2021 — Rapports de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du CanadaRapport 10 — L’obtention d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux
Rapport de l’auditeur indépendant
Table des matières
- Introduction
- Constatations, recommandations et réponses
- Évaluation des besoins et gestion de la Réserve fédérale
- L’Agence de la santé publique du Canada n’a pas réglé les problèmes de longue date liés à la Réserve fédérale
- L’Agence de la santé publique du Canada a supervisé les aspects de l’entreposage et du soutien logistique qu’elle externalisait
- L’Agence de la santé publique du Canada a amélioré sa gestion de l’évaluation et de l’attribution de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux pour aider à répondre aux besoins des provinces et des territoires
- Approvisionnement en équipement et assurance de la qualité
- Santé Canada a modifié son processus de traitement des demandes de licence des fournisseurs pour répondre plus rapidement à l’augmentation de la demande
- Services publics et Approvisionnement Canada a comblé le besoin urgent en matière d’équipement
- L’Agence de la santé publique du Canada a modifié son processus d’assurance qualité pour faire face au volume élevé d’équipement acheté
- Évaluation des besoins et gestion de la Réserve fédérale
- Conclusion
- À propos de l’audit
- Tableau des recommandations
- Pièces :
- 10.1 — Chronologie des principaux événements relatifs à l’équipement de protection individuelle et aux instruments médicaux, de janvier 2020 à avril 2020
- 10.2 — Des processus fédéraux ont été utilisés pour aider à répondre aux besoins en équipement des provinces et des territoires afin de lutter contre la pandémie de COVID‑19
- 10.3 — L’amélioration des processus fédéraux pour évaluer les besoins et attribuer l’équipement aux provinces et aux territoires
- 10.4 — Exemples d’instruments médicaux et leurs classes
- 10.5 — Les contrats pour l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux que nous avons examinés
- 10.6 — Processus simplifié d’approvisionnement pendant la pandémie de COVID‑19
- 10.7 — Nombre moyen de jours civils nécessaires pour acheter de l’équipement et le livrer à l’Agence de la santé publique du Canada, pour les 39 contrats que nous avons examinés
Introduction
Information générale
10.1 Lorsque la pandémie de maladie à coronavirus (COVID‑19)Définition 1 a commencé, au début de 2020, la demande en équipement de protection individuelleDéfinition 2 et en instruments médicauxDéfinition 3 était extrêmement élevée. Ce matériel contribue à limiter la propagation du virus, à protéger le personnel de première ligne et à maintenir en vie les personnes gravement touchées par la COVID‑19. L’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux demeurent essentiels pour permettre au système de soins de santé de faire face à la pandémie.
10.2 Aux premiers stades de la propagation du virus, il y avait une concurrence internationale sans précédent pour s’approvisionner en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux, qui étaient seulement disponibles en quantité limitée à l’échelle mondiale. (Ces deux types de fournitures seront désignés comme de l’« équipement » dans le présent rapport, lorsque cela convient.) Pour répondre à cette situation, le gouvernement fédéral a mis en œuvre un certain nombre de mesures visant à assurer l’approvisionnement national en équipement. La chronologie de ces mesures ainsi que des principaux événements internationaux est présentée à la pièce 10.1. Le gouvernement fédéral a déclaré qu’au 31 décembre 2020, il avait dépensé plus de 7 milliards de dollars en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux.
Pièce 10.1 — Chronologie des principaux événements relatifs à l’équipement de protection individuelle et aux instruments médicaux, de janvier 2020 à avril 2020
Janvier 30 |
L’Organisation mondiale de la Santé déclare que le nouveau coronavirus est une urgence de santé publique de portée internationale. |
---|---|
Mars 3 |
L’Organisation mondiale de la Santé annonce une pénurie mondiale d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux. |
Mars 9 |
Le gouvernement fédéral annonce son intention de procéder à l’achat en masse de fournitures de soins de santé, y compris de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux. |
Mars 11 |
L’Organisation mondiale de la Santé déclare que l’épidémie mondiale de COVID‑19 constitue une pandémie. |
Mars 12 |
Services publics et Approvisionnement Canada lance un appel aux fournisseurs d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux. |
Mars 13 |
Une nouvelle équipe chargée de l’approvisionnement lié à la COVID‑19 est créée au sein de Services publics et Approvisionnement Canada. |
Mars 14 |
Une exception relative à la sécurité nationale est invoquée afin de donner à Services publics et Approvisionnement Canada l’autorisation de se servir de son pouvoir de passation de marchés en cas d’urgence pour procéder à l’achat de biens et de services nécessaires à la lutte contre la COVID‑19 par la voie de processus non concurrentiels jusqu’à la fin de la pandémie. |
Mars 27 |
Le premier contrat important est conclu avec une tierce partie prestataire de services afin d’assurer l’entreposage et le soutien logistique requis pour gérer le volume accru d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux achetés. |
Avril 2 |
Les ministères de la Santé du gouvernement fédéral ainsi que des gouvernements provinciaux et territoriaux unissent leurs efforts pour lancer la stratégie d’intervention provisoire à l’égard de la COVID‑19 — affectation des ressources limitées (voir le paragraphe 10.44 pour de plus amples renseignements sur la stratégie). |
Source : Organisation mondiale de la Santé et diverses sources du gouvernement fédéral
10.3 Les provinces et les territoires sont responsables de la prestation des services de soins de santé, ce qui comprend la gestion de leurs propres réserves d’équipement. Diverses organisations fédérales ont un rôle à jouer pour aider les provinces et les territoires à acquérir de l’équipement supplémentaire lors des urgences de santé publique.
10.4 Agence de la santé publique du Canada — L’Agence a pour mandat :
- de promouvoir la santé des Canadiens et des Canadiennes;
- de prévenir et de contrôler les maladies chroniques;
- de se préparer et d’intervenir en cas d’urgence en santé publique;
- de renforcer la collaboration intergouvernementale dans le domaine de la santé publique.
10.5 Dans le cadre de son rôle visant l’acquisition de l’équipement nécessaire lors des urgences de santé publique, comme la pandémie de COVID‑19, l’Agence est chargée :
- de gérer la Réserve nationale stratégique d’urgence, qui comprend de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux, pour répondre à l’augmentation soudaine de la demande pour ces articles lorsque les provinces et les territoires épuisent leurs stocks, et pour être l’unique fournisseur d’articles rares et difficiles à obtenir;
- de collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour évaluer leurs besoins en équipement;
- d’effectuer l’examen d’assurance qualité de l’équipement qu’elle obtient;
- de procéder à l’attribution et à la distribution de l’équipement destiné aux provinces et aux territoires ainsi qu’à certaines organisations de l’administration fédérale.
10.6 Santé Canada — Le Ministère aide les Canadiens et les Canadiennes à préserver et à améliorer leur santé. Dans le contexte du présent audit, le Ministère réglemente l’importation et la vente des instruments médicaux. Il est aussi chargé de la réglementation et de l’autorisation des fournisseurs d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux. En outre, le Ministère est responsable des activités de surveillance de la conformité et d’application de la loi en ce qui concerne les instruments médicaux pour vérifier si les exigences réglementaires sont respectées.
10.7 Services publics et Approvisionnement Canada — Le Ministère est l’organisation de services communs chargée d’acheter des biens et des services au nom des ministères et organismes fédéraux. Il assure la coordination de tous les achats de produits (y compris l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux) au nom du gouvernement du Canada.
10.8 L’intervention en cas d’urgence — Lors d’une urgence de santé publique comme la pandémie de COVID‑19, les trois organisations fédérales susmentionnées unissent leurs efforts pour aider à répondre aux besoins en équipement des provinces et des territoires. La pièce 10.2 montre le processus, modifié pour lutter contre la pandémie de COVID‑19, qui a été mis en œuvre.
Pièce 10.2 — Des processus fédéraux ont été utilisés pour aider à répondre aux besoins en équipement des provinces et des territoires afin de lutter contre la pandémie de COVID‑19
Source : D’après des documents examinés par le Bureau du vérificateur général du CanadaBVG et mis à sa disposition par l’Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada, et Services publics et Approvisionnement Canada
Pièce 10.2 — version textuelle
Le diagramme décrit les processus fédéraux qui ont permis d’aider à répondre aux besoins en équipement des provinces et des territoires afin de lutter contre la pandémie de COVID‑19.
Au début, les provinces et les territoires ont besoin d’équipement.
L’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) évalue alors leurs besoins.
Un des deux processus fédéraux décrits ci-après est ensuite utilisé pour répondre aux besoins.
Le premier processus prévoit que l’Agence distribue l’équipement de la Réserve fédérale pour répondre aux demandes d’assistance. Les provinces et les territoires reçoivent l’équipement.
Le deuxième processus prévoit le recours aux éléments de l’achat en masse pour faire face à la pandémie de COVID‑19. Santé Canada autorise d’abord l’équipement et les fournisseurs. Services publics et Approvisionnement Canada procède ensuite à l’acquisition de l’équipement. C’est ensuite au tour de l’Agence de la santé publique du Canada de vérifier la qualité de l’équipement, puis de recevoir, d’attribuer et de distribuer l’équipement aux provinces et aux territoires. L’Agence doit aussi réapprovisionner la Réserve fédérale.
10.9 En septembre 2015, le Canada s’est engagé à respecter le Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies. Répondre aux besoins des gouvernements provinciaux et territoriaux en ce qui concerne l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux retenus aux fins de l’audit et offrir un soutien adéquat en matière d’approvisionnement se rapportent à la cible 3.d des objectifs de développement durable : « Renforcer les moyens dont disposent tous les pays, en particulier les pays en développement, en matière d’alerte rapide, de réduction des risques et de gestion des risques sanitaires nationaux et mondiaux ».
Objet de l’audit
10.10 Le présent audit visait à déterminer si l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada avaient pris des mesures, avant et pendant la pandémie de COVID‑19, pour aider à répondre aux besoins des gouvernements provinciaux et territoriaux en ce qui concerne certains articles de protection individuelle (masques N95 et blouses médicales) et instruments médicaux (écouvillons de dépistage et ventilateurs). Ces articles ont été sélectionnés parce qu’ils étaient considérés comme étant à risque pour les raisons suivantes :
- le bassin de fournisseurs était limité;
- les articles devaient respecter des exigences techniques particulières;
- la production au Canada était limitée;
- la demande était très élevée partout dans le monde.
10.11 L’audit visait aussi à déterminer si Services publics et Approvisionnement Canada avait fourni un soutien adéquat en matière d’approvisionnement à l’Agence de la santé publique du Canada. Certaines circonstances, comme les pénuries de stocks à l’échelle mondiale, l’augmentation des prix des biens et les problèmes liés à la qualité des produits, sont indépendantes de la volonté de l’Agence et du Ministère, et peuvent retarder la réponse aux besoins en équipement des provinces et des territoires. Lors de nos travaux d’audit, nous avons pris en compte l’incidence de ces retards sur nos constatations et nous nous sommes concentrés sur les aspects des besoins en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux à l’égard desquels l’Agence et le Ministère exerçaient un contrôle.
