements pour femmes à sécurité maximale. Voici ce que nous avons constaté :
- Établissements à sécurité minimale — Nous avons constaté que les établissements pour hommes à sécurité minimale étaient exploités, en moyenne, à 101 % de leur capacité pondérée. Le SCC s’attend à ce que, à la fin des travaux de construction en mars 2015, ces établissements soient exploités à 90 % de leur capacité pondérée, en moyenne.
- Établissements à sécurité moyenne — Nous avons constaté que les établissements pour hommes à sécurité moyenne étaient exploités, en moyenne, à 102 % de leur capacité pondérée, soit au-dessus de la limite recommandée, qui est de 95 %. Le SCC s’attend à ce que, à la fin des travaux de construction, ces établissements soient exploités à 91 % de leur capacité pondérée, en moyenne.
- Établissements à sécurité maximale — Nous avons constaté que les établissements pour hommes à sécurité maximale étaient exploités à 90 % de leur capacité pondérée, soit le taux maximal recommandé. Le SCC s’attend à ce que, à la fin des travaux de construction, ces établissements soient exploités à 88 % de leur capacité pondérée, en moyenne.
- Établissements pour femmes — Dans les établissements pour femmes, nous avons constaté que les pénitenciers à sécurité maximale avaient les besoins les plus pressants, car ils étaient exploités, en moyenne, à 108 % de leur capacité pondérée. Le SCC prévoit que, à la fin des travaux de construction, les pressions subsisteront dans les établissements à sécurité maximale, alors que les autres établissements pour femmes seront exploités à 83 % de leur capacité pondérée, en moyenne.
- Unités d’évaluation initiale — Ces unités servent à évaluer les délinquants de sexe masculin lors de leur admission, dans le but de déterminer les interventions correctionnelles dont ils ont besoin et le niveau de sécurité requis. Nous avons constaté que ces unités étaient exploitées à 134 % de leur capacité pondérée, ce qui veut dire que de nombreux détenus étaient à deux dans une cellule pendant leur évaluation. Le SCC prévoit que, d’ici mars 2015, ces unités seront exploitées à 155 % de leur capacité pondérée, en moyenne, car aucun projet d’agrandissement visant ces unités n’a été entrepris.
Les travaux d’agrandissement ne comportent pas l’ajout de cellules d’isolement ni d’aires réservées aux services de santé
4.23 En plus des cellules individuelles, plusieurs types d’espace sont nécessaires pour appuyer le fonctionnement normal des pénitenciers et la réadaptation efficace des détenus. Ces espaces comprennent les cellules d’isolement, les aires réservées aux services de santé, ainsi que les espaces réservés aux programmes correctionnels. Nous avons examiné les exigences du SCC concernant ces espaces et avons cherché à savoir si l’organisme en avait tenu compte dans ses travaux d’agrandissement.
4.24 Cellules d’isolement — Les cellules d’isolement sont utilisées pour séparer certains détenus du reste de la population carcérale, pour des raisons de sécurité. Selon les lignes directrices du SCC sur le logement, le nombre de cellules d’isolement doit représenter entre 2,5 % et 5 % de la capacité pondérée d’un établissement. Nous avons examiné si le SCC avait suivi ses lignes directrices. Nous avons constaté qu’il n’avait pas prévu l’ajout de cellules d’isolement dans le cadre de l’agrandissement de ses établissements. Par conséquent, à la fin des travaux de construction, trois établissements ne satisferont pas aux lignes directrices de l’organisme pour ce qui est d’avoir, au minimum, 2,5 % de ses cellules destinées à l’isolement.
4.25 Espaces réservés aux services de santé — Les pénitenciers doivent fournir aux détenus les services de santé essentiels, notamment en prévoyant des chambres de patients, des postes de soins infirmiers et des aires d’entreposage pour les médicaments. Nous avons examiné si le SCC avait prévu des espaces pour les services de santé dans ses travaux d’agrandissement, conformément à ses lignes directrices. Nous avons constaté que l’organisme n’avait pas de lignes directrices à jour permettant de déterminer la superficie requise pour les services de santé en fonction de la taille de l’établissement et du nombre de détenus. Pendant la construction, les représentants du SCC ont remarqué que des améliorations devraient être apportées aux espaces réservés aux services de santé dans 21 des 37 établissements faisant l’objet d’un agrandissement. Toutefois, nous avons constaté qu’aucun espace réservé aux services de santé n’avait été ajouté dans le cadre des travaux d’agrandissement.
