2023 — Rapports 1 à 5 du commissaire à l’environnement et au développement durable au Parlement du CanadaRapport 1 — Les forêts et les changements climatiques
Rapport de l’auditeur indépendant
Table des matières
- Introduction
- Constatations et recommandations
- Il est peu probable que Ressources naturelles Canada puisse planter 2 milliards d’arbres d’ici 2031 ou réaliser les réductions d’émissions prévues
- La conception du programme pourrait être améliorée
- L’incidence des forêts sur les émissions de gaz à effet de serre n’était pas communiquée efficacement de manière à appuyer la prise de décisions et la reddition de comptes
- Les activités de contrôle de la qualité et d’examen réalisées par Ressources naturelles Canada pour estimer les effets futurs des forêts étaient limitées
- Conclusion
- À propos de l’audit
- Recommandations et réponses
- Pièces :
- 1.1 — Cycle du carbone et réchauffement planétaire
- 1.2 — Plus de la moitié des activités de plantation en 2021 a eu lieu sur des terres publiques provinciales
- 1.3 — Ressources naturelles Canada accusait un retard par rapport à la plantation annuelle ciblée
- 1.4 — Ressources naturelles Canada ne s’attend pas à ce que le programme 2 milliards d’arbres capte les gaz à effet de serre avant 2031
- 1.5 — En 2021, 43 % des partenaires de projet ne s’étaient pas engagés à respecter un calendrier de surveillance précis
- 1.6 — Les rapports d’Environnement et Changement climatique Canada sur les émissions ne comprenaient pas les émissions attribuables aux feux de forêt ou aux perturbations causées par les insectes dans les émissions totales du pays
- 1.7 — Le brûlage à plat est une activité de gestion forestière qui n’était pas présentée séparément dans les rapports fédéraux
- 1.8 — Les estimations des émissions liées à l’utilisation des terres forestières dans les rapports d’inventaire national variaient considérablement d’un rapport à l’autre
Introduction
Contexte
1.1 Les changements climatiques sont généralement perçus comme l’une des menaces les plus sérieuses pour l’économie, la santé humaine et l’environnement naturel. Si nous ne parvenons pas à réduire les émissions de gaz à effet de serre et à nous adapter aux effets des changements climatiques, la population canadienne devra composer avec des conséquences néfastes et des risques accrus, notamment en raison du nombre de canicules et de feux de forêt.
1.2 La Conférence des Parties des Nations Unies, qui s’est tenue à Paris en 2015, a réuni le Canada et 194 autres pays pour signer l’Accord de Paris, un accord international sans précédent visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Les signataires se sont engagés à renforcer leurs efforts en vue de limiter la hausse de la température moyenne mondiale à moins de 2 degrés Celsius (°C), et préférablement à 1,5 °C, comparativement aux niveaux de température de l’époque préindustrielle.
1.3 En juillet 2021, le gouvernement du Canada s’est engagé à réduire les émissions du pays de 40 à 45 % par rapport au niveau de 2005, d’ici 2030. En mars 2022, le gouvernement a publié le Plan de réduction des émissions pour 2030 : prochaines étapes du Canada pour un air pur et une économie forte. Ce document décrivait les mesures que le gouvernement comptait prendre pour atteindre la cible établie pour 2030. Pour atteindre cette cible et respecter son engagement d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050, le Canada devra apporter divers changements dans de nombreux secteurs. Même si les forêts canadiennes pourraient contribuer à la réduction des concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre, cela ne devrait pas faire oublier l’urgence de réduire la combustion d’énergies fossiles (voir la pièce 1.1).
Pièce 1.1 — Cycle du carbone et réchauffement planétaire
Pièce 1.1 — version textuelle
Ce diagramme compare le cycle naturel du carbone des forêts aux émissions d’origine humaine provenant de la combustion d’énergies fossiles. Les arbres absorbent le dioxyde de carbone de l’atmosphère à mesure qu’ils grandissent et le rejettent dans l’atmosphère lorsqu’ils meurent et se décomposent. En comparaison, les émissions d’origine humaine provenant de la combustion d’énergies fossiles, comme les émissions des installations industrielles, ne font que rejeter du dioxyde de carbone dans l’atmosphère.
1.4 Le Canada a près de 362 millions d’hectares de forêts, ce qui en fait le troisième pays le plus boisé au monde. En 2020, le secteur forestier a apporté plus de 25 milliards de dollars au produit intérieur brut nominal du Canada (aux prix courants, non ajustés pour tenir compte de l’inflation). Pour cette raison, le Canada est bien placé pour être un chef de file sur la scène internationale en matière de solutions fondées sur la nature. Les solutions fondées sur la nature sont des mesures qui permettent de protéger, de restaurer et de gérer de manière durable les écosystèmes afin de produire des bienfaits comme le renforcement de la séquestration du carbone (le processus par lequel le dioxyde de carbone dans l’atmosphère est capté et stocké) et l’amélioration de la biodiversité. Le gouvernement s’est engagé pour la première fois en 2019 à recourir à des solutions fondées sur la nature dans sa lutte contre les changements climatiques.
1.5 Dans le cadre de cet engagement, le gouvernement fédéral a annoncé le Fonds pour des solutions climatiques naturelles en 2020. Le volet le plus important du Fonds est le programme 2 milliards d’arbres. Sur une période de 10 ans, soit de 2021 à 2031, le gouvernement prévoit investir jusqu’à 3,2 milliards de dollars dans la plantation d’arbres, principalement au moyen de partenariats à coûts partagés.
1.6 Ce programme a pour objectifs de capter le carbone afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre, d’améliorer la biodiversité et de favoriser le bien‑être humain. Les arbres seront plantés partout au Canada : sur des terres publiques provinciales, territoriales et fédérales, sur des terres autochtones, dans des villes et des collectivités et sur des terres privées, y compris des fermes.
1.7 Ressources naturelles Canada — Le Ministère est chargé de la conception et de la direction du programme 2 milliards d’arbres, ce qui comprend la préparation et la mise en œuvre des appels de propositions, l’évaluation des propositions, la négociation des accords de contribution avec les partenaires, la surveillance des résultats et la présentation d’information sur les résultats. Le Ministère établit aussi des estimations des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre attribuables au secteur forestier aux fins de présentation de rapports par le Canada sur les émissions de gaz à effet de serre du pays.
1.8 Environnement et Changement climatique Canada — Le Ministère est responsable au premier chef de la coordination et de la mise en œuvre du plan fédéral pour lutter contre les changements climatiques ainsi que de la présentation de rapports sur les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle nationale. Le Ministère appuie également Ressources naturelles Canada dans l’exécution du programme 2 milliards d’arbres, en réalisant des activités liées à la conservation de la biodiversité, comme la restauration de l’habitat d’espèces en péril et d’espèces d’intérêt.
Objet de l’audit
1.9 L’audit visait à déterminer si Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, avait adéquatement conçu et mis en œuvre le programme 2 milliards d’arbres et s’il avait estimé les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre antérieures et projetées attribuables au secteur forestier, et rendu compte de ces émissions, de manière crédible et transparente.
1.10 Cet audit est important parce qu’il n’existe pas de solution à la lutte contre les changements climatiques et à la perte de biodiversité qui ne prenne pas en compte les forêts. C’est pourquoi le rôle des forêts dans la lutte contre les changements climatiques est digne d’intérêt pour les parlementaires et la population canadienne. Ceux‑ci doivent avoir une vue d’ensemble claire, étayée par des mesures et des rapports rigoureux, des effets du secteur forestier sur les changements climatiques ainsi que des résultats des investissements fédéraux dans les solutions fondées sur la nature concernant les forêts.
1.11 La section intitulée À propos de l’audit, à la fin du présent rapport, donne des précisions sur l’objectif, l’étendue, la méthode et les critères de l’audit.
Constatations et recommandations
Il est peu probable que Ressources naturelles Canada puisse planter 2 milliards d’arbres d’ici 2031 ou réaliser les réductions d’émissions prévues
1.12 Cette constatation est importante parce que l’engagement pris par le Canada de planter 2 milliards d’arbres est déterminant pour s’attaquer à la double crise des changements climatiques et de la perte de biodiversité en permettant de capter le carbone, d’améliorer la biodiversité et de favoriser le bien‑être humain.
1.13 Le programme 2 milliards d’arbres a d’abord été annoncé dans le discours du Trône de 2019. Ressources naturelles Canada a reçu un financement pour mettre sur pied le programme en février 2021. Pour soutenir son objectif global de planter 2 milliards d’arbres supplémentaires, Ressources naturelles Canada a établi des estimations du nombre d’arbres à planter pour chacune des dix années du programme. Au moment de notre audit, le programme en était à sa deuxième année.