10.12 Cet audit est important parce que l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux sont essentiels pour assurer la sécurité de la population canadienne, particulièrement celle du personnel de première ligne et des malades. Cet équipement est d’autant plus important en temps de pandémie. La gestion de l’équipement doit être efficace pour qu’il y ait de l’équipement en quantité suffisante quand une situation d’urgence de santé publique survient et pour que les infrastructures et les processus soient en place en vue de répondre à la demande accrue durant de telles situations d’urgence.
10.13 La section intitulée À propos de l’audit, à la fin du présent rapport, donne des précisions sur l’objectif, l’étendue, la méthode et les critères de l’audit.
10.14 Dans le cadre des Rapports de la vérificatrice générale du Canada au Parlement du Canada de 2021, le Bureau du vérificateur général du Canada a aussi déposé en mai 2021 le rapport d’audit 11 intitulé « Ressources en santé pour les collectivités autochtones — Services aux Autochtones Canada ». Cet audit visait à déterminer si Services aux Autochtones Canada avait fourni aux collectivités et aux organisations autochtones, en temps opportun et de manière coordonnée, suffisamment d’équipement de protection individuelle et de personnel infirmier et ambulancier pour protéger les peuples autochtones contre la COVID‑19.
Constatations, recommandations et réponses
Message général
10.15 Dans l’ensemble, l’Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada et Services publics et Approvisionnement Canada ont aidé à répondre aux besoins des gouvernements provinciaux et territoriaux en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux durant la pandémie.
10.16 En raison de problèmes de longue date non résolus concernant les systèmes et les pratiques en place pour gérer la Réserve nationale stratégique d’urgence, l’Agence de la santé publique du Canada n’était pas aussi bien préparée qu’elle aurait pu l’être pour composer avec la hausse marquée des besoins des provinces et des territoires en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux découlant de la pandémie de COVID‑19. Néanmoins, face aux pressions engendrées par la pandémie, l’Agence a pris des mesures. Nous avons constaté qu’elle avait amélioré sa façon d’évaluer les besoins et d’acheter, d’attribuer et de distribuer l’équipement. Par exemple, l’Agence a rapidement privilégié l’achat en masse pour satisfaire à la demande sans précédent d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux, et elle a eu recours à la sous-traitance pour une grande partie de l’entreposage et du soutien logistique dont elle avait besoin pour gérer le volume exceptionnel d’équipement acheté.
10.17 Exposé aussi aux pressions engendrées par la pandémie, Santé Canada a modifié son processus de traitement des demandes de licence des fournisseurs d’équipement, en vue de répondre à l’augmentation rapide de la demande. Par ailleurs, l’Agence de la santé publique du Canada a ajusté son processus d’assurance qualité pour tenir compte du grand volume d’équipement devant être évalué.
10.18 De son côté, Services publics et Approvisionnement Canada a mobilisé des ressources et a modifié ses activités d’approvisionnement afin de procéder rapidement, au nom de l’Agence de la santé publique du Canada, à l’acquisition de l’équipement requis pour répondre à la pandémie. Le Ministère a accepté certains risques afin de pouvoir se procurer de grandes quantités d’équipement dans un marché où l’offre n’était pas toujours à la hauteur de la demande. Sans cela, il y aurait eu moins d’équipement à la disposition des provinces et des territoires.
Évaluation des besoins et gestion de la Réserve fédérale
L’Agence de la santé publique du Canada n’a pas réglé les problèmes de longue date liés à la Réserve fédérale
10.19 Nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada n’avait pas réglé les problèmes de longue date liés à la gestion de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux dans la Réserve nationale stratégique d’urgence. Par exemple, mis à part ce qui a été fait pour répondre à la pandémie de COVID‑19, l’Agence ne disposait pas de processus pour déterminer la quantité de stocks de ce type d’équipement que la Réserve devait contenir pour aider les provinces et les territoires à combler leurs besoins lors d’une urgence de santé publique.
10.20 Nous avons constaté que ces problèmes non réglés liés à la Réserve fédérale avaient été portés à l’attention de l’Agence dans le cadre d’une série d’audits internes remontant au moins à 2010. À notre avis, cela remet en question l’efficacité de la gouvernance et de la surveillance exercées par l’Agence à l’égard de la Réserve fédérale avant que l’Organisation mondiale de la Santé ne déclare en mars 2020 que la COVID‑19 constituait une pandémie. Par conséquent, l’Agence de la santé publique du Canada n’était pas aussi bien préparée qu’elle aurait pu l’être pour aider à répondre aux besoins des provinces et des territoires.
10.21 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :
10.22 Cette constatation est importante parce que des situations d’urgence comme la pandémie de COVID‑19 peuvent se produire à tout moment, et ce, pratiquement sans avertissement. Dans de telles situations, il pourrait être nécessaire d’accéder rapidement aux fournitures essentielles de la Réserve fédérale, comme les stocks d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux, en fonction des avis émis par des spécialistes, pour aider à protéger la santé et la sécurité de la population canadienne.
10.23 Le gouvernement fédéral a constitué la Réserve nationale stratégique d’urgence dans les années 1950 pour protéger la population canadienne contre les menaces liées à la Guerre froide. Depuis, le rôle de cette réserve fédérale a évolué. Aujourd’hui, elle sert à stocker les fournitures nécessaires pour aider les provinces et les territoires à intervenir rapidement en situation d’urgence sanitaire, lorsqu’il y a une hausse soudaine de la demande qui surpasse leurs propres réserves. La Réserve fédérale vise aussi à être l’unique fournisseur d’articles rares et difficiles à obtenir en temps opportun, ou d’articles utilisés dans le cadre d’urgences nationales à faible probabilité, mais à forte incidence. Les stocks dans la Réserve nationale stratégique d’urgence sont répartis en trois principales catégories : les produits pharmaceutiques, les fournitures utilisées par les services sociaux et lors de pandémies, ainsi que l’équipement médical et les fournitures médicales.
10.24 Les décisions d’attribuer une partie des stocks de la Réserve nationale stratégique d’urgence à des ministères fédéraux doivent être prises au cas par cas. Les ministères fédéraux sont tenus de constituer une réserve modeste destinée à répondre à leurs propres besoins.
10.25 En 2010, l’Agence de la santé publique du Canada a réalisé un audit interne sur l’état de préparation aux situations d’urgence. L’audit a donné lieu à plusieurs constatations importantes concernant la gestion de la Réserve nationale stratégique d’urgence.
10.26 En 2013, l’Agence a réalisé un audit interne de suivi et a constaté que les problèmes liés à la Réserve fédérale signalés dans l’audit interne de 2010 n’avaient pas été entièrement réglés.
10.27 Notre recommandation relativement au secteur examiné est présentée au paragraphe 10.38.
Une gouvernance et une surveillance inadéquates
10.28 Nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada n’avait pas pleinement donné suite aux importantes constatations énoncées dans les rapports d’audit interne de 2010 et de 2013 concernant la Réserve nationale stratégique d’urgence, et ce, malgré l’engagement pris par la direction de le faire. Ces importantes constatations sont toujours aussi pertinentes, car elles mettent en évidence l’absence de certains des systèmes et des pratiques qui sont nécessaires pour gérer et exploiter adéquatement la Réserve fédérale. Compte tenu du temps qui s’est écoulé depuis que la nécessité d’élaborer et de maintenir de tels systèmes et pratiques a été portée à l’attention de l’Agence, nous nous serions attendus à ce que ces importantes recommandations aient été entièrement mises en œuvre à l’heure actuelle.
10.29 Par exemple, nous avons constaté qu’il manquait certains renseignements nécessaires pour régir, surveiller et gérer la Réserve fédérale, et que les renseignements disponibles étaient désuets ou manquaient de clarté. Cette situation a eu des effets négatifs sur l’exploitation de la Réserve fédérale, comme il est expliqué aux paragraphes 10.34 à 10.37. Par conséquent, l’Agence n’était pas aussi bien préparée qu’elle aurait pu l’être pour répondre aux besoins des gouvernements provinciaux et territoriaux.
10.30 Nous avons constaté que, à l’instar de ce qui avait été relevé lors de l’audit interne de 2010, l’Agence ne savait pas si certains de ses objectifs concernant la Réserve fédérale étaient atteints. L’Agence n’avait pas encore établi de cadre de gestion axée sur les résultats expressément conçu à l’intention de la Réserve fédérale, et assorti d’indicateurs de rendement bien définis pour mesurer la pertinence, la fiabilité et la capacité de répondre en temps opportun aux besoins de la Réserve.
10.31 En réponse à l’audit interne de 2010, l’Agence a élaboré en 2012 la politique ayant trait à la Réserve nationale stratégique d’urgence pour préciser le rôle et l’objectif de la Réserve. Nous avons constaté que, même si des « mises à jour périodiques » avaient été demandées, la politique n’avait pas été mise à jour depuis son élaboration et contenait des renseignements désuets.
10.32 Le plan d’optimisation de la Réserve nationale stratégique d’urgence, lui, décrit la gouvernance et les autorisations, la composition de l’inventaire, le déploiement et la gestion des stocks, ainsi que le processus d’acquisition d’articles. Nous avons constaté que ce plan n’avait pas non plus été mis à jour depuis son élaboration en 2013 et qu’il contenait des renseignements désuets et peu clairs.
10.33 Le protocole d’entente visant la Réserve nationale stratégique d’urgence, lequel définit les responsabilités des gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, comprenait aussi des renseignements désuets. Nous avons constaté qu’un nouveau protocole d’entente n’avait pas été finalisé, malgré le fait que l’Agence s’était engagée à le faire en réponse à une constatation découlant de l’audit interne de 2010. C’est donc dire que les responsabilités actualisées du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux et territoriaux concernant la Réserve fédérale, notamment les obligations en matière d’échange d’information, n’ont pas été officiellement définies.
Une gestion déficiente de la Réserve fédérale
10.34 Nous avons constaté que des problèmes de longue date ayant trait aux systèmes et aux pratiques en place pour gérer les stocks dans la Réserve nationale stratégique d’urgence n’avaient pas été résolus. Ces problèmes dataient d’au moins 2010.
10.35 Avant la pandémie, il n’y avait pas d’explications pour justifier les quantités d’équipement conservées dans la Réserve. Des documents internes faisaient mention de contraintes budgétaires. Selon ce qui est indiqué dans le rapport d’audit interne de suivi de 2013 de l’Agence de la santé publique du Canada, la direction s’employait à élaborer un processus d’évaluation plus exhaustif, fondé sur les besoins, pour justifier les acquisitions dans la Réserve fédérale. Aucun processus de ce genre n’était en place pour l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux, et les achats ont été effectués en fonction du budget disponible.