4.26 Espaces réservés aux programmes correctionnels — Des aires communes et des pièces au sein des pénitenciers servent à offrir divers programmes correctionnels, notamment des programmes sur la prévention de la violence et de la toxicomanie, ainsi que des programmes à l’intention des délinquants sexuels. Nous avons examiné si les espaces réservés à ces programmes satisfaisaient aux exigences du SCC, compte tenu de l’augmentation de la capacité des établissements. Nous avons constaté que l’organisme n’avait pas de lignes directrices sur l’espace requis pour offrir des programmes correctionnels, mais nous avons remarqué que 33 des 37 projets d’agrandissement prévoyaient l’ajout de salles réservées à ces programmes. Nous avons aussi constaté que le SCC avait continué d’offrir des programmes correctionnels pendant la construction des aires supplémentaires et ce, malgré l’accroissement de la population carcérale.
4.27 Recommandation — Le Service correctionnel du Canada devrait mettre à jour ses lignes directrices en matière de logement afin de définir les exigences relatives aux espaces spécialisés qui appuient le fonctionnement des pénitenciers, en fonction de la capacité pondérée de ceux-ci.
Réponse du SCC — Recommandation acceptée. Le Service correctionnel du Canada est d’accord avec la recommandation et s’engage à peaufiner ses lignes directrices en matière d’aménagement des locaux d’ici le 31 mars 2015.
Le SCC a récemment mis à jour les critères techniques s’appliquant aux établissements correctionnels pour hommes. Les critères définissent l’unité opérationnelle, son rendement et les lignes directrices en matière d’aménagement, et tiennent compte des besoins particuliers de chaque pénitencier. Le SCC est également en train de terminer la construction de bâtiments d’utilisation générale dans le cadre de ses travaux d’agrandissement, y compris des espaces spécialisés qui répondent aux besoins opérationnels spéciaux.
Le SCC est aussi en train d’examiner ses lignes directrices en matière d’aménagement. Dans le cadre de ce processus, le SCC analyse les exigences opérationnelles liées aux locaux spécialisés dans tous ses pénitenciers afin d’établir une approche nationale cohérente pour toutes les nouvelles constructions et de classer les investissements futurs en immobilisations par ordre de priorité.
Frais d’exploitation des établissements agrandis
4.28 Le but principal du plan d’agrandissement du Service correctionnel du Canada (SCC) était d’accroître la capacité pondérée des établissements en vue de répondre à l’augmentation prévue de la population carcérale. Cependant, la mise en œuvre de ce plan a coïncidé avec une série de changements, notamment une croissance de la population carcérale plus faible que prévu et les décisions prises par le gouvernement de fermer trois vieux pénitenciers et d’abandonner les plans de construction de cinq nouveaux établissements. Le plan d’agrandissement initial et les changements subséquents n’étaient pas sans incidence sur les frais d’exploitation à court terme et continus des établissements, ni sur les programmes de réadaptation des détenus.
Les établissements ont été agrandis en l’absence d’information complète sur la planification
4.29 Nous avons examiné les mesures prises par le SCC pour gérer l’infrastructure existante et pour décider des modalités d’agrandissement des pénitenciers. En 2009, lorsque le SCC a obtenu l’approbation d’agrandir ses établissements, l’ajout de cellules devait être une mesure à court terme jusqu’à la construction de nouveaux pénitenciers. L’organisme était tenu d’élaborer un plan de logement à long terme qui présenterait une solution rentable pour répondre aux besoins en matière de logement et d’infrastructure matérielle. Le SCC avait alors élaboré une stratégie provisoire de logement à long terme et établi une liste de 20 établissements à désaffecter en priorité à mesure que les nouveaux établissements étaient construits. La stratégie n’a toutefois jamais été terminée, ni approuvée. Les représentants du SCC ont expliqué que les travaux de modernisation des établissements avaient été mis en suspens afin de concentrer les efforts sur les travaux d’agrandissement. Nous avons constaté que 8 des 20 établissements qui devaient à l’origine être désaffectés avaient plutôt été agrandis.