1.14 Le Ministère a réparti le financement entre cinq volets :
- provinces et territoires — 1,35 milliard de dollars pour la plantation d’environ 1,34 milliard d’arbres;
- terres privées — 660 millions de dollars pour la plantation d’environ 500 millions d’arbres;
- initiatives dirigées par des Autochtones — 500 millions de dollars pour la plantation d’environ 180 millions d’arbres;
- terres urbaines — 500 millions de dollars, pour la plantation d’environ 5 à 7 millions d’arbres;
- terres fédérales — 50 millions de dollars, pour la plantation de moins d’un million d’arbres (environ).
1.15 Par l’entremise de ces volets, le Ministère soutient les activités de plantation d’arbres dont les coûts sont partagés avec les partenaires. Les partenaires autochtones peuvent bénéficier d’un soutien avec un ratio de partage des coûts plus élevé dans le cadre de l’un ou l’autre de ces volets. Certains groupes, comme les partenaires autochtones, les organismes à but non lucratif et les municipalités, peuvent aussi recevoir des subventions pour soutenir le renforcement des capacités, sans l’obligation de partager les coûts. Pour la plupart des projets financés, le Ministère avait préconisé les appels de propositions comme approche de sollicitation des demandes.
La cible de plantation pour 2021 avait presque été atteinte
1.16 Nous avons constaté qu’en 2021, soit au cours de la première année du programme 2 milliards d’arbres, Ressources naturelles Canada avait examiné et approuvé des projets conformément à la conception du programme. Le Ministère avait financé 72 projets, et les partenaires du programme avaient planté 28,9 millions (96,3 %) d’arbres sur les 30 millions que le Ministère avait estimé devoir planter (voir la pièce 1.2). Plus de 150 espèces avaient été plantées dans plus de 500 sites partout au Canada, car de nombreux projets visaient à planter des arbres dans divers sites. Toutefois, le nombre d’arbres plantés ne correspondait qu’à 1,5 % de l’objectif prévu du programme, soit de planter 2 milliards d’arbres sur dix ans.
Pièce 1.2 — Plus de la moitié des activités de plantation en 2021 a eu lieu sur des terres publiques provinciales
Volet ou mécanisme de financement | Nombre de projets | Nombre d’arbres plantés | Total d’hectares plantés |
---|---|---|---|
Provinces et territoires | 8 | 15 882 000 | 9 634 |
Terres privées | 34 | 4 764 000 | 3 247 |
Projets dirigés par des AutochtonesNote 1 | 9 | 7 796 000 | 5 223 |
Terres urbaines | 15 | 329 000 | 363 |
Terres fédérales | 2 | 141 000 | 294 |
SubventionsNote 2 | 4 | 6 000 | 3 |
TOTAL | 72 | 28 918 000 | 18 764 |
Source : Adapté de données fournies par Ressources naturelles Canada
1.17 Nous avons constaté que dans la première année du programme, 9 projets sur 72 étaient dirigés par des Autochtones et que 4 autres organisations autochtones avaient reçu des subventions. Près de 7,8 millions d’arbres (soit presque 27 % du total) avaient été plantés, dans le cadre de ces projets, sur plus de 5 000 hectares.
La cible de plantation pour 2022 n’avait pas été atteinte
1.18 Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada n’arriverait probablement pas à planter, au cours de l’exercice 2022‑2023, les 60 millions d’arbres qu’il avait estimé devoir planter. Le Ministère avait reçu plus de 200 demandes dans le cadre des volets de plantation d’arbres et de renforcement des capacités du programme 2 milliards d’arbres en réponse à son appel de propositions de décembre 2021. L’appel de propositions de décembre 2021 n’était pas ouvert aux provinces ni aux territoires. Le Ministère avait d’abord prévu de commencer à signer des accords à compter de mai 2022.
1.19 Nous avons constaté qu’à la fin de la période visée par l’audit, le Ministère avait signé 23 accords (certains étant des accords pluriannuels) avec des partenaires sélectionnés à la suite de l’appel de propositions de décembre 2021, pour la plantation de 1,7 million d’arbres, et 5 accords avec des partenaires fédéraux, pour la plantation de 424 000 arbres en 2022. Au 31 octobre 2022, 71 accords supplémentaires avec des partenaires n’avaient pas encore été signés. De plus, le Ministère avait permis que 5 projets de 2021, visant la plantation de 1,1 million d’arbres, se poursuivent en 2022. Le nombre définitif d’arbres plantés à l’été 2022 sera disponible après mai 2023. Nous avons constaté que, si tous les accords signés avaient été mis en œuvre, les partenaires auraient été tenus de planter 16,5 millions d’arbres en 2022, pour un total de 2,3 % de l’objectif global de 2 milliards d’arbres plantés, dans les deux premières années du programme (voir la pièce 1.3).
Pièce 1.3 — Ressources naturelles Canada accusait un retard par rapport à la plantation annuelle ciblée
Source : Adapté de renseignements de Ressources naturelles Canada
Pièce 1.3 — version textuelle
Ce diagramme à barres indique le nombre réel d’arbres plantés en 2021, le nombre prévu d’arbres à planter en 2022 et le nombre estimé d’arbres à planter de 2021 à 2030. Le nombre final d’arbres plantés à l’été 2022 sera connu après mai 2023. Les prévisions représentent le nombre prévu d’arbres à planter si les ententes signées avant la fin de notre période d’audit avaient été mises en œuvre. Le nombre estimé d’arbres à planter augmente considérablement de 2023 à 2027, puis demeure stable jusqu’en 2029 et diminue légèrement en 2030.
En 2021, le nombre réel d’arbres plantés était de 28,9 millions, et le nombre estimé d’arbres à planter était de 30 millions.
En 2022, le nombre estimé d’arbres à planter était de 60 millions, et le nombre prévu d’arbres à planter était de 16,5 millions.
En 2023, le nombre estimé d’arbres à planter était de 60 millions.
En 2024, le nombre estimé d’arbres à planter était de 100 millions.
En 2025, le nombre estimé d’arbres à planter était de 200 millions.
En 2026, le nombre estimé d’arbres à planter était de 290 millions.
En 2027, 2028 et 2029, le nombre estimé d’arbres à planter était de 320 millions.
En 2030, le nombre estimé d’arbres à planter était de 300 millions.
1.20 Les retards dans la signature des accords ont non seulement entravé la capacité de Ressources naturelles Canada à planter le nombre estimé d’arbres pour 2022, mais ils auront aussi une incidence sur les années subséquentes, pour lesquelles des objectifs de plantation encore plus ambitieux ont été établis. En date d’octobre 2022, nous avons constaté que si tous les accords signés avec tous les partenaires étaient mis en œuvre, le programme devrait permettre de planter 76,2 millions d’arbres à la fin du programme, ce qui représente 3,8 % de l’objectif global de 2 milliards d’arbres.
Il est peu probable que les réductions d’émissions prévues soient réalisées
1.21 Nous avons constaté que les projections de Ressources naturelles Canada en date de septembre 2022 montraient que le Ministère ne s’attendait pas à réaliser les réductions de gaz à effet de serre annuelles ou à long terme prévues dans le cadre du programme 2 milliards d’arbres. Les cibles du Ministère, fixées au début du programme, comprenaient une réduction des émissions allant jusqu’à 2 mégatonnes d’équivalent en dioxyde de carboneDéfinition 1 (Mt éq. CO2) par année d’ici 2030, et jusqu’à 11 à 12 Mt éq. CO2 par année d’ici 2050.
1.22 Toutefois, Ressources naturelles Canada estimait que les activités du programme seraient une source d’émissions nettes de gaz à effet de serre jusqu’en 2031. En 2030, ces émissions seraient de 0,1 Mt éq. CO2, alors qu’en 2050, il y aurait une absorption nette de 4,3 Mt éq. CO2. Cette évolution s’explique du fait que les émissions initiales produites par les activités de préparation du site et de plantation seront ensuite compensées à mesure que les arbres grandissent et que leur capacité de captage des gaz à effet de serre augmente (voir la pièce 1.4).
Pièce 1.4 — Ressources naturelles Canada ne s’attend pas à ce que le programme 2 milliards d’arbres capte les gaz à effet de serre avant 2031
Source : Adapté de renseignements de Ressources naturelles Canada
Pièce 1.4 — version textuelle
Ce graphique pour les années 2021 à 2050 montre que le programme 2 milliards d’arbres devrait être une source nette d’émissions de gaz à effet de serre pendant une dizaine d’années à partir du moment où les arbres seront plantés en 2021 jusqu’en 2031. Lorsque la plantation sera terminée en 2031 et que les arbres continueront à pousser, le programme devrait devenir un puits d’émissions.