10.36 Nous avons constaté que les problèmes liés aux stocks périmés et à l’aliénation de ces stocks, soulevés dans le rapport d’audit interne de 2010, n’avaient pas été réglés. Certains des stocks de la Réserve fédérale étaient périmés ou désuets, et l’Agence de la santé publique du Canada ne faisait pas le suivi de l’âge ou de la date de péremption de certains articles. Il était donc impossible de surveiller d’une manière exhaustive l’information essentielle requise pour s’assurer que les stocks conservés dans la Réserve, notamment l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux, n’étaient pas périmés ou sur le point de l’être, et d’intervenir en conséquence.
10.37 L’audit interne de 2010 mené par l’Agence avait révélé des lacunes importantes dans le système de gestion électronique des stocks de la Réserve nationale stratégique d’urgence. Par exemple, certains des comptes de stocks étaient inexacts et l’information de gestion n’était ni à jour ni pertinente. À la suite de cette constatation, l’Agence a mis en place deux systèmes différents pour suivre collectivement les stocks. Toutefois, ces systèmes n’ont pas permis de corriger toutes les lacunes relevées en 2010. En janvier 2020, l’Agence a présenté une analyse de rentabilisation visant l’établissement d’un seul système qui permettrait d’adopter une approche unique et exhaustive de gestion des stocks, y compris la capacité de fournir des données en temps réel sur l’emplacement des stocks. Des fonctionnaires de l’Agence nous ont indiqué que cette analyse de rentabilisation avait été mise en suspens avant la pandémie en raison de contraintes budgétaires et, plus tard, en raison de la nécessité d’intervenir pour lutter contre la COVID‑19.
10.38 Recommandation — L’Agence de la santé publique du Canada devrait élaborer et mettre en œuvre un plan exhaustif de gestion de la Réserve nationale stratégique d’urgence assorti d’échéanciers clairs, qui répond aux recommandations formulées dans ses audits internes antérieurs ayant trait à la Réserve fédérale, et tient compte des leçons tirées de la pandémie de COVID‑19.
Réponse de l’Agence — Recommandation acceptée. L’expérience de la COVID‑19 a fourni une expérience vécue d’une pandémie mondiale, comme on n’en avait pas vu en plus de cent ans. Tenant compte des politiques, des pratiques et des ressources existantes dont on a tiré profit pour orienter la réponse actuelle, les leçons apprises de la pandémie de la COVID‑19 vont éclairer la façon dont la Réserve nationale stratégique d’urgence sera gérée à l’avenir.
L’Agence de la santé publique du Canada travaille actuellement sur un plan exhaustif avec des mesures et des cibles de rendement connexes pour la Réserve nationale stratégique d’urgence afin d’appuyer les réponses futures aux urgences en matière de santé publique. Ce plan visera des domaines clés, tels que l’optimisation de la gestion du cycle de vie du matériel, le renforcement de l’infrastructure et des systèmes, et la collaboration étroite avec les provinces et territoires et les autres partenaires clés afin de mieux définir les besoins de même que les rôles et les responsabilités.
L’Agence va continuer à identifier et à mettre en œuvre des améliorations graduelles parallèlement à ses efforts en cours visant à lutter contre la COVID‑19. L’Agence prévoit compléter le plan exhaustif de gestion de la Réserve nationale stratégique d’urgence avec des échéanciers clairs de mise en œuvre dans l’année suivant la fin de la pandémie.
L’Agence de la santé publique du Canada a supervisé les aspects de l’entreposage et du soutien logistique qu’elle externalisait
10.39 Durant la pandémie, l’Agence de la santé publique du Canada a confié en grande partie à des tierces parties prestataires de services l’entreposage et le soutien logistique additionnels pour l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux. Ce soutien additionnel était nécessaire en raison du volume sans précédent d’équipement acheté pour aider à combler les besoins des provinces et des territoires.
10.40 Nous avons constaté que, pour superviser les activités de ces tierces parties prestataires de services, l’Agence avait collaboré avec un cabinet de services professionnels à l’élaboration d’un outil permettant de surveiller la distribution de l’équipement aux provinces et aux territoires et de produire des rapports à cet égard. Toutefois, nous avons noté des difficultés en ce qui concerne le contrôle des stocks, notamment l’incapacité, parfois, de faire correctement le suivi des articles. En outre, certains des contrats conclus avec les tierces parties prestataires de services ne comprenaient pas de normes de service précisant à quel moment un retard dans la distribution des biens aux provinces et aux territoires devait faire l’objet d’un suivi.
10.41 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :
- la surveillance des services d’entreposage et de soutien logistique fournis par des tierces parties.
10.42 Cette constatation est importante parce que l’Agence de la santé publique du Canada demeure responsable de la gestion de l’équipement qu’elle achète pour aider à combler les besoins des provinces et des territoires, même si elle a recours à des tierces parties prestataires de services.
10.43 En mars 2020, l’Agence de la santé publique du Canada a lancé un processus d’achat en masse en passant des commandes pour de grandes quantités d’équipement, par l’intermédiaire de Services publics et Approvisionnement Canada, afin d’aider à combler les besoins des provinces et des territoires.
10.44 Le 2 avril 2020, les ministres de la Santé du gouvernement fédéral ainsi que des gouvernements provinciaux et territoriaux ont entériné la stratégie d’intervention provisoire à l’égard de la COVID‑19 — affectation des ressources limitées. La stratégie a rendu officielle la façon dont les produits obtenus par la voie d’achats en masse devaient être attribués. Selon la stratégie, une fois que les produits avaient été achetés et qu’ils étaient prêts à être livrés :
- 80 % seraient distribués aux provinces et aux territoires en fonction de leur population respective;
- 18 % seraient attribués à la Réserve nationale stratégique d’urgence;
- 2 % seraient remis à Services aux Autochtones Canada, pour les peuples autochtones.
10.45 Afin de composer avec le volume accru d’équipement acheté par la voie du processus d’achat en masse, l’Agence a élargi considérablement sa capacité d’entreposage. Le nombre de sites a augmenté, passant de 8 entrepôts gérés par le gouvernement fédéral pour les stocks de la Réserve fédérale à 19 entrepôts. Cela représentait un accroissement d’environ 167 000 mètres carrés. La plupart de ces entrepôts additionnels appartenaient à des tierces parties prestataires de services et étaient gérés par ces dernières. Ces prestataires fournissaient à la fois l’espace d’entreposage et le soutien logistique.
10.46 Notre recommandation relativement au secteur examiné est présentée au paragraphe 10.51.
La surveillance des services d’entreposage et de soutien logistique fournis par des tierces parties
10.47 Nous avons constaté qu’en avril 2020, l’Agence de la santé publique du Canada avait collaboré avec un cabinet de services professionnels à l’élaboration d’un outil exhaustif permettant de surveiller la distribution de l’équipement aux provinces et aux territoires et de produire des rapports à cet égard. Cet outil permettait aussi à l’Agence de superviser le rendement des tierces parties prestataires de services d’entreposage et de soutien logistique.
10.48 L’accès à cet outil de suivi et de rapport a été donné aux provinces et aux territoires. L’outil leur permettait de voir les données relatives à l’acheminement de l’équipement à leurs administrations publiques respectives. Les fonctionnaires de l’Agence nous ont indiqué que l’outil avait évolué au fil du temps pour répondre aux besoins des provinces et des territoires en matière d’information.
10.49 Les tierces parties prestataires de services d’entreposage et de soutien logistique étaient tenues de soumettre de l’information prédéterminée que l’Agence devait intégrer dans son système électronique de gestion des stocks, ainsi que dans son outil de suivi et de rapport. Nous avons toutefois constaté que les tierces parties en question ne pouvaient pas toutes respecter ces exigences, en raison, par exemple, du caractère incomplet des renseignements transmis par les fournisseurs et des contraintes imposées par le système de l’Agence. Ce manque d’information précise contribuait aux problèmes continus de l’Agence à l’égard de la gestion des stocks. Par exemple, l’Agence n’était parfois pas en mesure de faire correctement le suivi des articles. Des fonctionnaires de l’Agence nous ont indiqué qu’ils avaient essayé de résoudre ces problèmes au moyen de communications fréquentes, de visites sur place des entrepôts et de formation.
10.50 Les fonctionnaires de l’Agence nous ont aussi affirmé qu’ils effectuaient un suivi quotidien pour veiller à ce que l’équipement soit distribué aux provinces et aux territoires selon leurs besoins. Nous avons constaté que des normes de service relatives aux livraisons ne figuraient pas dans certains contrats. L’Agence a tenu compte, au fil du temps, de la nécessité d’inclure des normes de service. Ces normes figuraient dans le contrat à long terme signé en septembre 2020 avec un prestataire de services d’entreposage et de logistique.
10.51 Recommandation — L’Agence de la santé publique du Canada devrait faire respecter, comme il se doit, les modalités énoncées dans les contrats conclus avec des tierces parties prestataires de services d’entreposage et de soutien logistique (y compris le contrat à long terme signé en septembre 2020) en ce qui a trait à la présentation de données à jour, précises et complètes afin d’aider à gérer les stocks d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux.
Réponse de l’Agence — Recommandation acceptée. Depuis que les contrats à long terme ont été établis, l’Agence de la santé publique du Canada continue à travailler en étroite collaboration avec ses fournisseurs tiers de services d’entreposage et de logistique pour la prestation de données à jour, précises et complètes afin d’aider à contrôler les fournitures d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux et si nécessaire, elle prendra les mesures appropriées pour appliquer les modalités de ces contrats.
L’Agence de la santé publique du Canada a amélioré sa gestion de l’évaluation et de l’attribution de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux pour aider à répondre aux besoins des provinces et des territoires
10.52 Nous avons constaté qu’au fil de l’évolution de la pandémie, l’Agence de la santé publique du Canada avait amélioré la façon dont elle gérait son évaluation des besoins des provinces et des territoires en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux, ainsi que la façon dont elle attribuait l’équipement pour aider à combler ces besoins. L’Agence est passée d’une gestion réactive à une planification et à une distribution éclairées. Un premier passage vers une stratégie d’achat en masse a permis à l’Agence d’aider à combler le besoin sans précédent d’équipement partout au pays. Le renforcement de la collaboration et de la communication entre l’Agence, d’autres organisations fédérales, les provinces et les territoires a aussi permis de mieux répondre aux besoins alors que la pandémie se poursuivait.
10.53 Nous avons constaté qu’en août 2020, l’Agence de la santé publique du Canada avait commencé à utiliser un nouveau modèle national de prévision de l’offre et de la demande à long terme, dont Santé Canada a dirigé l’élaboration pendant l’été 2020. Ce modèle fournissait des données qui ont aidé l’Agence à prendre des décisions en matière d’achats.
10.54 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :
10.55 Cette constatation est importante parce que le gouvernement fédéral doit aider les provinces et les territoires à répondre à leurs besoins les plus pressants en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux, dans un contexte mondial où l’offre pour ces articles est limitée.