4.30 L’infrastructure de soutien de chaque établissement (par exemple l’eau, les égouts et les services publics) a été conçue pour satisfaire aux besoins de la capacité pondérée de l’établissement plus 25 %, sans créer de pressions importantes. Les normes techniques du SCC stipulent que tout agrandissement doit faire l’objet d’un examen pour veiller à ce que l’infrastructure existante reste adéquate. Nous avons constaté que les agrandissements apportés à ce jour ont augmenté de plus de 25 % la capacité pondérée de 26 des 37 établissements et que dans 12 de ces établissements, la capacité a augmenté de plus de 40 %. Nous avons remarqué que le SCC n’avait pas évalué l’incidence de ses projets d’agrandissement sur l’infrastructure existante avant de déterminer les établissements à agrandir. Le SCC nous a informés qu’il avait agi ainsi car il devait accroître rapidement la capacité de ses établissements. Il nous a également indiqué que l’infrastructure était évaluée et modernisée dans le cadre même des contrats d’agrandissement.
4.31 Il peut s’avérer difficile pour le SCC de maintenir son parc pénitentiaire en bon état, car il doit effectuer les réparations et les remplacements dans un milieu où la sécurité doit être assurée 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, tout en veillant à la continuité des services alimentaires, des soins de santé et des programmes correctionnels. L’ameublement, les accessoires et le matériel adaptés aux pénitenciers sont coûteux : ils sont souvent fabriqués sur mesure, ils doivent répondre à des normes rigoureuses en ce qui a trait au caractère inviolable et à la protection contre le feu, et ils doivent pouvoir résister à une usure excessive. Les enquêtes sur l’état des établissements aident le SCC à évaluer son infrastructure et à établir l’ordre de priorité des travaux d’entretien.
4.32 Nous avons examiné la façon dont le SCC avait évalué l’état de son infrastructure avant de déterminer les installations qu’il agrandirait. Cette évaluation devait aussi l’aider à estimer les coûts des travaux. Nous avons constaté que, lors de la planification des travaux d’agrandissement en 2009, l’organisme n’avait pas de rapports d’enquête récents sur l’état matériel et opérationnel des pénitenciers. Il ne disposait pas non plus de normes pour faciliter l’évaluation objective de l’état d’un établissement. En 2010, les gestionnaires des installations du SCC ont présenté une évaluation préliminaire de l’état de leur établissement. Selon ces évaluations, 14 % de l’infrastructure du SCC était en mauvais état ou dans un état critique, et donc susceptible de subir des défaillances aléatoires et de nécessiter des travaux d’entretien et de réparation imprévus. En outre, l’infrastructure dans environ le quart des pénitenciers ayant fait l’objet de travaux d’agrandissement a été considérée comme étant dans un piètre état matériel et opérationnel. Le SCC a déterminé que ces établissements doivent à présent faire l’objet d’une modernisation.
4.33 Le SCC a reconnu qu’il était nécessaire d’effectuer une évaluation objective de l’état de chaque établissement afin d’établir l’ordre de priorité pour l’entretien des immobilisations. Compte tenu de l’annulation en 2012 de la construction de nouveaux établissements, il devient particulièrement important d’établir l’ordre de priorité des dépenses en immobilisations et des travaux d’entretien pour les établissements existants, puisqu’il faudra continuer d’exploiter des établissements qui auraient autrement été désaffectés. Étant donné que ces établissements ne sont plus des solutions de logement à court terme, ils devront faire l’objet d’une évaluation pour déterminer le coût de modernisation de l’infrastructure à long terme.
4.34 En 2012, le SCC a élaboré un plan de logement quinquennal axé sur l’achèvement de l’agrandissement des établissements existants, sans la construction de nouveaux établissements. Le Conseil du Trésor avait alors approuvé un financement annuel de 70 millions de dollars pour l’entretien des établissements du SCC, étant entendu que celui-ci présenterait une stratégie de logement à long terme précisant ses besoins pour les années à venir. Le SCC s’était engagé à élaborer cette stratégie au plus tard en mars 2015 en vue de moderniser ses infrastructures vieillissantes de façon rentable.