En 2021, les arbres plantés devraient libérer 0,00224 mégatonne nette d’équivalent de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. Les émissions des arbres devaient augmenter à 0,37 mégatonne en 2025 et 2026, puis diminuer à 0,1 mégatonne en 2030.
En 2031, les arbres plantés devraient capter 0,23 mégatonne nette d’équivalent de dioxyde de carbone dans l’atmosphère. On prévoit que les arbres capteront une quantité de plus en plus grande de gaz à effet de serre chaque année, qui atteindra environ 4,3 mégatonnes en 2050.
1.23 Ressources naturelles Canada examine s’il convient de permettre aux partenaires du programme de participer à des régimes de crédits compensatoires pour les gaz à effet de serre, ce qui pourrait avoir pour effet de réduire encore plus les bienfaits attendus du programme en matière d’émissions de gaz à effet de serre. Selon l’approche proposée par le Ministère, si un projet satisfaisait aux règles d’un régime de crédits compensatoires, un partenaire ayant reçu des fonds fédéraux destinés à la plantation d’arbres dans le cadre de ce projet pourrait vendre un crédit pour la plantation de ces mêmes arbres. Un acheteur, comme une installation industrielle, pourrait alors utiliser ce crédit, entre autres, pour se conformer aux dispositions de systèmes de tarification de la pollution par le carbone pour grands émetteurs au lieu de réduire les émissions à l’installation. À notre avis, le fait d’autoriser la participation des partenaires à des régimes de crédits compensatoires pourrait fausser l’évaluation des progrès accomplis, puisque les crédits compensatoires pourraient être achetés pour planter des arbres qui auraient été plantés de toute façon, et pourrait compromettre l’ensemble des efforts du Canada visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre.
La conception du programme pourrait être améliorée
1.24 Cette constatation est importante parce que le programme 2 milliards d’arbres, d’après sa conception, repose sur la solidité des partenariats établis partout au Canada pour la réalisation de son objectif de plantation d’arbres. De plus, pour savoir si les objectifs du programme ont été atteints, il faut assurer une surveillance à long terme de la survie et de la santé des arbres plantés. Il importe que Ressources naturelles Canada exerce une surveillance de la plantation d’arbres dans son ensemble et établisse des rapports globaux afin de veiller à la réalisation de tous les bienfaits du programme pour les générations futures.
1.25 En plus de réduire les gaz à effet de serre, la plantation d’arbres peut :
- améliorer la biodiversité, par exemple en fournissant un habitat essentiel à de nombreuses espèces, y compris à des espèces en péril;
- contribuer à la santé physique et mentale des humains;
- accroître la résilience des forêts aux changements climatiques.
1.26 Pour estimer l’incidence sur les gaz à effet de serre qu’aura la plantation de deux milliards d’arbres et en rendre compte, Ressources naturelles Canada a affirmé que le Ministère surveillerait et vérifierait la plantation d’arbres et qu’il établirait des processus pour vérifier les activités de ses partenaires et en surveiller les résultats. Une telle vérification est nécessaire pour s’assurer que les estimations de l’absorption du carbone tiennent compte de la survie des arbres et pour déterminer les endroits où la plantation d’arbres de remplacement pourrait être requise.
Les activités de mobilisation et l’identification des risques
1.27 Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada avait tenu des séances de mobilisation et sollicité de l’information auprès de parties prenantes et de partenaires potentiels au début du programme 2 milliards d’arbres. Cela avait orienté la conception du programme en permettant au Ministère de mieux comprendre les besoins et les préoccupations des partenaires et d’identifier les risques. Nous avons constaté que le Ministère avait effectué une analyse comparative entre les sexes plusDéfinition 2, qui a également éclairé la conception du programme. Le Ministère avait inclus des critères de diversité et d’inclusion dans le processus de demande et pris en considération la représentation des Autochtones dans la conception du programme.
1.28 Nous avons également constaté que le Ministère avait modifié le programme en réponse aux leçons qu’il avait tirées de la première année du programme. Le Ministère avait recensé des lacunes, telles que l’absence de directives claires sur des éléments précis de la demande de financement et le court délai de soumission des propositions. Le Ministère a modifié le programme pour corriger un certain nombre de ces lacunes.
Les partenariats à long terme faisaient défaut ou accusaient du retard
1.29 Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada n’avait toujours pas signé d’accords de projet à long terme avec les provinces ou les territoires. Comme le Ministère avait conçu le programme 2 milliards d’arbres en s’attendant à ce que 67,5 % de tous les fonds du programme soient utilisés par les provinces et les territoires (pour planter 1,34 milliard d’arbres), l’absence d’accords constituait un risque considérable pour le programme.
1.30 Ressources naturelles Canada a souligné l’importance d’établir des accords à long terme. De tels accords permettraient une planification à long terme, offriraient une assurance aux pépinières produisant les semis et aideraient les partenaires à attirer et à maintenir en poste le personnel nécessaire. Le Ministère a conçu le programme de telle sorte qu’il s’appuie sur les propositions de projets pour comprendre les capacités des partenaires, les risques attendus des projets et les mesures d’atténuation proposées. Nous avons constaté que cet aspect de la conception du programme influait sur la capacité du Ministère à planifier à long terme, surtout en l’absence d’accords à long terme.
1.31 Par exemple, nous avons constaté qu’il y avait un risque qu’il n’y ait pas assez de semis pour pouvoir planter 2 milliards d’arbres. Le programme nécessitera d’accroître la demande en semis de jusqu’à 350 millions de semis par année. Les pépinières canadiennes qui ont été sondées par le Ministère ont indiqué qu’elles auraient besoin de jusqu’à deux ans de préparation avant de pouvoir planter des semences, et de un à huit ans de plus avant que les semis ne soient prêts à être plantés. Les pépinières ont également indiqué qu’elles n’investiraient pas dans la production de semis sans une garantie d’achat de ces semis. Le Ministère comptait sur l’établissement d’accords à long terme avec des partenaires importants dès le début du programme pour fournir aux pépinières l’assurance nécessaire. Or, aucun accord de ce genre n’a été signé avec les provinces et les territoires.
1.32 En décembre 2021, le Ministère a établi une nouvelle exigence pour les provinces et les territoires, soit l’obligation de signer une « entente de principe » avant de pouvoir soumettre des propositions de projet, en partie pour démontrer un engagement commun à long terme à l’égard de la plantation d’arbres et de l’amélioration de la biodiversité. Cette exigence a eu pour effet de suspendre la soumission des propositions de projets par les provinces et les territoires pour toute l’année de plantation 2022. À la fin de la période visée par l’audit, Ressources naturelles Canada avait signé quatre ententes de principe, et une province avait indiqué qu’elle ne signerait pas d’entente.
1.33 Même si Ressources naturelles Canada a théoriquement alloué des fonds aux provinces et aux territoires sur les dix années du programme, certaines administrations ont laissé entendre qu’elles pourraient limiter les ententes à quelques années, selon leur capacité de verser un financement de contrepartie. Même si le Ministère peut réaffecter des fonds entre les différents volets du programme, il n’a pas documenté de stratégie pour atténuer l’incidence d’un manque de participation des provinces ou des territoires.
1.34 Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada avait élaboré des plans détaillés jusqu’en 2023, mais que le Ministère n’avait pas de plan stratégique à long terme décrivant la façon dont le programme serait mis en œuvre en vue d’atteindre les objectifs de plantation établis ou les cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2031 et 2050.
1.35 Selon des responsables de Ressources naturelles Canada, le Ministère prévoit examiner d’autres lacunes et modifier l’exécution du programme après avoir reçu les propositions de projets pluriannuels. En décembre 2022, pour accélérer la signature des accords à long terme, le Ministère a commencé à accepter les propositions de manière continue plutôt que dans le cadre d’appels de propositions annuels. Toutefois, à notre avis, si les retards dans l’établissement d’accords à long terme persistent et qu’aucune autre mesure précise n’est établie, le Ministère n’atteindra pas son objectif de planter 2 milliards d’arbres d’ici 2031.
1.36 Pour veiller à l’atteinte des objectifs de plantation du programme 2 milliards d’arbres, Ressources naturelles Canada devrait :
- documenter clairement la façon dont le programme sera mis en œuvre en vue d’atteindre ses objectifs de plantation et ses cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2031 et 2050;
- élaborer rapidement des mesures précises pour gérer le manque d’accords à long terme avec des partenaires de projet.
Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée.