10.56 Nous n’avons pas présenté de recommandation relativement au secteur examiné.
L’amélioration de la gestion de l’évaluation des besoins et du processus décisionnel relatif à l’attribution des ressources
10.57 Nous avons constaté que, durant la pandémie, l’Agence de la santé publique du Canada avait amélioré ses processus pour évaluer les besoins et prendre des décisions en matière d’attribution des ressources. Par conséquent, l’Agence était mieux placée pour comprendre les besoins des provinces et des territoires en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux et pour les aider à combler ces besoins. Les processus sont devenus plus rigoureux : l’Agence est passée d’une gestion réactive à une planification éclairée. Nous avons aussi constaté que le nouveau modèle de prévision de l’offre et de la demande à long terme fournissait des données qui ont aidé l’Agence à prendre des décisions d’achat.
10.58 Les préoccupations à l’échelle nationale concernant le virus se sont accentuées en janvier et au début de février 2020. En réponse à ces préoccupations, des comités composés de fonctionnaires du gouvernement fédéral ainsi que des gouvernements provinciaux et territoriaux ont été formés pour obtenir et mettre en commun des renseignements sur les réserves provinciales et territoriales courantes, sur les pressions anticipées et sur les besoins en équipement. Nous avons constaté que l’Agence avait de la difficulté à évaluer avec exactitude la demande nationale globale en raison de problèmes initiaux de communication avec les provinces et les territoires. Cependant, le renforcement de la collaboration et de la communication entre les organisations fédérales, les provinces et les territoires, alors que la pandémie se poursuivait, a permis de mieux cerner les besoins et d’aider à y répondre.
10.59 En février 2020, l’Agence de la santé publique du Canada a reçu la première demande d’assistance directe d’une province ou d’un territoire visant de l’équipement stocké dans la Réserve nationale stratégique d’urgence. Il était déjà possible, avant la pandémie, de soumettre de telles demandes d’assistance directe, mais peu ont été reçues.
10.60 En mars 2020, l’Agence a lancé un processus d’achat en masse qui consistait à passer des commandes pour de grandes quantités d’équipement afin d’aider à combler les besoins des provinces et des territoires, par l’entremise de Services publics et Approvisionnement Canada. L’Agence a dû faire appel à des pouvoirs d’achat en masse pour commander de l’équipement, en raison de sérieux problèmes liés à la chaîne d’approvisionnement mondiale.
10.61 Le 2 avril 2020, la stratégie d’intervention provisoire à l’égard de la COVID‑19 — affectation des ressources limitées a été approuvée par la ministre fédérale de la Santé et ses homologues provinciaux et territoriaux. Cette stratégie avait été élaborée par l’Agence de la santé publique du Canada en collaboration avec des partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux. La stratégie a rendu officielle la façon dont les produits obtenus par la voie d’achats en masse devaient être attribués. Ce processus était dirigé par le gouvernement fédéral, qui s’appuyait sur l’avis des provinces et des territoires, dans le but de procéder de manière proactive et plus rapide à l’achat d’équipement pour le personnel médical de première ligne. À notre avis, il était nécessaire que l’Agence passe du traitement des demandes d’assistance individuelles des provinces et des territoires à un processus d’achat en masse afin de réduire le risque de pénuries de stocks et d’aider à gérer la réponse à la pandémie (voir la pièce 10.3).
Pièce 10.3 — L’amélioration des processus fédéraux pour évaluer les besoins et attribuer l’équipement aux provinces et aux territoires
Dates clés | Demandes d’assistance des provinces et des territoires | Achats en masse | Outils de suivi et de rapport |
---|---|---|---|
Avant 2020 |
|
|
|
De janvier à mars 2020 |
|
|
|
2 avril 2020 : Lancement de la stratégie d’intervention provisoire à l’égard de la COVID‑19 — affectation des ressources limitées |
|
|
|
D’avril à août 2020 |
|
|
|
Source : D’après des documents examinés par le BVG et mis à sa disposition par l’Agence de la santé publique du Canada
10.62 Selon la stratégie d’intervention provisoire à l’égard de la COVID‑19 — affectation des ressources limitées, une fois que les produits ont été achetés et qu’ils sont prêts à être livrés, 80 % seraient distribués aux provinces et aux territoires en fonction de leur population respective (voir le paragraphe 10.44). L’Agence de la santé publique du Canada présentait des demandes d’achats en masse à Services publics et Approvisionnement Canada selon les besoins estimatifs des provinces et des territoires. Nous avons constaté que dans certains cas, Services publics et Approvisionnement Canada avait conclu des contrats pour des quantités beaucoup plus grandes ou plus petites que ce qui avait été demandé au départ. On nous a avisés qu’il en était ainsi parce que les organisations fédérales faisaient des ajustements aux achats compte tenu d’examens de l’équipement pour aider à évaluer les quantités appropriées à commander en vue de répondre à la demande. Services publics et Approvisionnement Canada choisissait parfois d’acheter de plus grandes quantités lorsque l’offre le permettait ou s’il lui avait été impossible, lors d’une demande antérieure, de remplir une commande complète parce que l’offre était limitée ou que l’équipement n’était pas disponible à ce moment-là. D’avril à juin 2020, l’équipement a été acheté de façon urgente et un suivi a été fait auprès des fournisseurs pour confirmer l’échéancier de livraison. Les commandes ont été réparties dans le temps et la distribution dépendait de la disponibilité du produit.
10.63 Nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada et Services publics et Approvisionnement Canada s’étaient associés à d’autres organisations fédérales pour recueillir et intégrer les données sur l’achat et la distribution de l’équipement. Il s’agissait notamment de données sur les quantités commandées, les dates de livraison prévues et les quantités reçues. Ces données étaient intégrées à divers outils de rapport, notamment un tableau de bord national de l’équipement, afin d’assurer un suivi en temps réel de l’offre d’équipement. Le tableau de bord était publié chaque jour par Santé Canada et Statistique Canada, et était utilisé par les partenaires fédéraux, les provinces et les territoires. Les données étaient aussi intégrées à d’autres outils de rapport pour présenter de l’information sur l’offre d’équipement.
10.64 Si les provinces et les territoires avaient un urgent besoin qui ne pouvait pas être satisfait en recevant leur part de l’équipement acheté en masse dans le cadre de la stratégie d’intervention provisoire à l’égard de la COVID‑19 — affectation des ressources limitées, les provinces et les territoires pouvaient continuer de soumettre des demandes d’assistance auprès de la Réserve nationale stratégique d’urgence. Nous avons constaté que l’Agence a été en mesure d’aider à combler des besoins pressants et imprévus des provinces et des territoires en partie en raison du fait que 18 % des articles obtenus dans le cadre des achats en masse étaient destinés à la Réserve fédérale. Nous avons constaté que, dans le cadre de cette stratégie, le processus d’évaluation de ces demandes mis en œuvre par l’Agence de la santé publique du Canada s’était amélioré et que la priorité était accordée principalement en fonction de l’urgence. Les demandes des provinces et des territoires étaient triées et satisfaites selon la disponibilité des articles en question stockés dans la Réserve fédérale. Dans les cas où une demande était refusée ou remplie partiellement, la province ou le territoire pouvait soumettre une autre demande à une date ultérieure ou envisager d’autres options, comme demander de l’aide d’une autre province ou d’un autre territoire. L’Agence réexaminait aussi les besoins chaque semaine, au fur et à mesure que de l’équipement devenait disponible.
10.65 Nous avons constaté que l’élaboration d’un modèle national de prévision de l’offre et de la demande à long terme, dirigée par Santé Canada, était ce qui avait permis à l’Agence de passer d’une gestion réactive à une planification et à une attribution éclairées. En mai 2020, les ministères fédéraux concernés, dont l’Agence de la santé publique du Canada, se sont rendu compte qu’un modèle à long terme élaboré de concert avec les gouvernements provinciaux et territoriaux était nécessaire pour prévoir l’offre et la demande en équipement pour les 12 à 18 mois suivants. Le gouvernement fédéral a passé un contrat avec le secteur privé pour l’établissement du modèle, sous la direction de Santé Canada. Chaque semaine, Santé Canada recevait des données des provinces et des territoires sur le niveau de leurs stocks, les taux d’utilisation et les commandes à venir. Ces données étaient essentielles pour garantir l’exactitude du modèle.
10.66 Le nouveau modèle de prévision de l’offre et de la demande à l’échelle nationale permettait de dresser différents scénarios de progression de la maladie par province et territoire. Ces scénarios, ajoutés aux données obtenues de nombreux secteurs dans chaque province et territoire, comme le mode d’utilisation de l’équipement, ont servi de fondement pour établir des prévisions à l’égard de la demande d’équipement à venir. Ces prévisions ont ensuite été comparées avec les données sur l’offre afin de recenser les éventuelles pénuries d’équipement pour au moins les 12 mois à venir dans de nombreux secteurs, et ce, dans chaque province et territoire. Des fonctionnaires nous ont indiqué qu’à partir du mois d’août 2020, l’Agence avait commencé à se servir des données de ce modèle pour évaluer s’il fallait ou non acheter de l’équipement additionnel.
Approvisionnement en équipement et assurance de la qualité
Santé Canada a modifié son processus de traitement des demandes de licence des fournisseurs pour répondre plus rapidement à l’augmentation de la demande
10.67 Nous avons constaté que Santé Canada avait modifié les modalités de traitement des demandes de licence des fournisseurs d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux afin de pouvoir traiter plus rapidement la forte augmentation des demandes. Le Ministère a attribué aux fournisseurs des numéros provisoires de demande de licence d’établissement d’instruments médicaux, en attendant que leur demande soit entièrement examinée et qu’une décision soit prise. Nous avons constaté que ce nouveau processus de traitement des demandes de licence d’établissement avait permis au Ministère de traiter presque deux fois plus de demandes par rapport à l’année précédente.
10.68 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :
- des changements fondés sur le risque apportés au processus de traitement des demandes de licence;
- des mesures appropriées prises à l’égard des appareils de protection respiratoire de qualité inférieure aux normes.
10.69 Cette constatation est importante parce que de nombreux Canadiens et Canadiennes utilisent de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux, et ils s’attendent à ce que ces produits soient sécuritaires, efficaces et disponibles au moment requis.
10.70 Tous les instruments médicaux vendus au Canada, y compris l’équipement de protection individuelle vendu pour un usage médical, doivent satisfaire aux exigences relatives à l’octroi d’une licence. L’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux sont divisés en quatre classes selon le risque associé à leur utilisation (voir la pièce 10.4). Les instruments médicaux de la classe I posent le moins de risques. Les instruments médicaux de la classe IV posent les plus grands risques.
Pièce 10.4 — Exemples d’instruments médicaux et leurs classes
Risque | Classe | Exemples |
---|---|---|
Faible à Élevé |
Classe I |
Masques N95, blouses médicales, écouvillons de dépistage |
Classe II |
Gants médicaux |
|
Classe III |
Ventilateurs |
|
Classe IV |
Stimulateurs cardiaques |
10.71 En tant qu’organisme chargé de réglementer l’importation et la vente d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux au pays, Santé Canada octroie deux types de licences :
- Licences d’établissement d’instruments médicaux : Ces licences sont délivrées aux entreprises qui fabriquent l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux de la classe I, ainsi qu’à celles qui importent ou distribuent les quatre classes d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux. Elles sont octroyées sur attestation du respect des exigences relatives à la mise en place de procédures documentées pour le traitement des plaintes, la tenue de registres de distribution, les rappels et les rapports d’incidents.