Les économies découlant de la fermeture de pénitenciers sont moins élevées que prévu
4.35 Nous avons examiné les étapes que le SCC a prises pour renouveler son infrastructure et réaliser des gains d’efficience. Dans le cadre de l’exercice de réduction du déficit de l’État de 2011, le SCC a établi qu’il réaliserait des économies annuelles de 295 millions de dollars d’ici l’exercice 2014-2015, grâce en partie à la fermeture de trois de ses établissements les plus anciens. L’organisme s’attendait alors à ce que les travaux de construction prévus lui donnent suffisamment de cellules excédentaires pour remplacer les cellules des anciens établissements fermés et réaliser des gains d’efficience. En avril 2012, le gouvernement a annoncé la fermeture du Pénitencier de Kingston, du Centre régional de traitement en Ontario et de l’Établissement Leclerc à Québec, en affirmant que ces fermetures permettraient d’économiser environ 120 millions de dollars par année. Le SCC a fermé ces trois établissements en octobre 2013, et les détenus et le personnel de ces établissements ont tous été transférés.
4.36 Selon les données du SCC, les frais d’exploitation annuels de ces trois établissements se sont élevés à 119 millions de dollars au cours de l’exercice 2010-2011. De ce montant, 33 millions de dollars ont été retenus par le SCC pour reloger les délinquants qui devaient être transférés dans d’autres établissements à la suite des fermetures. Comme il faudra continuer d’engager des dépenses pour loger ces détenus, le SCC a estimé que les économies directes découlant de la fermeture de ces établissements ne dépasseront pas 86 millions de dollars par année. L’organisme avait cerné d’autres économies potentielles pouvant être réalisées grâce à la construction de nouveaux pénitenciers plus efficaces, soit des montants correspondant au reste des économies prévues de 120 millions de dollars. Ces montants ont été supprimés du budget du SCC dans le cadre de l’exercice de réduction du déficit.
4.37 Recommandation — Le Service correctionnel du Canada devrait définir ses besoins en matière de logement des détenus afin d’orienter ses décisions futures à l’égard des investissements, des remplacements et des fermetures touchant ses pénitenciers, en fonction d’évaluations actualisées de l’état de ses installations et des estimations de la population carcérale.
Réponse du SCC — Recommandation acceptée. Le Service correctionnel du Canada est d’accord avec la recommandation et s’est engagé, dans son Plan de logement 2013-2018, à revenir devant le Cabinet au cours de l’exercice 2014-2015 afin d’obtenir l’approbation de son Plan de logement après 2017-2018.
Dans le cadre de ce processus, le SCC examinera ses prévisions démographiques, les besoins spéciaux des détenus en matière de logement ainsi que les logements qui seront nécessaires dans la collectivité. Le SCC évaluera également ses pénitenciers afin de déterminer l’ordre de priorité de ses futurs investissements en immobilisations pour moderniser et maintenir son infrastructure.
Les pressions en matière de capacité limitent la réadaptation des délinquants
4.38 Le nombre de cellules dans les pénitenciers à sécurité maximale, moyenne et minimale ainsi que la disponibilité de places dans les établissements communautaires ont une incidence sur la rapidité avec laquelle les délinquants peuvent passer en toute sécurité d’un niveau de sécurité élevé à un niveau de sécurité inférieur, à mesure qu’ils démontrent des progrès dans le cadre de leur réadaptation. Or, cela contribue de façon importante à la réinsertion sécuritaire d’un délinquant au sein de la collectivité et augmente la probabilité qu’il bénéficie d’une mise en liberté sous condition plus tôt au cours de sa peine. En outre, il est moins probable qu’un délinquant qui purge sa peine à un niveau de sécurité élevé se voit accorder directement une mise en liberté sous condition. Par ailleurs, le passage d’un niveau à un autre a également une incidence sur les frais d’exploitation, puisque la garde des délinquants à des niveaux de sécurité élevés coûte plus cher (voir la pièce 4.4).
Pièce 4.4 — Les frais de détention varient selon le niveau de sécurité de l’établissement
Niveau de sécurité | Coût annuel moyen par délinquant, 2012 |
---|---|
Établissements pour femmes — divers niveaux de sécurité | 211 618 $ |
Hommes — Sécurité maximale | 151 484 $ |
Hommes — Sécurité moyenne | 104 889 $ |
Hommes — Sécurité minimale | 91 959 $ |
Coût moyen global par détenu* | 117 788 $ |
Établissements communautaires | 66 203 $ |
* Les coûts sont pondérés en fonction du nombre de détenus de chaque niveau de sécurité. Source : Service correctionnel Canada |
4.39 Bien que le SCC ne puisse pas contrôler le nombre de délinquants qui sont admis dans ses établissements, il peut exercer une certaine influence sur la durée de leur détention et sur le niveau de sécurité requis, en leur offrant des programmes correctionnels et d’autres interventions pour les préparer en vue d’une libération discrétionnaire anticipée. Aux termes de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, les délinquants deviennent admissibles à une libération conditionnelle totale lorsqu’ils ont purgé le tiers de leur peine, et ils sont admis à bénéficier d’une semi-liberté six mois avant cette date (voir la pièce 4.5).