Les réponses détaillées se trouvent dans les Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
L’absence d’obligation quant à la surveillance à long terme des arbres plantés
1.37 Permanence des arbres plantés — Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada n’avait pas exigé que les arbres plantés dans le cadre du programme 2 milliards d’arbres demeurent dans le sol à long terme. Les raisons étaient multiples. Notons par exemple que le fait de vouloir contrôler à long terme l’aménagement des terres des partenaires pourrait réduire les taux de participation au programme et que le Ministère ne disposait d’aucun mécanisme pour assurer la permanence de quelque activité que ce soit sur des terres qui ne lui appartiennent pas. La permanence était une question controversée soulevée par les parties prenantes et les partenaires. Certaines personnes défendaient l’instauration d’une exigence à cet égard, alors que d’autres s’y opposaient.
1.38 Surveillance à long terme — Nous avons constaté que pour la première année de plantation, soit 2021, le Ministère n’avait pas clairement défini ses attentes en matière de surveillance de la santé et de la survie des arbres plantés. C’est pourquoi 43 % des partenaires de projet (31 sur 72) en 2021 ne s’étaient pas engagés à respecter un calendrier de surveillance précis (voir la pièce 1.5). Depuis, le Ministère a demandé à tous les demandeurs de fournir des plans de surveillance pour une période indéterminée au‑delà de la période visée par les accords.
Pièce 1.5 — En 2021, 43 % des partenaires de projet ne s’étaient pas engagés à respecter un calendrier de surveillance précis
Engagement des partenaires de projet en matière de surveillance | Nombre de projets |
Pourcentage de projets |
---|---|---|
5 ans ou moins | 21 | 29 % |
Jusqu’à la fin du programme 2 milliards d’arbres (période de 10 ans) | 8 | 11 % |
Au‑delà de la durée du programme | 4 | 6 % |
Aucun calendrier de surveillance précis n’avait été fourni | 31 | 43 % |
Aucun engagement, car aucun arbre n’avait été planté | 8 | 11 % |
Total | 72 | 100 % |
Source : Adapté de données fournies par Ressources naturelles Canada
1.39 Pour les projets qui ont commencé au cours de l’année de plantation 2021, Ressources naturelles Canada avait indiqué qu’il n’effectuerait aucun suivi auprès des partenaires pour ce qui est de la surveillance après la fin du contrat. Or, sans la surveillance de la santé et de la survie des arbres, au moins jusqu’à la fin du programme, il n’est pas certain que le Ministère puisse rendre compte de façon exhaustive des résultats du programme, qui sont censés contribuer au respect de l’engagement du Canada d’atteindre la carboneutralité d’ici 2050.
1.40 Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada avait prévu des processus de vérification (comme la vérification des rapports des partenaires et la visite de sites) dans ses accords avec les partenaires privés et ceux des provinces et des territoires, mais pas dans ses accords avec les partenaires fédéraux. Nous avons aussi constaté que le Ministère n’avait documenté aucun plan décrivant la façon dont il prévoyait effectuer les visites des sites pour vérifier les résultats et qu’il n’avait pas encore pris de mesures pour vérifier les travaux des partenaires sur le terrain. Même si le Ministère avait obtenu des renseignements pour appuyer la surveillance future des résultats au moyen de la télédétection ou d’autres méthodes, il n’avait pas encore dressé de plan de surveillance.
1.41 Mesure du rendement — Nous avons constaté que Ressources naturelles Canada avait élaboré un total de 19 indicateurs pour les 3 résultats de programme attendus : la réduction des émissions de gaz à effet de serre, la réalisation de bienfaits environnementaux et le soutien du bien‑être humain. Le Ministère prévoyait rendre compte des résultats du programme au regard de la plupart de ces indicateurs dans ses rapports ministériels sur les résultats, et ce, dès 2022. Toutefois, nous avons constaté que le Ministère n’avait pas encore élaboré de cibles définitives pour 7 de ces 19 indicateurs, y compris les indicateurs liés à la biodiversité et à l’environnement, et qu’il n’avait défini aucune cible intermédiaire pour 3 des indicateurs.
1.42 Nous avons également constaté que pour 12 indicateurs assortis de cibles intermédiaires sur 16, Ressources naturelles Canada n’avait pas défini de cibles quantitatives annuelles permettant d’atteindre les cibles définitives. Par exemple, la cible annuelle établie en vue d’atteindre l’objectif de planter 2 milliards d’arbres indique une « augmentation annuelle ». À notre avis, si le Ministère ne fixe pas de cibles annuelles quantitatives, il ne pourra pas être tenu de rendre compte des progrès annuels réalisés en vue de planter 2 milliards d’arbres.
1.43 Pour veiller à ce que Ressources naturelles Canada atteigne les objectifs du programme 2 milliards d’arbres, y compris ses cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2031 et 2050, le Ministère devrait se doter :
- d’un plan de surveillance à long terme pour évaluer la santé et la survie des arbres plantés dans le cadre du programme;
- de cibles quantitatives intermédiaires et définitives claires pour les indicateurs de rendement du programme.
Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée.
Les réponses détaillées se trouvent dans le tableau Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
Les bienfaits pour la biodiversité pourraient être améliorés
1.44 Nous avons constaté que, pendant la saison de plantation de 2021, Ressources naturelles Canada avait financé plus de 270 sites en monoculture (c’est‑à‑dire des sites où l’on plante une seule espèce), d’une superficie totale de 3 136 hectares. De ce nombre, 78 comptaient plus de 10 000 arbres. Ces plantations en monoculture représentaient 14,4 % du total des arbres plantés en 2021 dans le cadre du programme 2 milliards d’arbres. Les plantations en monoculture séquestrent effectivement le carbone et pourraient convenir dans certains habitats. Cependant, dans la grande majorité des circonstances, les plantations en monoculture ne favorisent pas la biodiversité et ne produisent d’autres bienfaits pour l’environnement et le bien‑être humain au même titre que les plantations diversifiées. Nous avons constaté que le Ministère n’avait établi aucune directive ni aucune restriction précise pour les demandeurs en ce qui a trait à la plantation en monoculture.
1.45 Nous avons constaté qu’en mars 2022, Environnement et Changement climatique Canada avait fourni à Ressources naturelles Canada de l’information pour orienter les discussions entre le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux et territoriaux sur les sites potentiels pour la plantation d’arbres qui permettraient de maximiser les bienfaits pour la conservation. Il s’agissait notamment de renseignements sur les lieux et les espèces prioritaires du Canada ainsi que sur l’habitat essentiel d’espèces en péril et d’oiseaux. Toutefois, ces renseignements n’ont pas été fournis aux partenaires dans le cadre des autres volets de financement (comme les volets visant les terres urbaines ou les terres privées), même s’ils auraient pu servir à tous les participants au programme pour les aider à cibler leurs activités de plantation de manière optimale.
1.46 Ressources naturelles Canada a jugé que la restauration des habitats était plus coûteuse que la plantation d’arbres typique, principalement en raison de la difficulté d’accès aux sites éloignés, des conditions de croissance difficiles et de la préparation des sites qui exige des ressources importantes. Le Ministère a établi un ratio de partage des coûts plus élevé (60 % des coûts assumés par le gouvernement fédéral) pour la restauration des habitats des espèces en péril et des espèces d’intérêt pour les provinces et les territoires. Toutefois, le Ministère, dans sa conception du programme, n’a pas défini, pour les autres volets, d’éléments de financement propres à la restauration des habitats, ce qui aurait pu encourager tous les partenaires à réaliser ce type de travaux.
1.47 Pour renforcer les bienfaits à long terme liés à la biodiversité et à la restauration des habitats découlant du programme 2 milliards d’arbres et pour contribuer aux objectifs en matière de biodiversité du Canada, Ressources naturelles Canada devrait :
- élaborer des critères pour les projets de plantation en monoculture pour veiller à ce que ces projets ne nuisent pas aux objectifs en matière de biodiversité;
- mettre à la disposition de tous les partenaires des lignes directrices et un soutien propres à la biodiversité et aux besoins en matière d’habitats;
- offrir des mesures incitatives pour encourager les travaux de restauration des habitats dans le cadre de tous les volets de financement;
- tirer parti de l’information fournie par Environnement et Changement climatique Canada afin d’améliorer la présentation de rapports sur les bienfaits du programme pour la biodiversité.
Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée en partie.
Les réponses détaillées se trouvent dans les Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
L’incidence des forêts sur les émissions de gaz à effet de serre n’était pas communiquée efficacement de manière à appuyer la prise de décisions et la reddition de comptes
1.48 Cette constatation est importante parce que des renseignements exacts et cohérents sur les émissions de gaz à effet de serre liées aux forêts peuvent soutenir l’élaboration de politiques et aider les parties prenantes et les décisionnaires à évaluer les progrès réalisés et à déterminer si des modifications ou d’autres mesures sont nécessaires.