- Licences pour instruments médicaux : Ces licences sont octroyées pour de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux particuliers des classes II, III et IV, et sont délivrées aux entreprises qui fabriquent ces produits. Elles sont octroyées après un examen qui permet de confirmer que l’instrument satisfait aux exigences réglementaires en vigueur, notamment aux exigences en matière de sûreté et d’efficacité. Plus le niveau de classification de l’instrument médical est élevé, plus le niveau d’examen exigé est élevé. Le fabricant peut vendre l’instrument ainsi homologué soit directement, soit par l’intermédiaire d’un titulaire d’une licence d’établissement d’instruments médicaux.
10.72 Notre recommandation relativement au secteur examiné est présentée au paragraphe 10.82.
Des changements fondés sur le risque apportés au processus de traitement des demandes de licence
10.73 Nous avons constaté que Santé Canada avait modifié son processus de traitement des demandes de licence d’établissement d’instruments médicaux afin de répondre plus rapidement à la forte augmentation des demandes présentées par des fournisseurs qui voulaient vendre de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux. Ces mesures l’ont aidé à presque doubler le nombre de demandes qu’il traite normalement en une année, pendant la période de huit mois de notre audit. Les licences d’établissement d’instruments médicaux comprenaient les licences octroyées aux fournisseurs d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux pour répondre aux besoins des provinces et des territoires.
10.74 En avril 2020, pour tenir compte de l’augmentation du nombre de demandes de licence, Santé Canada a attribué des numéros provisoires de demande de licence d’établissement d’instruments médicaux aux personnes qui avaient indiqué leurs coordonnées et donné des renseignements sur l’instrument médical dans leur formulaire de demande. Ces numéros de demande étaient valides jusqu’à ce que le Ministère ait examiné en profondeur les demandes et rendu sa décision. Pendant la période d’attente, ces personnes étaient autorisées à importer et à vendre des instruments médicaux au Canada. L’attribution de numéros de demande provisoires a été instaurée dans le but de tenter de respecter un délai de 24 heures pour le traitement des demandes pendant une période où la demande de licences était forte. Avant la pandémie, il fallait en moyenne 39 jours pour traiter une nouvelle demande de licence d’établissement d’instruments médicaux.
10.75 Santé Canada a indiqué qu’il avait exercé son pouvoir discrétionnaire à l’égard des exigences relatives à l’octroi d’une licence pour l’importation et la vente d’instruments médicaux. Même si l’approche du Ministère était pratique, compte tenu des circonstances, nous sommes d’avis qu’il aurait été approprié que la ministre de la Santé prenne un arrêté d’urgence en vertu de l’article 30.1 de la Loi sur les aliments et drogues pour suspendre ou modifier provisoirement des exigences réglementaires obligatoires. Ce processus réglementaire permet une approche claire et transparente parce que les arrêtés d’urgence doivent être présentés au Parlement.
10.76 Nous avons constaté que pour atténuer les risques accrus posés par l’attribution de numéros de demande provisoires, le Ministère avait mis des processus en place pour :
- informer les demandeurs des attentes relatives au respect des exigences par les titulaires de licence;
- saisir des produits, en faire cesser la vente ou en prévenir l’importation;
- prendre immédiatement des mesures de conformité et de mise en application de la loi si un risque sanitaire était détecté.
10.77 Nous avons constaté que le Ministère avait continuellement mis à jour ses procédures de traitement des demandes de licence en fonction de l’évolution de la situation et avait fait connaître ces modifications à son personnel. À notre avis, cette communication était importante parce que du personnel avait été réaffecté en provenance d’autres divisions pour faire face à la forte augmentation des demandes.
Des mesures appropriées prises à l’égard des appareils de protection respiratoire de qualité inférieure aux normes
10.78 Nous avons noté qu’à titre d’instrument médical de classe I, les appareils de protection respiratoireDéfinition 4 pouvaient être vendus au Canada en vertu d’une licence d’établissement pour instruments médicaux. C’est donc dire que même si une entreprise était titulaire d’une licence pour vendre des appareils de protection respiratoire, les appareils eux-mêmes n’avaient pas été homologués individuellement et n’avaient donc pas été soumis à un examen de Santé Canada pour vérifier s’ils étaient sûrs et efficaces.
10.79 En mai 2020, la Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis (Secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques) a publié des directives révisées à l’intention des parties prenantes indiquant que certains appareils de protection respiratoire pouvaient ne pas protéger de manière adéquate. Nous avons constaté que Santé Canada avait pris des mesures appropriées pour évaluer l’incidence au Canada des appareils concernés et régler le problème, le cas échéant. Plus particulièrement, le Ministère a diffusé une liste d’avis publics de rappel pour les appareils de protection respiratoire qui ne satisfaisaient pas aux normes de rendement établies. Le Ministère a régulièrement mis cette liste à jour et demandé aux fournisseurs de procéder à des rappels volontaires des produits inscrits sur la liste. À la fin de la période visée par l’audit, la liste comprenait 165 appareils de protection respiratoire.
10.80 Nous avons constaté qu’en plus de publier des avis de rappel, Santé Canada avait effectué des recherches dans sa base de données des fournisseurs. Le Ministère a communiqué avec les entreprises qui pouvaient avoir vendu les appareils de protection respiratoire faisant l’objet d’un rappel afin de déterminer si elles étaient de fait visées par le rappel et de leur indiquer la marche à suivre. Nous avons constaté que le Ministère avait pris des mesures supplémentaires afin d’atténuer le risque que d’autres fournisseurs vendent des produits faisant l’objet d’un rappel. Il a notamment communiqué de l’information sur les rappels à tous les fournisseurs et réalisé des contrôles en continu dans sa base de données des fournisseurs pour repérer les produits faisant l’objet d’un rappel.
10.81 À notre avis, il est justifié de procéder à un examen en vue de déterminer si les appareils de protection respiratoire sont classés dans la bonne catégorie d’instruments médicaux, pour les raisons suivantes :
- l’importance de ces appareils pour lutter contre les maladies infectieuses comme la COVID‑19;
- l’inefficacité reconnue d’un grand nombre de ces produits;
- le fait qu’en tant qu’instruments médicaux de classe I, les appareils de protection respiratoire ne sont pas assujettis à une vérification de leur sûreté et de leur efficacité par Santé Canada.
10.82 Recommandation — Santé Canada devrait déterminer si les appareils de protection respiratoire sont bien classés, étant donné que l’efficacité et la sûreté des instruments médicaux de classe I ne sont pas vérifiées par Santé Canada.
Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Bien que Santé Canada réglemente actuellement les instruments médicaux en conformité avec un système de classification basé sur le risque, on pourrait prendre en considération la prestation d’une surveillance renforcée de précommercialisation pour certains instruments à plus faible risque. Santé Canada reconnaît les difficultés sous-jacentes au besoin de s’assurer que les exigences en matière de sécurité, d’efficacité et de qualité pour les respirateurs sont satisfaites dans des situations telles que la pandémie de la COVID‑19.
En vertu du Règlement sur les instruments médicaux actuel, il n’est pas question d’effectuer une évaluation de précommercialisation pour les instruments médicaux de classe I. Toutefois, en vertu de l’approche de l’arrêté d’urgence, Santé Canada s’est vu accorder des flexibilités réglementaires qui ont permis des examens de précommercialisation des respirateurs. Les activités de surveillance de postcommercialisation, y compris les inspections et les évaluations scientifiques en vertu de l’arrêté d’urgence, ont permis à Santé Canada d’être davantage conscient du fait que des respirateurs de faible qualité peuvent accéder au marché canadien.
Santé Canada va examiner en particulier la classification des instruments posant un risque plus faible, y compris les respirateurs, dans le cadre de l’élaboration des règlements agiles pour les instruments médicaux. Bien qu’elle vienne juste de débuter, cette initiative est en cours et permettra de déterminer si les respirateurs sont classifiés correctement. Santé Canada s’est engagé à explorer les différentes possibilités d’évaluer le niveau approprié de surveillance de précommercialisation de ces instruments. Une analyse des enjeux sera effectuée dans un délai d’un an suivant la fin de la pandémie.
Services publics et Approvisionnement Canada a comblé le besoin urgent en matière d’équipement
10.83 Nous avons constaté que Services publics et Approvisionnement Canada avait rapidement adapté ses activités d’approvisionnement afin de procéder à l’acquisition, en temps opportun, d’équipement au nom de l’Agence de la santé publique du Canada, pour lutter contre la pandémie de COVID‑19. Nous avons aussi constaté que pour faire face à l’urgence de la situation, le Ministère avait accepté d’assumer certains risques additionnels en payant des fournisseurs à l’avance dans un contexte où la concurrence était vive, sans toujours évaluer leur viabilité financière.
10.84 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :
- la rapidité de la modification des processus d’approvisionnement;
- l’attribution de contrats en temps opportun;
- l’acceptation de certains risques liés à l’approvisionnement.
10.85 Cette constatation est importante parce qu’il était essentiel que l’approvisionnement en équipement soit efficace pour aider à répondre aux besoins des provinces et des territoires, c’est-à-dire obtenir rapidement une quantité adéquate d’équipement de qualité.
10.86 Avant la pandémie, la capacité de production d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux au Canada était très limitée, d’où l’importance des importations. Au début de la pandémie, la demande mondiale d’équipement et d’instruments médicaux a connu une augmentation exponentielle, ce qui a eu une énorme incidence sur l’offre à l’échelle mondiale. Comme l’offre était limitée, la concurrence pour l’équipement sur les marchés était très vive, ce qui a fait augmenter les prix. Dans un tel contexte, les fournisseurs exigeaient parfois d’être payés à l’avance. En outre, il était difficile d’obtenir une capacité de fret suffisante à bord des avions pour transporter d’urgence l’équipement au Canada. Des services logistiques ont donc été mis en place pour prendre possession de l’équipement plus tôt dans la chaîne de livraison.
10.87 Au cours de la période visée par notre audit, Services publics et Approvisionnement Canada a attribué, au nom de l’Agence de la santé publique du Canada, 85 contrats totalisant 3,7 milliards de dollars pour l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux retenus aux fins de l’audit. Nous avons examiné 39 de ces contrats. La pièce 10.5 présente la liste des contrats, par type d’équipement et selon leur valeur.
Pièce 10.5 — Les contrats pour l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux que nous avons examinés
Type d’équipement | Nombre de contrats examinés | Valeur taxes comprises (en millions de dollars) |
---|---|---|
Masques N95 | 10 | 380 $ |
Blouses médicales | 14 | 890 $ |
Écouvillons de dépistage | 7 | 67 $ |
Ventilateurs | 8 | 633 $ |
Total | 39 | 1 970 $ |
10.88 Le processus simplifié d’approvisionnement mis en place par Services publics et approvisionnement Canada pour lutter contre la pandémie de COVID‑19 est présenté dans la pièce 10.6.