Pièce 4.5 — Les délinquants peuvent être admissibles à différents types de libérations pendant toute la durée de leur peine
[Pièce 4.5 — version textuelle]
Semi-liberté : La semi-liberté est accordée ou refusée par la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Elle permet aux délinquants d’habiter à l’extérieur du pénitencier, dans des établissements communautaires qui sont sous la surveillance du SCC.
Libération conditionnelle totale : La libération conditionnelle totale est accordée ou refusée par la Commission des libérations conditionnelles du Canada. Elle permet aux délinquants de vivre dans un endroit de leur choix au sein de la collectivité. Ils doivent cependant se présenter régulièrement à un agent de libération conditionnelle ou à la police.
Libération d’office : La libération d’office est une libération prescrite par la loi qui permet aux délinquants, à l’exception des délinquants condamnés à une peine d’emprisonnement à perpétuité, de purger le dernier tiers de leur peine au sein de la collectivité, dans un endroit de leur choix, à moins qu’ils ne doivent habiter dans un établissement communautaire sous la surveillance du SCC.
Mise en liberté à l’expiration de la peine : La mise en liberté à l’expiration de la peine est la libération qui doit être accordée aux délinquants qui ont purgé l’intégralité de leur peine. Elle s’applique aux délinquants qui ont été considérés comme étant trop dangereux pour retourner dans la collectivité dans le cadre d’une libération d’office.
Source : Service correctionnel du Canada
4.40 Nous avons vérifié si le SCC avait offert des programmes correctionnels aux délinquants pour les aider à obtenir une libération et faciliter leur déplacement vers des niveaux de sécurité moins élevés. Nous avons constaté que le financement accordé aux programmes correctionnels avait suivi l’augmentation de la population carcérale et qu’en moyenne, les délinquants participaient à leur premier programme correctionnel près de deux mois plus tôt qu’il y a trois ans. Toutefois, nous avons constaté que malgré l’augmentation du financement de ces programmes, les libérations discrétionnaires accordées par la Commission des libérations conditionnelles du Canada avaient diminué de 14 % depuis 2009 et que les délinquants purgeaient en prison une plus grande partie de leur peine. Par conséquent, même si le nombre et la durée des peines d’emprisonnement n’ont pas beaucoup augmenté, la population carcérale générale au sein des pénitenciers s’est accrue d’environ 9 % depuis mars 2010.
4.41 En décembre 2012, le SCC a effectué un examen dans le but de déterminer pourquoi la Commission des libérations conditionnelles du Canada avait refusé certaines demandes de libération sous condition qu’il avait recommandées. L’examen a relevé qu’il y avait des lacunes dans la documentation soumise par le SCC pour démontrer la mesure dans laquelle la participation d’un délinquant à des programmes correctionnels et sa bonne conduite avaient réduit le risque qu’il posait pour la sécurité publique. Ces lacunes ont eu une incidence négative sur les décisions de la Commission. Selon l’examen, le problème se posait tout particulièrement dans le cas des délinquants à faible risque. Ces délinquants ont cessé de bénéficier des programmes du SCC depuis que celui-ci a modifié ses lignes directrices à cet égard en 2009 pour mettre l’accent sur les interventions correctionnelles auprès des délinquants à risque élevé. Ce changement a été apporté à la suite de recherches effectuées par le SCC qui ont révélé que les programmes étaient efficaces pour traiter les comportements criminels des délinquants à risque élevé, mais qu’ils pouvaient accroître les chances de récidive chez les délinquants à faible risque. Or, ces derniers représentent environ le tiers de la population carcérale. Nous avons constaté que le SCC n’avait pas évalué les répercussions de ce changement apporté aux lignes directrices sur la durée de la peine purgée par les délinquants, qu’ils soient à faible risque ou à risque élevé.