1.49 Ressources naturelles Canada a élaboré un système, qui est fondé sur des modèles qui intègrent des données provenant de diverses sources, pour estimer les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre dans les forêts canadiennes. Ces modèles et les estimations qui en découlent sont utilisés pour étayer les rapports du Canada à l’échelle nationale et internationale. L’établissement d’estimations des émissions et des absorptions de carbone pour les forêts canadiennes est un travail très complexe et spécialisé.
1.50 Environnement et Changement climatique Canada présente des rapports sur les émissions de gaz à effet de serre du pays à la population canadienne et à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. L’un des objectifs de la modélisation et des rapports afférents est d’acquérir une compréhension de l’incidence des activités humaines, comme la plantation d’arbres ou la modification de la gestion forestière, sur les émissions. Toutefois, d’autres facteurs qui ne sont peut‑être pas directement liés aux activités humaines peuvent rendre les résultats ambigus.
1.51 Par exemple, en raison des changements climatiques, on s’attend à ce que les feux de forêt au Canada soient de plus en plus importants et fréquents. Les forêts du Canada sont en train de devenir une source nette d’émissions en raison des feux de forêt et des perturbations causées par les épidémies d’insectes, notamment le dendroctone du pin argenté. Au cours des dernières années, les feux de forêt et les perturbations causées par les insectes ont entraîné la libération de plus de 200 Mt éq. CO2 par année dans l’atmosphère. Par exemple, en 2018, les émissions attribuables à ces perturbations auraient ajouté 26 % aux émissions totales du pays. Les importantes variations d’année en année des émissions associées aux feux de forêt ou à d’autres perturbations font qu’il est difficile d’avoir une image claire de l’incidence des activités humaines à partir des données globales. Les lignes directrices du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations Unies permettent aux pays d’exclure les feux de forêt et les perturbations causées par les insectes afin de mieux préciser les tendances résultant de l’activité humaine. Par conséquent, le Canada exclut ces émissions de ses rapports nationaux (voir la pièce 1.6).
Pièce 1.6 — Les rapports d’Environnement et Changement climatique Canada sur les émissions ne comprenaient pas les émissions attribuables aux feux de forêt ou aux perturbations causées par les insectes dans les émissions totales du pays
Source : Adapté de renseignements de Ressources naturelles Canada
Pièce 1.6 — version textuelle
Ce graphique compare les émissions déclarées de gaz à effet de serre produites par les forêts avec les émissions réelles de gaz à effet de serre provenant des forêts, ce qui comprend les feux de forêt et les dommages causés par les insectes, de 1990 à 2019. Lorsque les émissions provenant des feux de forêt et des dommages causés par les insectes sont incluses dans le total des émissions des terres forestières, on observe d’importantes fluctuations des émissions. Les émissions provenant des forêts comprennent les terres forestières gérées à des fins de production de bois, de conservation ou d’extinction de feux. Selon les chiffres déclarés, les forêts ont contribué à retirer des émissions de l’atmosphère pendant toute la période, tandis que les chiffres réels montrent que les forêts ont ajouté des émissions dans l’atmosphère la plupart du temps de 2014 à 2019.
Selon les émissions déclarées, en 1990, les forêts ont retiré environ 201 mégatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone de l’atmosphère. Par la suite, la quantité d’émissions retirées grâce aux forêts a graduellement diminué, s’établissant à environ 133 mégatonnes en 2005, puis elle est demeurée entre 131 et 143 mégatonnes jusqu’en 2019.
Les émissions réelles, qui comprennent les feux de forêt et les dommages causés par les insectes, ont connu d’importantes fluctuations. En 1990, selon les émissions réelles, les forêts ont retiré environ 226 mégatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone de l’atmosphère. Les forêts ont retiré 250 mégatonnes en 1992, puis 13 mégatonnes en 1995. Elles ont retiré 227 mégatonnes en 1997, 29 mégatonnes en 1998, 209 mégatonnes en 2000, 29 mégatonnes en 2002, 64 mégatonnes en 2003, 6 mégatonnes en 2004, 78 mégatonnes en 2005, 95 mégatonnes en 2008, 1 mégatonne en 2011 et 41 mégatonnes en 2016.
Selon les émissions réelles, en 2014, les forêts ont ajouté 12 mégatonnes d’émissions dans l’atmosphère. Elles ont ajouté 102 mégatonnes en 2015, 98 mégatonnes en 2018 et 11 mégatonnes en 2019. Ces chiffres contrastent avec les émissions déclarées, qui montrent que les forêts ont retiré des émissions de l’atmosphère au lieu d’en ajouter.
1.52 Environnement et Changement climatique Canada produit deux types de rapports :
- les rapports sur les émissions et les absorptions antérieures, appelés « rapports d’inventaire national », qui présentent les estimations des émissions et des absorptions annuelles depuis 1990;
- les rapports sur les projections des émissions de gaz à effet de serre, publiés en tant que rapports sur les projections des émissions ou en tant que rapports biennaux, qui présentent les émissions prévues jusqu’en 2030.
Dans ces rapports, Environnement et Changement climatique Canada utilise les estimations de Ressources naturelles Canada concernant les émissions et les absorptions des forêts et des produits ligneux récoltés.
1.53 De plus, selon la Loi canadienne sur la responsabilité en matière de carboneutralité, le ministre de l’Environnement et du Changement climatique a la responsabilité de publier des plans en vue d’atteindre les cibles de réduction des émissions, comme le Plan de réduction des émissions pour 2030 publié en mars 2022. Le ministre doit également publier des rapports d’étape et des rapports d’évaluation qui présentent la façon dont les mesures et les stratégies décrites dans les plans, y compris les solutions fondées sur la nature, ont contribué à l’atteinte des cibles pertinentes de réduction des émissions.
Un manque de transparence à l’égard de l’incidence des activités humaines sur les émissions des forêts
1.54 Nous avons constaté que l’information produite par Environnement et Changement climatique Canada et par Ressources naturelles Canada visait principalement à respecter les obligations internationales en matière de rapports et non à informer d’autres décisionnaires importants des secteurs public et privé. Par exemple, même si Ressources naturelles Canada offrait un soutien aux utilisateurs de l’information, comme les provinces et les organisations environnementales, pour les aider à évaluer l’efficacité des mesures ou les options d’atténuation, cette information n’était pas diffusée à grande échelle. Les résultats de ces évaluations étaient généralement adaptés aux utilisateurs ou limités aux publications scientifiques.
1.55 Nous avons constaté que le gouvernement avait plusieurs possibilités d’améliorer l’information sur les émissions des forêts afin de soutenir la reddition de comptes et la prise de décisions, et ainsi d’accroître l’efficience de la modélisation du gouvernement pour les émissions de gaz à effet de serre.
1.56 Le Plan de réduction des émissions — Nous avons constaté qu’Environnement et Changement climatique Canada n’avait pas communiqué de manière transparente l’incidence que les activités humaines sur les terres forestières ont sur les émissions de gaz à effet de serre. Par exemple, nous avons constaté que le Plan de réduction des émissions pour 2030 manquait de transparence et d’uniformité dans la communication de l’information sur les solutions fondées sur la nature, qui comprennent souvent des mesures liées aux forêts. Selon le Plan, la contribution attendue des solutions fondées sur la nature à l’atteinte de la cible de 2030 du Canada est de 30 Mt éq. CO2, mais ailleurs dans le Plan, cette valeur peut être établie à 6 Mt éq. CO2. Le Plan ne précise pas la méthode utilisée par le Ministère pour estimer ces contributions. Nous avons constaté que ces estimations étaient principalement fondées sur une revue des publications ou sur des analyses qui reposaient sur des hypothèses trop optimistes ou sans justification.
1.57 Nous avons également constaté que les rapports sur les projections et le Plan de réduction des émissions comportaient très peu de renseignements sur les changements apportés aux valeurs déclarées, comparativement aux valeurs des rapports précédents. Par exemple, même si l’estimation de l’incidence des solutions fondées sur la nature et des mesures agricoles avait augmenté, passant de 10 Mt éq. CO2 dans le plan des émissions de 2020 à 19 Mt éq. CO2 dans le Plan de réduction des émissions de 2022, la raison du changement n’a pas été expliquée dans le Plan.
1.58 Les pratiques de gestion forestière — Nous avons constaté que les rapports des ministères sur les effets des changements apportés à la gestion forestière sur les émissions étaient incomplets. Les activités de gestion forestière comprennent la coupe à blanc, la coupe partielle, le brûlage des résidus de coupe (brûlage à plat), la création de réserves pour la biodiversité et la gestion de zones à des fins autres que la production de bois, mais les rapports ne faisaient pas état de ces activités de manière claire ou distincte (voir la pièce 1.7).