Pièce 10.6 — Processus simplifié d’approvisionnement pendant la pandémie de COVID‑19
Source : D’après des documents et des contrats examinés par le BVG et préparés par Services publics et Approvisionnement Canada
Pièce 10.6 — version textuelle
Le diagramme décrit le processus simplifié d’approvisionnement qui a été utilisé par Services publics et Approvisionnement Canada pour acheter de l’équipement pendant la pandémie de COVID‑19.
Une exception relative à la sécurité nationale a été invoquée pour permettre l’utilisation d’un processus d’approvisionnement non concurrentiel et l’utilisation du pouvoir exceptionnel de passation de marchés en cas d’urgence dans le cadre de la stratégie d’approvisionnement définie par Services publics et Approvisionnement Canada (SPAC).
La première étape du processus est l’identification des fournisseurs. Services publics et Approvisionnement Canada et l’Agence de la santé publique du Canada ont tous deux un rôle à jouer dans cette étape. Le Ministère communique avec l’industrie. L’Agence recommande quant à elle des produits et des fournisseurs en fonction des exigences techniques définies. Le Ministère procède ensuite à la sélection et à l’évaluation des fournisseurs.
Durant la deuxième étape, l’Agence évalue les besoins et prépare les demandes d’achat. Une estimation des quantités nécessaires et des coûts est effectuée avant l’acquisition de l’équipement.
Pendant la troisième étape, Services publics et Approvisionnement Canada sollicite et évalue les fournisseurs et négocie avec eux. Le Ministère réalise une vérification de l’intégrité et une validation des fournisseurs. Les prix sont négociés. Une ébauche du contrat est soumise à l’approbation de l’Agence de la santé publique du Canada.
Au cours de la quatrième étape, l’Agence effectue un contrôle d’assurance qualité de l’équipement. Avant l’attribution du contrat, des évaluations techniques sont réalisées et des tests d’échantillons sont demandés. Après l’attribution du contrat, un examen des produits reçus est effectué en fonction des risques.
Une fois la quatrième étape terminée, la troisième étape est répétée aussi souvent que nécessaire, puis le processus se poursuit avec la cinquième étape.
Durant la cinquième étape, Services publics et Approvisionnement Canada approuve et attribue le contrat, au moyen de la délégation des pouvoirs d’urgence.
Pendant la sixième étape, Services publics et Approvisionnement Canada fait le suivi du contrat. Des modifications sont apportées au contrat pour tenir compte des changements ayant trait aux quantités, aux types de biens, aux prix, aux modalités de livraison, et ceteraetc.
La septième étape, qui est réalisée par l’Agence de la santé publique du Canada, est le paiement des biens. Le paiement est effectué à l’avance ou à la réception des biens.
10.89 Notre recommandation relativement au secteur examiné est présentée au paragraphe 10.102.
La rapidité de la modification des processus d’approvisionnement
10.90 Nous avons constaté que Services publics et Approvisionnement Canada avait rapidement modifié ses processus d’approvisionnement dès le début de la pandémie afin de pouvoir exercer son pouvoir de passation de marchés en cas d’urgence.
10.91 Afin d’accélérer l’acquisition des biens et services nécessaires pour lutt à la sélectione la pandémie, plusieurs mesures ont été mises en œuvre, dont les suivantes :
- Une exception relative à la sécurité nationale, qui restera en vigueur jusqu’à la fin de la pandémie, a été invoquée pour permettre au Canada d’exclure son approvisionnement d’une partie ou de la totalité des obligations prévues en vertu de certains accords commerciaux. Services publics et Approvisionnement Canada était ainsi soustrait aux obligations à l’égard de l’application d’une procédure définie et de l’accès au marché.
- Services publics et Approvisionnement Canada a exercé son pouvoir de passation de marchés en cas d’urgence pour acquérir des biens à l’aide de processus non concurrentiels.
- Le Conseil du Trésor a augmenté la limite contractuelle d’urgence de Services publics et Approvisionnement Canada, qui est passée de 15 millions de dollars à 500 millions de dollars. Le plafond a été rehaussé afin de renforcer la capacité du Ministère à obtenir plus rapidement les fournitures nécessaires pour lutter contre la pandémie, notamment de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux, sans avoir à demander l’approbation du Conseil du Trésor.
- Services publics et Approvisionnement Canada a approuvé une nouvelle grille interne de délégation exceptionnelle des pouvoirs d’urgence. Cette grille permettait aux cadres du Ministère dont le niveau est inférieur à celui de sous-ministre adjoint d’approuver les contrats liés à la COVID‑19.
10.92 Nous avons constaté que pour répondre aux besoins urgents en matière d’approvisionnement liés à la pandémie de COVID‑19, du personnel de Services publics et Approvisionnement Canada en provenance d’autres services au sein du Ministère avait rapidement été réaffecté. Le Ministère a par la suite nommé des ressources permanentes chargées de répondre exclusivement aux besoins à long terme d’approvisionnement en équipement de ce genre.
L’attribution de contrats en temps opportun
10.93 Nous avons constaté que les stratégies et processus d’approvisionnement simplifiés de Services publics et Approvisionnement Canada avaient permis d’attribuer rapidement des contrats d’acquisition d’équipement.
10.94 La pièce 10.7 présente le délai moyen d’attribution des 39 contrats que nous avons examinés et le temps moyen écoulé entre l’exécution du contrat original et la livraison de la première commande à l’Agence de la santé publique du Canada.
Pièce 10.7 — Nombre moyen de jours civils nécessaires pour acheter de l’équipement et le livrer à l’Agence de la santé publique du Canada, pour les 39 contrats que nous avons examinés
Type d’équipement | Nombre moyen de jours entre la demande d’achat et la signature du contrat (Services publics et Approvisionnement Canada) |
Nombre moyen de jours entre la signature du contrat original et la première livraison (Fournisseur) |
Nombre total de jours |
---|---|---|---|
Masques N95 | 34 | 71 | 105 |
Blouses médicales | 28 | 57 | 85 |
Écouvillons de dépistage | 8 | 16 | 24 |
Ventilateurs | 22 | 132 | 154 |
Source : D’après des données et des documents examinés par le BVG et mis à sa disposition par Services publics et Approvisionnement Canada
10.95 Nous avons constaté que Services publics et Approvisionnement Canada avait attribué assez rapidement les contrats compte tenu du fait que le Ministère devait communiquer avec les fournisseurs, négocier avec eux les modalités des contrats et obtenir l’approbation de membres de la haute direction. Vu le caractère exceptionnel de la pandémie de COVID‑19 et la nécessité d’avoir recours à des processus d’acquisition non concurrentiels, il n’était pas approprié de comparer les résultats obtenus avec les délais habituels d’acquisition de biens.
10.96 Nous avons aussi examiné le temps écoulé entre l’approbation du contrat original et la réception de la première commande afin de constater les résultats du travail effectué, en tenant compte du fait que la livraison des biens relève de la responsabilité des fournisseurs. Le nombre de jours indiqué dans la troisième colonne de la pièce 10.7 comprend toute modification apportée aux modalités du contrat, après l’approbation du contrat original, en vue notamment de modifier les quantités commandées ou le calendrier de livraison. Cela comprend aussi le temps nécessaire pour fabriquer l’équipement, car celui-ci n’était pas toujours en stock. Souvent, afin d’accroître la production nationale, des processus de production avaient dû être modifiés ou instaurés pour fabriquer l’équipement au Canada, ce qui a rallongé les délais de livraison. Enfin, ces chiffres comprennent aussi le temps nécessaire pour transporter l’équipement jusqu’aux entrepôts utilisés par l’Agence de la santé publique du Canada.
L’acceptation de certains risques liés à l’approvisionnement
10.97 En avril 2020, Services publics et Approvisionnement Canada avait recensé certains nouveaux risques, notamment une surveillance moindre, qui pouvaient occasionner des erreurs ou aboutir à des décisions relatives à l’approvisionnement mal étayées. Nous avons constaté qu’aucune stratégie d’atténuation n’avait été établie pour contrer ces risques. Par conséquent, même si le Ministère a réussi à accélérer le processus d’approvisionnement, il n’a pas toujours pu démontrer qu’il avait exercé la surveillance nécessaire.
10.98 Nous avons constaté que le Ministère n’avait pas toujours été en mesure de prouver que ses fonctionnaires avaient respecté en bonne et due forme la nouvelle grille de délégation exceptionnelle des pouvoirs d’urgence. Pour 41 % des contrats originaux que nous avons examinés (16 sur 39), la documentation ne montrait pas si l’approbation avait été donnée au niveau d’autorité approprié. Nous avons toutefois constaté qu’il y avait eu des améliorations considérables dans la manière dont l’approbation des contrats avait été documentée entre mai et août 2020, par rapport aux contrats préparés de mars à avril 2020.
10.99 Nous avons aussi constaté que Services publics et Approvisionnement Canada avait effectué une vérification de l’intégrité de chaque fournisseur qui s’était vu attribuer un contrat, en fonction du Régime d’intégrité du gouvernement du Canada. Cette vérification comprend un examen des bases de données, de l’information provenant de sources ouvertes et de l’information sur les entreprises. Nous avons toutefois constaté que dans 59 % des cas (soit 23 sur 39), cette vérification avait été effectuée seulement après l’attribution du contrat. Pour atténuer les risques que posait le moment de cette vérification, Services publics et Approvisionnement Canada avait établi des modalités dans les contrats prévoyant que le Ministère pouvait mettre fin au contrat si le fournisseur ne répondait pas aux exigences du Régime d’intégrité du gouvernement.
10.100 Pour faire l’acquisition de biens quand l’offre est limitée sur le marché, Services publics et Approvisionnement Canada a souvent dû payer à l’avance. Or, selon la Directive sur les paiements du Conseil du Trésor, les paiements anticipés doivent être réservés aux situations exceptionnelles. Vu l’urgence créée par la pandémie, des paiements anticipés ont été versés pour 36 % des contrats que nous avons examinés (soit 14 sur 39). Ces contrats sont jugés plus risqués, étant donné que le gouvernement pourrait payer pour des biens qu’il ne reçoit pas. Nous avons constaté que la valeur des paiements anticipés effectués dans le cadre des contrats examinés oscillait entre 20 % et 80 % de la valeur du contrat original, et totalisait 618 millions de dollars. Nous avons aussi constaté que Services publics et Approvisionnement Canada avait pris des mesures afin de récupérer des sommes versées à l’avance pour des biens qui n’avaient pas été reçus.
10.101 Nous avons constaté que le Ministère ne pouvait pas toujours démontrer qu’il avait réalisé des évaluations précises pour les contrats qui comportaient des paiements anticipés afin de vérifier, par exemple, la viabilité financière des fournisseurs. De fait, une évaluation financière des fournisseurs a été réalisée pour la moitié des contrats (7 sur 14) que nous avons examinés pour lesquels des paiements anticipés avaient été versés. Le Guide sur les paiements anticipés du Conseil du Trésor indique qu’avant de négocier l’ajout d’une clause de paiement anticipé dans un contrat, il faudrait réaliser une évaluation des risques. Cette évaluation fournirait entre autres au Ministère de l’information sur la viabilité du fournisseur et le risque que le contrat ne soit pas respecté.