4.42 Environ 20 % des délinquants sont incarcérés dans des établissements à sécurité minimale. La grande majorité des détenus se trouvent donc dans des établissements à un niveau de sécurité supérieur. Nous avons examiné si la capacité était suffisante pour faciliter le passage de délinquants admissibles vers des établissements à niveau de sécurité moins coûteux. Les pressions en matière de capacité au sein des établissements à sécurité minimale peuvent limiter les possibilités de transfèrement de délinquants d’un niveau de sécurité élevé vers un niveau de sécurité inférieur. Nous avons constaté que le SCC n’avait pas évalué la mesure dans laquelle la capacité au sein des établissements à sécurité minimale suffisait pour permettre aux délinquants de faire la transition vers ces établissements lorsqu’ils étaient prêts. Nous avons remarqué que l’organisme reconnaissait la nécessité de faciliter les transfèrements des femmes détenues en augmentant la capacité de logement dans les établissements à sécurité minimale à leur intention.
4.43 Nous avons également demandé à des représentants du SCC si les délinquants étaient placés dans des établissements communautaires une fois qu’ils avaient obtenu une semi-liberté. Ces représentants ont expliqué que le nombre de places disponibles pour les délinquants qui se voient accorder une semi-liberté avait diminué. De plus, les quelques places restantes sont données à un nombre accru de délinquants en libération d’office ou soumis à une ordonnance de surveillance de longue durée qui doivent demeurer, selon les exigences de la Commission des libérations conditionnelles du Canada, au sein d’établissements communautaires comme condition de leur libération. Par conséquent, certains délinquants qui ont obtenu une semi-liberté ont dû rester dans des pénitenciers, en attendant qu’une place se libère dans un établissement communautaire. Le SCC n’a pas été en mesure de nous fournir de données sur le temps d’attente actuel des délinquants qui se voient accorder une semi-liberté.
4.44 Recommandation — Le Service correctionnel du Canada devrait déterminer pourquoi les délinquants demeurent plus longtemps dans ses établissements, en vue de prendre les mesures qui s’imposent pour gérer les besoins en matière de logement et saisir les occasions permettant de réduire les coûts.
Réponse du SCC — Recommandation acceptée. Le Service correctionnel du Canada est d’accord avec la recommandation du BVG d’examiner les raisons pour lesquelles les délinquants demeurent incarcérés plus longtemps en vue de prendre les mesures appropriées pour gérer les besoins en matière de logement et tirer parti d’options plus économiques.
Le SCC entreprendra son étude d’ici le 31 mars 2015. À la lumière des résultats de l’examen, le SCC prendra les mesures appropriées pour les éléments qui sont en son pouvoir afin de gérer le logement de manière économique et d’offrir aux délinquants des interventions correctionnelles qui contribuent à leur réinsertion sociale dans la collectivité. Pour le SCC, la sécurité publique est le critère déterminant du processus correctionnel et, à ce titre, elle l’emportera toujours sur d’autres facteurs déterminants.
Conclusion
4.45 Nous avons conclu que le Service correctionnel du Canada (SCC) avait augmenté la capacité de ses établissements correctionnels de manière à répondre à ses besoins à court terme. Dans le cadre de ses efforts visant à accroître la capacité pénitentiaire pour composer avec l’augmentation rapide et importante de la population carcérale qu’il avait anticipée, le SCC a prévu ajouter plus de 2 700 cellules dans 37 établissements. Selon le SCC, lorsque les travaux seront terminés en 2015, ces cellules devraient permettre de réduire une bonne partie de la surpopulation carcérale que nous avons constatée lors de notre audit. Le SCC a mené ses projets d’agrandissement dans un environnement en pleine mutation. Il a en outre réussi à fermer des établissements dans les meilleurs délais, conformément aux instructions du gouvernement.
4.46 Par ailleurs, nous avons conclu que le SCC n’avait pas planifié l’agrandissement de ses pénitenciers en tenant compte de ses besoins à long terme en matière de logement. L’organisme a élaboré un plan de logement quinquennal axé sur l’achèvement des travaux d’agrandissement des établissements existants. Par contre, il n’a pas élaboré de plan de logement à long terme visant à améliorer de façon rentable l’infrastructure vieillissante. Il s’est engagé à le faire d’ici mars 2015. Il n’a pas non plus pris en compte l’état de plusieurs de ses établissements avant de déterminer lesquels seraient agrandis. Il ne s’est pas doté de lignes directrices actualisées sur les exigences relatives aux espaces spécialisés, notamment les aires réservées aux services de santé et aux programmes correctionnels. En outre, le SCC n’a pas évalué l’importance des fonds supplémentaires qui seraient nécessaires pour moderniser l’infrastructure vieillissante de ses pénitenciers, y compris de ceux qu’il a agrandis.