Pièce 1.7 — Le brûlage à plat est une activité de gestion forestière qui n’était pas présentée séparément dans les rapports fédéraux
Dans certaines circonstances, les brûlages dirigés ou contrôlés peuvent être un outil utile pour réduire le risque de feux de forêt, améliorer l’habitat faunique, préparer le terrain ou répondre à des besoins culturels autochtones. Toutefois, le brûlage des résidus de coupe (brûlage à plat) peut générer d’importantes émissions de gaz à effet de serre. Par exemple, en 2020, en Colombie‑Britannique, le brûlage des tas de rémanents, qui est l’une des composantes du brûlage à plat, représentait 4 % de l’ensemble des gaz à effet de serre émis annuellement.
Nous avons constaté que les rapports fédéraux canadiens ne distinguaient pas clairement les émissions associées au brûlage à plat des autres formes de brûlage contrôlé. À notre avis, une communication claire et distincte des émissions attribuables au brûlage à plat par le gouvernement fédéral permettrait de mieux orienter les décisions relatives aux politiques dans le secteur forestier, y compris l’étude d’autres utilisations possibles pour les résidus de coupe.
Photo : Ben Weinstein
1.59 De plus, les rapports sur les émissions antérieures ont indiqué que les tendances récentes en matière de gestion ont eu une incidence sur les terres forestières. Toutefois, nous avons constaté que les rapports ne précisaient pas ces tendances ni les effets qu’elles avaient sur les émissions. Même si Ressources naturelles Canada a recouru à la modélisation pour évaluer l’incidence d’activités de gestion forestière ou de mesures d’atténuation précises, les résultats avaient été publiés dans des articles spécialisés seulement. Il était donc difficile pour le public et de nombreuses parties prenantes d’accéder à ces articles et de les comprendre.
1.60 Les émissions du secteur forestier — Nous avons constaté qu’Environnement et Changement climatique Canada n’avait pas présenté séparément les émissions totales attribuables au secteur forestier au Canada. Ces émissions étaient plutôt réparties dans les différents rapports d’inventaire national, de sorte qu’il était difficile de déterminer leurs effets globaux. Par exemple, certaines émissions figuraient dans la catégorie de l’utilisation des terres, tandis que les émissions provenant de l’équipement utilisé pour l’exploitation forestière et les autres activités forestières étaient comprises dans une autre catégorie.
1.61 De nombreuses parties prenantes, comme les universitaires et les groupes de protection de l’environnement et de la santé, ont exprimé des inquiétudes quant au manque de transparence relativement aux émissions de gaz à effet de serre attribuables à l’exploitation forestière. Dans son rapport, une partie prenante a estimé que les émissions nettes provenant de l’exploitation forestière représentaient environ 10 % (75 Mt éq. CO2) des émissions totales du Canada en 2020. Cette estimation était fondée, en grande partie, sur des renseignements rendus publics par les ministères. Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada contestent cette estimation, mais n’ont pas fourni d’autre estimation propre à l’exploitation forestière. Les ministères ont également indiqué que l’établissement d’une estimation pour l’exploitation forestière ne faisait pas partie des obligations internationales en matière d’information.
1.62 Nous sommes d’avis que la communication de renseignements propres au secteur, comme cela se fait pour le secteur pétrolier et gazier, appuierait l’élaboration de mesures stratégiques efficaces pour réduire les émissions de gaz à effet de serre attribuables au secteur forestier.
1.63 Les provinces et territoires — Nous avons aussi constaté que les émissions des forêts n’étaient pas présentées publiquement par province et territoire, même si ces renseignements étaient disponibles. Les tendances relatives aux émissions liées aux forêts et leur contribution attendue à l’objectif du Canada pour 2030 varient considérablement entre les provinces et les territoires. Par exemple, certaines provinces prévoyaient développer leur industrie forestière, ce qui augmenterait les émissions projetées, tandis que d’autres prévoyaient une baisse des taux de coupe. Selon Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada, les données ventilées par province ne sont pas communiquées parce qu’une des provinces souhaite garder ces données confidentielles. La publication de ces renseignements aiderait les utilisatrices et utilisateurs à mieux comprendre les tendances dans le secteur.
1.64 Étant donné l’importance des forêts pour ce qui est des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre, et compte tenu des circonstances particulières du Canada, Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada devraient commander et publier un examen réalisé par des spécialistes indépendants et prendre des mesures pour corriger toute lacune et apporter des améliorations, le cas échéant. Cet examen devrait :
- porter sur l’approche adoptée par le Canada pour estimer et communiquer les émissions liées aux forêts, et plus particulièrement à l’exploitation forestière;
- comprendre un processus officiel de mobilisation des utilisatrices et des utilisateurs, tels que les chercheuses et chercheurs et les groupes environnementaux et de l’industrie, sur la façon de mieux répondre à leurs besoins et de soutenir la reddition de comptes et la prise de décisions.
Réponse des ministères — Recommandation acceptée.
Les réponses détaillées se trouvent dans les Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
1.65 Pour éclairer la prise de décisions stratégiques qui favorisent la réduction des émissions et qui améliorent la transparence, Environnement et Changement climatique Canada, en collaboration avec Ressources naturelles Canada, devrait, dans ses rapports sur les émissions antérieures et les projections d’émissions :
- présenter l’incidence des changements apportés aux pratiques de gestion forestière sur les émissions de gaz à effet de serre;
- collaborer avec les provinces et territoires pour présenter les données par province et territoire afin que les effets des pratiques de gestion forestière soient plus évidents;
- présenter l’information de manière à ce que le public y ait accès et la comprenne facilement.
De plus, dans ses rapports sur les projections, le Ministère devrait :
- présenter plus clairement les politiques et les mesures visées par le rapport et l’incidence qu’elles ont sur les émissions de gaz à effet de serre;
- décrire plus clairement les méthodes, les renseignements et les hypothèses qu’il utilise pour estimer et comptabiliser les émissions et les absorptions.
Réponse d’Environnement et Changement climatique Canada et de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée.
Les réponses détaillées se trouvent dans les Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
Le manque d’uniformité des rapports d’étape
1.66 Nous avons constaté plusieurs incohérences dans les rapports sur les émissions liées aux forêts qui faisaient en sorte qu’il était plus difficile, à la fois pour le public et les décisionnaires, d’accéder aux résultats et de les comprendre.
1.67 Les recalculs — Nous avons constaté que des recalculs continuels, en réponse à des changements apportés aux données ou aux méthodes, pouvaient modifier la présentation des forêts à titre de sources ou de puits de carbone (lorsque les forêts absorbent plus de carbone de l’atmosphère qu’elles en émettent). La valeur pour une même année variait considérablement d’un rapport à l’autre (voir la pièce 1.8). Le rapport d’inventaire national indiquait les changements les plus importants, mais ne décrivait pas les effets de ces changements. Même s’il est toujours important d’améliorer l’information, le changement considérable et continu des valeurs fait en sorte qu’il est difficile pour les décisionnaires de se fier aux rapports lors de la conception et de la planification de mesures.
Pièce 1.8 — Les estimations des émissions liées à l’utilisation des terres forestières dans les rapports d’inventaire national variaient considérablement d’un rapport à l’autre
Source : D’après des données fournies par Environnement et Changement climatique Canada
Pièce 1.8 — version textuelle
Ce graphique montre les estimations des émissions des terres forestières et des produits ligneux récoltés de 2005 à 2019 et compare les estimations pour ces années présentées dans les rapports d’inventaire national de 2019, 2020 et 2021. Les émissions estimées pour une même année variaient d’un rapport à l’autre.
Pour l’année 2005, les émissions estimées des terres forestières et des produits ligneux récoltés étaient les suivantes dans les trois rapports :
- Le rapport d’inventaire national de 2019 estime que 20 mégatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone ont été retirées de l’atmosphère en 2005.
- Le rapport de 2020 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été retirées de l’atmosphère en 2005.
- En revanche, le rapport de 2021 estime que 20 mégatonnes d’émissions ont été ajoutées à l’atmosphère en 2005.
Pour l’année 2015, les émissions estimées des terres forestières et des produits ligneux récoltés étaient les suivantes dans les trois rapports :
- Le rapport d’inventaire national de 2019 estime que 20 mégatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone ont été retirées de l’atmosphère en 2015.
- Le rapport de 2020 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été retirées de l’atmosphère en 2015.
- En revanche, le rapport de 2021 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été ajoutées à l’atmosphère en 2015.
Pour les années 2016 et 2017, les émissions estimées des terres forestières et des produits ligneux récoltés étaient les suivantes dans les trois rapports :
- Le rapport d’inventaire national de 2019 estime que 20 mégatonnes d’équivalent de dioxyde de carbone ont été retirées de l’atmosphère en 2016 et 2017.