10.102 Recommandation —Services publics et Approvisionnement Canada devrait, lorsqu’il répond à des besoins urgents et accepte des risques liés à l’approvisionnement, vérifier la viabilité financière des fournisseurs avant d’attribuer des contrats qui comportent une clause de paiement anticipé.
Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. L’audit a permis de constater que Services publics et Approvisionnement Canada a mobilisé son effectif et s’est adapté rapidement pour répondre aux besoins urgents des Canadiens et des Canadiennes en matière d’approvisionnement. L’acquisition des biens et des services nécessaires pour lutter contre la pandémie, en particulier au cours des 100 premiers jours (l’objet du présent audit), a été un effort constant dans un contexte sans précédent de chaînes d’approvisionnement mondiales extrêmement limitées. Cela a donné lieu à des défis, qu’il s’agisse d’exécuter des contrats en dehors des heures de travail normales, de s’occuper de la logistique ou d’entreprendre de nouvelles activités essentielles, comme la Réserve d’urgence pour les services essentiels. Le Ministère a établi des processus dès le début de la pandémie visant à assurer une surveillance et une diligence raisonnable, mais nous reconnaissons que nous pouvons toujours améliorer les processus d’approvisionnement et, dans le contexte des paiements anticipés, il s’agit notamment de procéder à des vérifications financières. Au cours de la dernière année, le Ministère a continuellement fait évoluer ses approches. À l’avenir, le Ministère continuera de mettre à jour ses processus liés aux approvisionnements d’urgence afin de tenir compte des leçons apprises dans le cadre de cet audit et d’autres exercices, tout en continuant d’accorder la priorité à la santé et à la sécurité des Canadiens et des Canadiennes.
L’Agence de la santé publique du Canada a modifié son processus d’assurance qualité pour faire face au volume élevé d’équipement acheté
10.103 Nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada avait modifié adéquatement ses processus d’assurance qualité pour faire face au volume élevé d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux commandés auprès de nouveaux fournisseurs. De plus, nous avons constaté que l’Agence avait établi rapidement la capacité nécessaire pour évaluer la qualité de l’équipement.
10.104 L’analyse à l’appui de cette constatation porte sur :
- des modifications adéquates aux processus d’assurance qualité;
- une augmentation rapide de la capacité pour tester l’équipement.
10.105 Cette constatation est importante parce que la population canadienne s’attend à ce que l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux soient sécuritaires et efficaces.
10.106 Nous n’avons pas présenté de recommandation relativement au secteur examiné.
Des modifications adéquates aux processus d’assurance qualité
10.107 Nous avons constaté que, pour faire face à la pandémie de COVID‑19, l’Agence de la santé publique du Canada avait modifié adéquatement ses processus d’assurance qualité visant l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux. En avril 2020, l’Agence a créé et dirigé un comité d’évaluation technique chargé de définir les caractéristiques techniques de l’équipement de lutte contre la COVID‑19, en fonction de normes reconnues à l’échelle internationale. Les caractéristiques techniques ainsi définies ont été publiées sur un site Web du gouvernement. Le comité a évalué chacun des produits que le gouvernement envisageait d’acheter. L’Agence a ensuite recommandé à Services publics et Approvisionnement Canada d’attribuer ou non un contrat.
10.108 Nous avons aussi constaté qu’en avril 2020, l’Agence avait modifié son processus d’assurance qualité visant les masques N95, les blouses médicales et les écouvillons de dépistage afin de réduire au minimum les délais de traitement en mettant sur pied un système fondé sur les risques. Ce système a été instauré pour faire face au volume élevé d’équipement reçu de fournisseurs avec lesquels le gouvernement du Canada n’avait jamais fait affaire auparavant.
10.109 Nous avons constaté que le processus d’assurance qualité axé sur les risques avait réduit les délais de réalisation des tests pour les masques N95, les blouses médicales et les écouvillons de dépistage. Le système classait les fournisseurs en fonction de leur conformité antérieure aux caractéristiques des produits et en fonction du niveau de risque attribué au produit lui-même. Tous les fournisseurs devaient fournir des photos du produit et de son emballage, ainsi qu’une déclaration de la conformité aux caractéristiques techniques. Les tests étaient obligatoires pour les produits des fournisseurs que le gouvernement du Canada ne connaissait pas ainsi que pour les fournisseurs qui n’avaient pas présenté des éléments suffisants pour prouver la conformité de leurs produits aux caractéristiques techniques. Les tests étaient facultatifs pour les fournisseurs ayant un bilan de conformité reconnu.
10.110 Lorsque les masques N95, les blouses médicales et les écouvillons de dépistage échouaient les tests, l’Agence de la santé publique du Canada examinait un certain nombre d’options. Par exemple, de nouvelles étiquettes pouvaient être apposées sur les produits et il était possible d’autoriser leur distribution à des fins non médicales, après consultation avec Santé Canada et le fabricant. L’Agence pouvait aussi décider de rejeter la livraison d’un produit n’ayant pas réussi les tests et conseiller au Ministère de demander un produit de remplacement ou d’annuler le contrat.
10.111 Les tests concernant les ventilateurs étaient soumis à un processus d’assurance qualité différent. Nous avons constaté que ce processus était fondé sur des seuils de qualité rigoureux. Ce processus n’a pas été modifié pendant la pandémie. Il était important de tester les ventilateurs de manière approfondie, étant donné qu’ils posent un risque accru pour la santé. Les ventilateurs qui ne passaient pas les tests en raison d’une défectuosité majeure ont été renvoyés au fournisseur. Lorsque des problèmes mineurs étaient relevés, des pièces de rechange ont été fournies par le fournisseur et les ventilateurs ont été testés de nouveau.
Une augmentation rapide de la capacité pour tester l’équipement
10.112 Nous avons constaté que l’Agence de la santé publique du Canada avait réussi à établir rapidement la capacité nécessaire pour tester les quatre types d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux que nous avons examinés. L’Agence a renforcé son expertise spécialisée pour pouvoir répondre à la demande accrue de tests à réaliser sur les produits, attribuable aux volumes élevés d’équipement achetés. Nous avons aussi constaté que la capacité de test des masques N95 avait été renforcée au Canada pendant cette période. Ainsi, le Conseil national de recherches du Canada s’est doté d’installations pour tester les masques N95 à Ottawa, et des contrats ont été passés avec des laboratoires privés et provinciaux en vue d’établir un réseau de laboratoires à l’échelle du pays et d’accroître la capacité globale de réalisation de tests.
Conclusion
10.113 Nous avons conclu que l’Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada et Services publics et Approvisionnement Canada avaient réussi à aider les gouvernements des provinces et des territoires à obtenir l’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux retenus aux fins de l’audit dont ils avaient besoin pendant la pandémie.
10.114 En raison de problèmes de longue date non réglés dans les systèmes et pratiques de gestion de la Réserve nationale stratégique d’urgence, l’Agence de la santé publique du Canada n’était pas aussi bien préparée qu’elle aurait pu l’être pour composer avec la hausse marquée des besoins des provinces et des territoires découlant de la pandémie de COVID‑19. Au cours de la pandémie, l’Agence a amélioré ses méthodes d’évaluation, d’attribution et de distribution de l’équipement de protection individuelle et des instruments médicaux. Par ailleurs, Santé Canada et l’Agence ont modifié leurs processus de demande des licences et de test, respectivement, afin de mieux répondre à la demande d’équipement accrue.
10.115 Dans des conditions de marché où l’offre n’était pas toujours à la hauteur de la demande, Services publics et Approvisionnement Canada a procédé à l’acquisition de quantités considérables d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux en mobilisant des ressources et en modifiant ses processus. Par ailleurs, pour livrer rapidement l’équipement aux provinces et aux territoires, le Ministère a accepté certains risques liés à l’approvisionnement.
À propos de l’audit
Le présent rapport de certification indépendant sur l’approvisionnement en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux a été préparé par le Bureau du vérificateur général du Canada. Notre responsabilité était de donner de l’information, une assurance et des avis objectifs au Parlement en vue de l’aider à examiner soigneusement la gestion que fait le gouvernement des ressources et des programmes, et d’exprimer une conclusion quant à la conformité de l’Agence de la santé publique du Canada, de Santé Canada et de Services publics et Approvisionnement Canada aux critères applicables, dans tous leurs aspects importants.
Tous les travaux effectués dans le cadre du présent audit ont été réalisés à un niveau d’assurance raisonnable conformément à la Norme canadienne de missions de certification (NCMC) 3001 — Missions d’appréciation directe de Comptables professionnels agréés du Canada (CPA Canada), qui est présentée dans le Manuel de CPA Canada — Certification.
Le Bureau du vérificateur général du Canada applique la Norme canadienne de contrôle qualité 1 et, en conséquence, maintient un système de contrôle qualité exhaustif qui comprend des politiques et des procédures documentées en ce qui concerne la conformité aux règles de déontologie, aux normes professionnelles et aux exigences légales et réglementaires applicables.
Lors de la réalisation de nos travaux d’audit, nous nous sommes conformés aux règles sur l’indépendance et aux autres règles de déontologie des codes de conduite pertinents applicables à l’exercice de l’expertise comptable au Canada, qui reposent sur les principes fondamentaux d’intégrité, d’objectivité, de compétence professionnelle et de diligence, de confidentialité et de conduite professionnelle.
Conformément à notre processus d’audit, nous avons obtenu ce qui suit de la direction de chaque entité :
- la confirmation de sa responsabilité à l’égard de l’objet considéré;
- la confirmation que les critères étaient valables pour la mission;
- la confirmation qu’elle nous a fourni toutes les informations dont elle a connaissance et qui lui ont été demandées ou qui pourraient avoir une incidence importante sur les constatations ou la conclusion contenues dans le présent rapport;
- la confirmation que les faits présentés dans le rapport sont exacts.
Objectif de l’audit
L’objectif de l’audit consistait à déterminer si l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada avaient pris des mesures, avant et pendant la pandémie de COVID‑19, pour aider à répondre aux besoins des gouvernements des provinces et des territoires en ce qui concerne certains articles d’équipement de protection individuelle et instruments médicaux, et si Services publics et Approvisionnement Canada avait apporté un soutien adéquat en matière d’approvisionnement.
Étendue et méthode
L’audit a porté sur les mesures prises par l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada pour aider à répondre aux besoins des gouvernements des provinces et des territoires en ce qui concerne les types d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux retenus aux fins de l’audit. L’audit a aussi porté sur les mesures prises par Services publics et Approvisionnement Canada pour faire l’acquisition de cet équipement.
Nous avons examiné les données concernant l’ensemble des mesures prises pour aider à répondre aux besoins des provinces et des territoires en matière d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux afin de comprendre le contexte et de pouvoir tirer une conclusion sur l’information échangée entre les organisations fédérales concernées et les provinces et les territoires. Toutefois, l’essentiel de notre analyse a visé les quatre types d’équipement retenus aux fins de la réalisation d’un examen détaillé : les masques N95, les blouses médicales, les écouvillons de dépistage et les ventilateurs.