4.47 Le SCC n’a pas évalué ses besoins à long terme en matière de logement des détenus, et n’a pas déterminé les pénitenciers qu’il serait le plus rentable d’agrandir. Étant donné que ses projets d’agrandissement n’ont pas tenu compte des pressions sur la population carcérale dans ses deux plus grandes régions, l’organisme a reconnu qu’il devra, dans un proche avenir, continuer de placer deux détenus dans une même cellule et de transférer des détenus dans des pénitenciers dans d’autres régions où il reste des places. En outre, le SCC n’a pas déterminé pourquoi les délinquants purgeaient en prison une plus grande partie de leur peine, ni évalué les répercussions de cette situation sur les besoins en matière de logement.
À propos de l’audit
Le Bureau du vérificateur général du Canada avait comme responsabilité d’effectuer un examen indépendant des établissements correctionnels du Service correctionnel du Canada afin de donner de l’information, une assurance et des avis objectifs au Parlement en vue de l’aider à examiner soigneusement la gestion que fait le gouvernement des ressources et des programmes.
Tous les travaux d’audit dont traite le présent chapitre ont été menés conformément aux normes relatives aux missions de certification de Comptables professionnels agréés (CPA) Canada qui sont présentées dans le Manuel de CPA Canada – Certification. Même si le Bureau a adopté ces normes comme exigences minimales pour ses audits, il s’appuie également sur les normes et pratiques d’autres disciplines.
Dans le cadre de notre processus normal d’audit, nous avons obtenu de la direction la confirmation que les constatations présentées dans le chapitre sont fondées sur des faits.
Objectif
L’audit avait pour objectif de déterminer si le Service correctionnel du Canada avait augmenté la capacité de ses établissements correctionnels de manière à répondre à ses besoins de façon rentable.
Étendue et méthode
Nous avons examiné l’analyse des besoins étayant le plan d’agrandissement (nombre de cellules) des établissements du Service correctionnel du Canada, que nous avons comparée ensuite aux travaux de construction prévus. Ce faisant, nous avons examiné les taux de capacité de chaque établissement et les frais d’exploitation correspondants. Nous avons aussi évalué la qualité des données du SCC, et avons constaté que celles-ci étaient suffisamment fiables pour notre analyse. Nous avons également examiné si le Service correctionnel du Canada avait mené les interventions requises auprès de la population carcérale, en mettant l’accent sur les programmes correctionnels offerts dans les établissements. Nous n’avons pas examiné le processus d’approvisionnement pour la construction des nouvelles installations.
Critères
Critères | Sources |
---|---|
Pour déterminer si le Service correctionnel du Canada avait augmenté la capacité de ses établissements correctionnels de manière à répondre à ses besoins de façon rentable, nous avons utilisé les critères suivants : | |
Le Service correctionnel du Canada a clairement défini ses besoins actuels et futurs en matière de logement, en fonction de la population carcérale prévue. |
|
Le Service correctionnel du Canada a planifié l’agrandissement de ses pénitenciers de manière à répondre à ses besoins en matière de logement, et a apporté les ajustements nécessaires. |
|
Les mesures prises par le Service correctionnel du Canada pour gérer son infrastructure actuelle lui permettent de se conformer aux recommandations visant à améliorer l’efficience. |
|
Le Service correctionnel du Canada dispose d’une capacité suffisante pour assurer la garde des détenus de manière appropriée et rentable. |
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Le Service correctionnel du Canada dispose d’une capacité suffisante lui permettant d’offrir aux délinquants les interventions correctionnelles qui s’imposent et qui favorisent la réussite de leur réinsertion sociale. |
|
La direction a examiné les critères de l’audit et elle en a reconnu la validité.
Période visée par l’audit
L’audit a porté sur la période allant d’avril 2010 à septembre 2013. Les travaux d’audit dont il est question dans le présent chapitre ont été terminés le 29 novembre 2013.
Équipe d’audit
Vérificatrice générale adjointe : Wendy Loschiuk
Directeur principal : Frank Barrett
Directrice : Carol McCalla
Daniele Bozzelli
Steven Mariani
Anthony Stock
Pour obtenir de l’information, veuillez téléphoner à la Direction des communications : 613-995-3708 ou 1-888-761-5953 (sans frais).