- Le rapport de 2020 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été retirées de l’atmosphère en 2016 et 2017.
- En revanche, le rapport de 2021 estime qu’il y a eu zéro émission, c’est-à-dire qu’il n’y a pas eu d’émissions retirées ou ajoutées en 2016 et 2017.
Pour l’année 2018, les émissions estimées des terres forestières et des produits ligneux récoltés étaient les suivantes dans les trois rapports :
- Le rapport d’inventaire national de 2019 n’a pas fourni d’estimations d’émissions en 2018.
- Le rapport de 2020 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été retirées de l’atmosphère en 2018.
- En revanche, le rapport de 2021 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été ajoutées à l’atmosphère en 2018.
Pour l’année 2019, les émissions estimées des terres forestières et des produits ligneux récoltés étaient les suivantes dans les trois rapports :
- Les rapports d’inventaire national de 2019 et de 2020 n’ont pas fourni d’estimations d’émissions en 2019.
- Le rapport de 2021 estime que 10 mégatonnes d’émissions ont été ajoutées à l’atmosphère en 2019.
1.68 Les méthodes de comptabilisation — Nous avons constaté que la méthode adoptée par le Canada pour calculer les effets des forêts canadiennes sur les émissions du pays était différente de celle utilisée pour d’autres secteurs, comme le secteur de l’électricité ou le secteur pétrolier et gazier. Selon les lignes directrices stratégiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, les pays peuvent utiliser différentes règles pour rendre compte de la contribution des forêts à l’atteinte des cibles d’émissions.
1.69 Les règles utilisées par le Canada, soit la comptabilisation par niveau de référence, visent à mieux représenter tout changement par rapport à une gestion typique des forêts. Les émissions projetées sont comparées aux émissions qui seraient établies dans un scénario hypothétique (le niveau de référence) qui suppose que les taux de coupe antérieurs resteraient les mêmes. Selon la comptabilisation par niveau de référence, la différence entre les émissions projetées et les émissions établies selon le scénario hypothétique correspond à la contribution des forêts à l’atteinte de la cible climatique.
1.70 D’ici 2026, la comptabilisation par niveau de référence sera utilisée par peu d’autres pays développés. Certains pays, comme les États‑Unis, utilisent une approche « nette‑nette », qui est semblable à la méthode adoptée par le Canada pour les autres secteurs de son économie. Selon cette approche, lors de l’évaluation de l’atteinte de la cible de réduction des émissions, les émissions de 2030 sont comparées aux émissions réelles d’une année de référence, par exemple 2005. Ressources naturelles Canada a élaboré la méthode de comptabilisation par niveau de référence, que le Canada a proposée à l’échelle internationale en 2008. Les responsables du Ministère nous ont indiqué que cette approche avait été choisie pour supprimer l’incidence de l’âge de ses forêts, car les arbres âgés captent moins de carbone annuellement que les jeunes arbres.
1.71 En comparant les émissions réelles aux émissions selon un scénario hypothétique qui suppose que les taux de coupe antérieurs resteraient les mêmes, à notre avis, la méthode adoptée par le Canada présentait une réduction artificielle des émissions qui contribuait à l’atteinte de la cible du Canada pour 2030, et ce, sans la prise de mesures d’atténuation ni l’apport de changements dans le secteur forestier. De plus, la comptabilisation par niveau de référence est difficile à comprendre et peu transparente.
1.72 Récemment, l’Union européenne a annoncé qu’à compter de 2026, elle n’utiliserait plus la comptabilisation par niveau de référence dans ses rapports d’étape. Après cette annonce, le gouvernement canadien a entamé un examen interne de sa méthode comptable.
1.73 Nous avons aussi constaté que même si le Canada utilisait la comptabilisation par niveau de référence pour estimer la contribution des forêts à l’atteinte de sa cible de 2030, il n’avait pas utilisé cette approche dans ses rapports sur les niveaux d’émission antérieurs. Cette information était présentée seulement dans ses rapports sur les projections, qui sont publiés moins rapidement et dans des formats différents qui sont difficiles à comparer. Les rapports sur les émissions antérieures du Canada servent généralement à évaluer les progrès réalisés à l’égard des cibles nationales. En outre, la législation canadienne visant à améliorer la responsabilité en matière d’action climatique désigne les rapports sur les émissions antérieures comme la source à utiliser pour évaluer si le Canada a atteint ses cibles.
1.74 Les ministères n’étaient pas d’avis que la méthode comptable utilisée pour estimer la contribution des forêts à l’atteinte de la cible de 2030 devrait être utilisée dans les rapports sur les émissions antérieures du Canada. Selon Ressources naturelles Canada, le choix des méthodes comptables est une décision stratégique, et les renseignements afférents ne devraient pas être publiés dans les rapports sur les émissions antérieures. Toutefois, d’autres pays, comme l’Australie et le Royaume‑Uni, présentent cette information dans leurs rapports sur les émissions antérieures pour surveiller les progrès. À notre avis, ce manque de cohérence crée de la confusion et limite la capacité de la population canadienne à demander des comptes au gouvernement.
Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions.
Source : Nations UniesNote de bas de page 1
1.75 Les cibles et indicateurs de rendement — L’objectif de développement durable 13 des Nations Unies (Mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques) demande à prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions. Nous avons constaté qu’Environnement et Changement climatique Canada n’incluait pas les forêts dans d’autres indicateurs liés aux émissions de gaz à effet de serre — comme les indicateurs pour les objectifs de développement durable et la Stratégie fédérale de développement durable — même si ces cadres ont la même cible pour 2030. Le fait de calculer les indicateurs d’émissions de gaz à effet de serre de façon différente ou de manière à exclure différentes composantes crée des incohérences qui peuvent nuire à la surveillance et à la communication des progrès ainsi qu’à la capacité de relever les modifications nécessaires.
1.76 Pour que ses rapports permettent de favoriser davantage la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement planétaire, Environnement et Changement climatique Canada devrait :
- déterminer et communiquer publiquement la méthode comptable qui permet le mieux de soutenir la prise de décisions stratégiques éclairées et les réductions d’émissions réelles;
- fournir des estimations additionnelles dans les rapports sur les émissions antérieures qui utilisent la même méthode de comptabilisation des effets des forêts qu’il prévoit utiliser pour évaluer l’atteinte de sa cible pour 2030;
- inclure systématiquement les terres forestières dans les indicateurs d’émissions de gaz à effet de serre pertinents pour les cadres qui rendent compte des progrès réalisés au regard des cibles d’émissions de gaz à effet de serre du Canada, comme le Cadre d’indicateurs canadien pour les objectifs de développement durable et la Stratégie fédérale de développement durable.
Réponse d’Environnement et Changement climatique Canada — Recommandation acceptée.
Les réponses détaillées se trouvent dans les Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
Les activités de contrôle de la qualité et d’examen réalisées par Ressources naturelles Canada pour estimer les effets futurs des forêts étaient limitées
1.77 Cette constatation est importante parce que l’accès à des données exhaustives et exactes est un élément essentiel pour définir des plans crédibles de réduction des émissions qui aideront le Canada à atteindre ses cibles en matière d’émissions de gaz à effet de serre. La réalisation de cet objectif passe par une modélisation rigoureuse, qui s’appuie sur un cadre complet de contrôle de la qualitéDéfinition 3.
1.78 Le rapport de la commissaire à l’environnement et au développement durable de 2014 intitulé « L’atténuation des changements climatiques » avait relevé des problèmes quant à la clarté et à l’uniformité des estimations établies par le gouvernement pour les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre attribuables au secteur forestier et à l’information communiquée à cet égard. D’autres rapports récents réalisés par le commissaire, comme l’audit de 2022 sur le potentiel de l’hydrogène pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, ont aussi permis de cerner des problèmes liés à la transparence, aux hypothèses adoptées et à l’examen externe de la modélisation utilisée par le Canada pour établir les émissions attribuables aux autres secteurs ainsi que des problèmes à cet égard dans l’établissement des rapports.
Le contrôle de la qualité et les procédures d’examen visant les estimations projetées étaient faibles
1.79 Nous avons constaté que le système de contrôle de la qualité de Ressources naturelles Canada et d’Environnement et Changement climatique Canada était plus exhaustif pour les estimations des émissions antérieures que pour les estimations projetées. Par exemple, les ministères n’avaient pas documenté de façon détaillée les étapes suivies pour vérifier la qualité de leurs estimations projetées. De plus, Ressources naturelles Canada n’avait pas consigné les résultats de ces vérifications ni la résolution d’éventuelles erreurs dans leurs estimations projetées. Ressources naturelles Canada nous a informés que les processus et les procédures d’analyse des émissions projetées étaient moins bien établis et réalisés avec moins de ressources affectées à cette fin que les estimations des émissions antérieures.