Nous n’avons pas examiné les processus d’approvisionnement en équipement des organisations fédérales dont le volume et la valeur étaient beaucoup moins importants que ceux de l’équipement acheté pour aider à répondre aux besoins des gouvernements des provinces et des territoires.
Il faut noter que diverses circonstances et la disponibilité de certaines ressources qui ont influé sur la capacité de l’Agence de la santé publique du Canada d’aider à répondre aux besoins en matière d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux étaient indépendantes de la volonté de l’Agence pendant la pandémie. C’est le cas de la disponibilité et des prix de l’équipement au cours de cette période. Ces circonstances ont été prises en compte dans le cadre de l’audit. Nous avons évalué d’autres obstacles qui ont nui à la capacité de répondre aux besoins en matière d’équipement, comme la vitesse de propagation du virus ainsi que les difficultés logistiques rencontrées par l’Agence et les fonctionnaires.
En conjuguant des analyses de données, un échantillonnage représentatif et une revue détaillée de dossiers, nous avons examiné 39 contrats pour les articles d’équipement de protection individuelle et les instruments médicaux retenus aux fins de l’audit, qui ont été prélevés du système de gestion des données de Services publics et Approvisionnement Canada le 31 août 2020. Les contrats examinés avaient été amorcés entre le 1er janvier 2020 et le 31 août 2020 (ce qui comprend toutes les modifications et tous les changements apportés jusqu’au 31 décembre 2020). Les contrats ont été divisés selon les quatre types d’équipement examinés dans le cadre de l’audit. Nous avons choisi au hasard les contrats afin d’obtenir un échantillon représentatif de l’ensemble de la population. L’échantillon a été testé de manière à obtenir un niveau de confiance de 90 %, avec une marge d’erreur de 10 %. L’audit a contribué aux efforts du Canada à l’égard de la réalisation de l’objectif de développement durable des Nations Unies numéro 3 : « Bonne santé et bien-être ».
Critères
Pour déterminer si l’Agence de la santé publique du Canada et Santé Canada avaient pris des mesures, avant et pendant la pandémie de COVID‑19, pour aider à répondre aux besoins des gouvernements des provinces et des territoires en ce qui concerne certains articles d’équipement de protection individuelle et instruments médicaux, et si Services publics et Approvisionnement Canada avait apporté un soutien adéquat en matière d’approvisionnement, nous avons utilisé les critères suivants :
Critères | Sources |
---|---|
L’Agence de la santé publique du Canada gère la Réserve nationale stratégique d’urgence de manière à répondre aux besoins du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux et territoriaux, avant et pendant la pandémie. |
|
L’Agence de la santé publique du Canada évalue les besoins en équipement de protection individuelle et en instruments médicaux du gouvernement fédéral et des gouvernements provinciaux et territoriaux. L’Agence de la santé publique du Canada, en collaboration avec d’autres ministères et organismes fédéraux, attribue l’équipement en fonction des besoins. |
|
Santé Canada autorise les nouveaux équipements et les nouveaux fournisseurs. L’Agence de la santé publique du Canada effectue des examens d’assurance qualité de l’équipement acheté par Services publics et Approvisionnement Canada. |
|
La stratégie d’approvisionnement de Services publics et Approvisionnement Canada en équipement pour appuyer la lutte contre la COVID‑19 met l’accent sur les besoins et est mise en œuvre avec la diligence requise. |
|
Période visée par l’audit
L’audit a porté sur la période allant du 1er janvier 2020 au 31 août 2020. Il s’agit de la période à laquelle s’applique la conclusion de l’audit. Toutefois, afin de mieux comprendre l’objet considéré de l’audit, nous avons aussi examiné certains dossiers antérieurs à cette période. Cela concerne notamment notre examen de la Réserve nationale stratégique d’urgence.
Date du rapport
Nous avons fini de rassembler les éléments probants suffisants et appropriés à partir desquels nous avons fondé notre conclusion le 24 mars 2021, à Ottawa, au Canada.
Équipe d’audit
Directeur principal : Jean Goulet
Directeur : Milan Duvnjak
Meaghan Burnham
Paul Csagoly
Somen Dutta
Sébastien Labonté
Amanda Lapierre
Susan Ly
Yusuf Saibu
Ludovic Silvestre
Tableau des recommandations
Le tableau qui suit regroupe les recommandations et les réponses apparaissant dans le présent rapport. Le numéro qui précède chaque recommandation correspond au numéro du paragraphe de la recommandation dans le rapport. Les chiffres entre parenthèses correspondent au numéro des paragraphes où le sujet de la recommandation est abordé.
Évaluation des besoins et gestion de la Réserve fédérale
Recommandation | Réponse |
---|---|
10.38 L’Agence de la santé publique du Canada devrait élaborer et mettre en œuvre un plan exhaustif de gestion de la Réserve nationale stratégique d’urgence assorti d’échéanciers clairs, qui répond aux recommandations formulées dans ses audits internes antérieurs ayant trait à la Réserve fédérale, et tient compte des leçons tirées de la pandémie de COVID‑19. (10.34 à 10.37) |
Réponse de l’Agence — Recommandation acceptée. L’expérience de la COVID‑19 a fourni une expérience vécue d’une pandémie mondiale, comme on n’en avait pas vu en plus de cent ans. Tenant compte des politiques, des pratiques et des ressources existantes dont on a tiré profit pour orienter la réponse actuelle, les leçons apprises de la pandémie de la COVID‑19 vont éclairer la façon dont la Réserve nationale stratégique d’urgence sera gérée à l’avenir. L’Agence de la santé publique du Canada travaille actuellement sur un plan exhaustif avec des mesures et des cibles de rendement connexes pour la Réserve nationale stratégique d’urgence afin d’appuyer les réponses futures aux urgences en matière de santé publique. Ce plan visera des domaines clés, tels que l’optimisation de la gestion du cycle de vie du matériel, le renforcement de l’infrastructure et des systèmes, et la collaboration étroite avec les provinces et territoires et les autres partenaires clés afin de mieux définir les besoins de même que les rôles et les responsabilités. L’Agence va continuer à identifier et à mettre en œuvre des améliorations graduelles parallèlement à ses efforts en cours visant à lutter contre la COVID‑19. L’Agence prévoit compléter le plan exhaustif de gestion de la Réserve nationale stratégique d’urgence avec des échéanciers clairs de mise en œuvre dans l’année suivant la fin de la pandémie. |
10.51 L’Agence de la santé publique du Canada devrait faire respecter, comme il se doit, les modalités énoncées dans les contrats conclus avec des tierces parties prestataires de services d’entreposage et de soutien logistique (y compris le contrat à long terme signé en septembre 2020) en ce qui a trait à la présentation de données à jour, précises et complètes afin d’aider à gérer les stocks d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux. (10.47 à 10.50) |
Réponse de l’Agence — Recommandation acceptée. Depuis que les contrats à long terme ont été établis, l’Agence de la santé publique du Canada continue à travailler en étroite collaboration avec ses fournisseurs tiers de services d’entreposage et de logistique pour la prestation de données à jour, précises et complètes afin d’aider à contrôler les fournitures d’équipement de protection individuelle et d’instruments médicaux et si nécessaire, elle prendra les mesures appropriées pour appliquer les modalités de ces contrats. |
Approvisionnement en équipement et assurance de la qualité
Recommandation | Réponse |
---|---|
10.82 Santé Canada devrait déterminer si les appareils de protection respiratoire sont bien classés, étant donné que l’efficacité et la sûreté des instruments médicaux de classe I ne sont pas vérifiées par Santé Canada. (10.78 à 10.81) |
Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. Bien que Santé Canada réglemente actuellement les instruments médicaux en conformité avec un système de classification basé sur le risque, on pourrait prendre en considération la prestation d’une surveillance renforcée de précommercialisation pour certains instruments à plus faible risque. Santé Canada reconnaît les difficultés sous-jacentes au besoin de s’assurer que les exigences en matière de sécurité, d’efficacité et de qualité pour les respirateurs sont satisfaites dans des situations telles que la pandémie de la COVID‑19. En vertu du Règlement sur les instruments médicaux actuel, il n’est pas question d’effectuer une évaluation de précommercialisation pour les instruments médicaux de classe I. Toutefois, en vertu de l’approche de l’arrêté d’urgence, Santé Canada s’est vu accorder des flexibilités réglementaires qui ont permis des examens de précommercialisation des respirateurs. Les activités de surveillance de postcommercialisation, y compris les inspections et les évaluations scientifiques en vertu de l’arrêté d’urgence, ont permis à Santé Canada d’être davantage conscient du fait que des respirateurs de faible qualité peuvent accéder au marché canadien. Santé Canada va examiner en particulier la classification des instruments posant un risque plus faible, y compris les respirateurs, dans le cadre de l’élaboration des règlements agiles pour les instruments médicaux. Bien qu’elle vienne juste de débuter, cette initiative est en cours et permettra de déterminer si les respirateurs sont classifiés correctement. Santé Canada s’est engagé à explorer les différentes possibilités d’évaluer le niveau approprié de surveillance de précommercialisation de ces instruments. Une analyse des enjeux sera effectuée dans un délai d’un an suivant la fin de la pandémie. |
10.102 Services publics et Approvisionnement Canada devrait, lorsqu’il répond à des besoins urgents et accepte des risques liés à l’approvisionnement, vérifier la viabilité financière des fournisseurs avant d’attribuer des contrats qui comportent une clause de paiement anticipé. (10.97 à 10.101) |
Réponse du Ministère — Recommandation acceptée. L’audit a permis de constater que Services publics et Approvisionnement Canada a mobilisé son effectif et s’est adapté rapidement pour répondre aux besoins urgents des Canadiens et des Canadiennes en matière d’approvisionnement. L’acquisition des biens et des services nécessaires pour lutter contre la pandémie, en particulier au cours des 100 premiers jours (l’objet du présent audit), a été un effort constant dans un contexte sans précédent de chaînes d’approvisionnement mondiales extrêmement limitées. Cela a donné lieu à des défis, qu’il s’agisse d’exécuter des contrats en dehors des heures de travail normales, de s’occuper de la logistique ou d’entreprendre de nouvelles activités essentielles, comme la Réserve d’urgence pour les services essentiels. Le Ministère a établi des processus dès le début de la pandémie visant à assurer une surveillance et une diligence raisonnable, mais nous reconnaissons que nous pouvons toujours améliorer les processus d’approvisionnement et, dans le contexte des paiements anticipés, il s’agit notamment de procéder à des vérifications financières. Au cours de la dernière année, le Ministère a continuellement fait évoluer ses approches. À l’avenir, le Ministère continuera de mettre à jour ses processus liés aux approvisionnements d’urgence afin de tenir compte des leçons apprises dans le cadre de cet audit et d’autres exercices, tout en continuant d’accorder la priorité à la santé et à la sécurité des Canadiens et des Canadiennes. |