Annexe — Tableau des recommandations
Les recommandations formulées au chapitre 4 sont présentées ici sous forme de tableau. Le numéro du paragraphe où se trouve la recommandation apparaît en début de ligne. Les chiffres entre parenthèses correspondent au numéro des paragraphes où le sujet de la recommandation est abordé.
Recommandation | Réponse |
---|---|
Accroître la capacité des établissements | |
4.27 Le Service correctionnel du Canada devrait mettre à jour ses lignes directrices en matière de logement afin de définir les exigences relatives aux espaces spécialisés qui appuient le fonctionnement des pénitenciers, en fonction de la capacité pondérée de ceux-ci. (4.19-4.26) |
Réponse du SCC — Recommandation acceptée. Le Service correctionnel du Canada est d’accord avec la recommandation et s’engage à peaufiner ses lignes directrices en matière d’aménagement des locaux d’ici le 31 mars 2015. Le SCC a récemment mis à jour les critères techniques s’appliquant aux établissements correctionnels pour hommes. Les critères définissent l’unité opérationnelle, son rendement et les lignes directrices en matière d’aménagement, et tiennent compte des besoins particuliers de chaque pénitencier. Le SCC est également en train de terminer la construction de bâtiments d’utilisation générale dans le cadre de ses travaux d’agrandissement, y compris des espaces spécialisés qui répondent aux besoins opérationnels spéciaux. Le SCC est aussi en train d’examiner ses lignes directrices en matière d’aménagement. Dans le cadre de ce processus, le SCC analyse les exigences opérationnelles liées aux locaux spécialisés dans tous ses pénitenciers afin d’établir une approche nationale cohérente pour toutes les nouvelles constructions et de classer les investissements futurs en immobilisations par ordre de priorité. |
Frais d’exploitation des établissements agrandis | |
4.37 Le Service correctionnel du Canada devrait définir ses besoins en matière de logement des détenus afin d’orienter ses décisions futures à l’égard des investissements, des remplacements et des fermetures touchant ses pénitenciers, en fonction d’évaluations actualisées de l’état de ses installations et des estimations de la population carcérale. (4.29-4.36) |
Réponse du SCC — Recommandation acceptée. Le Service correctionnel du Canada est d’accord avec la recommandation et s’est engagé, dans son Plan de logement 2013-2018, à revenir devant le Cabinet au cours de l’exercice 2014-2015 afin d’obtenir l’approbation de son Plan de logement après 2017-2018. Dans le cadre de ce processus, le SCC examinera ses prévisions démographiques, les besoins spéciaux des détenus en matière de logement ainsi que les logements qui seront nécessaires dans la collectivité. Le SCC évaluera également ses pénitenciers afin de déterminer l’ordre de priorité de ses futurs investissements en immobilisations pour moderniser et maintenir son infrastructure. |
4.44 Le Service correctionnel du Canada devrait déterminer pourquoi les délinquants demeurent plus longtemps dans ses établissements, en vue de prendre les mesures qui s’imposent pour gérer les besoins en matière de logement et saisir les occasions permettant de réduire les coûts. (4.38-4.43) |
Réponse du SCC — Recommandation acceptée. Le Service correctionnel du Canada est d’accord avec la recommandation du BVG d’examiner les raisons pour lesquelles les délinquants demeurent incarcérés plus longtemps en vue de prendre les mesures appropriées pour gérer les besoins en matière de logement et tirer parti d’options plus économiques. Le SCC entreprendra son étude d’ici le 31 mars 2015. À la lumière des résultats de l’examen, le SCC prendra les mesures appropriées pour les éléments qui sont en son pouvoir afin de gérer le logement de manière économique et d’offrir aux délinquants des interventions correctionnelles qui contribuent à leur réinsertion sociale dans la collectivité. Pour le SCC, la sécurité publique est le critère déterminant du processus correctionnel et, à ce titre, elle l’emportera toujours sur d’autres facteurs déterminants. |
Définition :
Capacité pondérée — Nombre de cellules ordinaires qui peuvent être utilisées pour loger les détenus au sein d’un pénitencier. La capacité pondérée ne comprend pas les cellules spécialisées telles que celles consacrées à l’isolement, aux soins médicaux ou à l’observation. Elle ne tient pas compte non plus des lits superposés placés dans des cellules ordinaires, puisqu’ils sont considérés comme temporaires. (Retourner)
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