1.80 Nous avons constaté qu’un plan officiel d’amélioration continue était en place pour surveiller les progrès par rapport aux recommandations issues des examens internes et externes des estimations antérieures. Nous avons constaté que toutes les recommandations découlant des examens des estimations antérieures par l’équipe de spécialistes de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques avaient été mises en œuvre ou étaient en voie de l’être. Nous avons constaté que certaines mesures d’amélioration continue avaient été prises pour les estimations projetées, mais qu’aucun plan officiel d’amélioration continue n’était en place.
1.81 Nous avons constaté que bon nombre de vérifications du contrôle de la qualité des ministères étaient effectuées manuellement, et qu’elles s’appuyaient sur l’expertise technique et le jugement de personnes données. En 2015, Ressources naturelles Canada a réalisé un audit interne qui a mené à la recommandation de déterminer quels sont les postes essentiels en recherche scientifique et d’entreprendre la planification de la relève pour ces postes. Sept ans plus tard, nous n’avons pas trouvé d’éléments probants indiquant que ces postes essentiels avaient été recensés et que des plans de relève correspondants avaient été élaborés. À notre avis, cette lacune entraînerait un risque de manquement aux obligations internationales du Canada en matière de déclaration, car le départ à la retraite de certaines de ces personnes était imminent.
1.82 Pendant la période visée par l’audit, nous avons constaté que l’examen externe des estimations des émissions antérieures et projetées était limité aux examens réalisés par des groupes de spécialistes internationaux, conformément à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Les consultations officielles auprès des parties prenantes étaient limitées, tout comme l’examen par le public. Par exemple, en 2016, les ministères ont convoqué un groupe international de spécialistes pour examiner des changements apportés aux méthodes utilisées. Toutefois, les ministères n’ont pas eu recours à des spécialistes externes au cours des dernières années dans le cadre de leur processus d’assurance de la qualité visant les estimations des émissions et des absorptions attribuables aux forêts.
1.83 Les directives du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat des Nations Unies sur les examens externes précisent que, pour les catégories importantes de sources d’émissions, il devrait y avoir un examen réalisé par des pairs spécialistes autre que celui effectué par l’équipe d’examen de la Convention-cadre. Selon les rapports d’inventaire national du Canada, les émissions attribuables aux terres forestières ont la plus forte incidence sur la tendance en matière d’émissions au pays, encore plus que les émissions découlant du transport routier. Par conséquent, des procédures additionnelles d’examen externe, comme des examens par les pairs ou des audits plus approfondis, renforceraient la confiance dans les estimations établies.
1.84 Pour améliorer la qualité et la transparence de la modélisation des changements climatiques ainsi que la confiance à l’égard de cette modélisation, Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, devrait renforcer le contrôle de la qualité et le processus d’examen de ses estimations projetées en augmentant :
- la documentation des processus de contrôle en place;
- le transfert des connaissances et la planification de la relève pour les postes essentiels;
- la fréquence des examens externes périodiques, surtout à la suite d’un changement méthodologique important.
Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée.
Les réponses détaillées se trouvent dans les Recommandations et réponses à la fin du présent rapport.
Conclusion
1.85 Nous avons conclu que Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, n’avait pas conçu ni mis en œuvre adéquatement le programme 2 milliards d’arbres. Compte tenu des premiers résultats enregistrés et des problèmes liés à l’établissement de partenariats dès le début, il est peu probable que les objectifs du programme soient atteints, à moins que des changements importants soient apportés.
1.86 Nous avons aussi conclu que Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, n’avait pas fourni une vue d’ensemble complète et transparente de la façon dont les forêts canadiennes éliminent le carbone de l’atmosphère ou contribuent aux émissions de carbone. Ressources naturelles Canada a élaboré un système pour estimer les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre attribuables aux forêts canadiennes, et les rapports produits par le Ministère respectaient les obligations internationales. Toutefois, il y avait plusieurs possibilités de rendre les estimations et les rapports afférents plus cohérents, plus faciles à comprendre, plus accessibles et plus utiles pour les décisionnaires et le public.
À propos de l’audit
Le présent rapport de certification indépendant sur les forêts et les changements climatiques portant sur le programme 2 milliards d’arbres, qui est mené par Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, ainsi que sur l’estimation, la comptabilisation et la communication par le Canada des émissions de gaz à effet de serre provenant du secteur forestier, a été préparé par le Bureau du vérificateur général du Canada. Notre responsabilité était de donner de l’information, une assurance et des avis objectifs au Parlement en vue de l’aider à examiner soigneusement la gestion que fait le gouvernement des ressources et des programmes et d’exprimer une conclusion quant à la conformité du programme 2 milliards d’arbres ainsi que de l’estimation, de la comptabilisation et de la communication par le Canada des émissions de gaz à effet de serre provenant du secteur forestier, dans tous leurs aspects importants, aux critères applicables.
Tous les travaux effectués dans le cadre du présent audit ont été réalisés à un niveau d’assurance raisonnable conformément à la Norme canadienne de missions de certification (NCMC) 3001 — Missions d’appréciation directe de Comptables professionnels agréés du Canada (CPA Canada), qui est présentée dans le Manuel de CPA Canada — Certification.
Le Bureau du vérificateur général du Canada (BVG) applique la Norme canadienne de gestion de la qualité (NCGQ) 1, Gestion de la qualité par les cabinets qui réalisent des audits ou des examens d’états financiers, ou d’autres missions de certification ou de services connexes. Cette norme exige que le BVG conçoive, mette en place et fasse fonctionner un système de gestion de la qualité qui comprend des politiques ou des procédures conformes aux règles de déontologie, aux normes professionnelles et aux exigences légales et réglementaires applicables.
Lors de la réalisation de nos travaux d’audit, nous nous sommes conformés aux règles sur l’indépendance et aux autres règles de déontologie définies dans les codes de déontologie pertinents applicables à l’exercice de l’expertise comptable au Canada, qui reposent sur les principes fondamentaux d’intégrité, d’objectivité, de compétence professionnelle et de diligence, de confidentialité et de conduite professionnelle.
Conformément à notre processus d’audit habituel, nous avons obtenu ce qui suit de la direction de chaque entité :
- la confirmation de sa responsabilité à l’égard de l’objet considéré;
- la confirmation que les critères étaient valables pour la mission;
- la confirmation qu’elle nous a fourni toutes les informations dont elle a connaissance et qui lui ont été demandées ou qui pourraient avoir une incidence importante sur les constatations ou la conclusion contenues dans le présent rapport;
- la confirmation que les faits présentés dans le rapport sont exacts.
Objectif de l’audit
L’objectif de l’audit consistait à déterminer si Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada :
- avait adéquatement conçu et mis en œuvre le programme 2 milliards d’arbres;
- avait estimé les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre antérieures et projetées attribuables au secteur forestier, et rendu compte de ces émissions, de manière crédible et transparente.
Étendue et méthode
L’audit portait sur la première année de mise en œuvre (2021‑2022) du programme 2 milliards d’arbres ainsi que sur la conception globale du programme. L’audit portait aussi sur l’estimation, la comptabilisation et la communication des émissions de gaz à effet de serre provenant du secteur forestier. Nous avons recueilli des éléments probants au moyen de l’examen de documents, d’entretiens auprès de fonctionnaires fédéraux, de spécialistes externes et de parties prenantes, de tests de cheminement des systèmes et des processus et d’analyses de données.
Nous n’avons pas examiné la comptabilisation ni la déclaration des émissions ou des absorptions liées à l’utilisation des terres, au changement d’affectation des terres et au secteur de la foresterie provenant des terres cultivées, des terres humides, des prairies ou d’autres terres; l’audit a porté uniquement sur la composante forestière du secteur.
Le présent audit a tenu compte des cibles et des objectifs de développement durable pertinents des Nations Unies, y compris des cibles du Cadre d’indicateurs canadien pour les objectifs de développement durable. L’audit a aussi examiné la disponibilité de données fiables et désagrégées pour évaluer les progrès réalisés vers l’atteinte de ces objectifs et cibles.
Critères
Pour tirer une conclusion par rapport à l’objectif de notre audit, nous avons utilisé les critères suivants :
Critères | Sources |
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Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, a adéquatement conçu le programme 2 milliards d’arbres afin d’atteindre l’objectif de plantation de 2 milliards d’arbres et les résultats attendus du programme, à savoir : capter le carbone, améliorer la biodiversité et favoriser le bien‑être humain. |
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Ressources naturelles Canada met en œuvre le programme 2 milliards d’arbres de manière efficace. |
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Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada ont des systèmes et des pratiques en place pour assurer la qualité de l’information qu’ils utilisent pour estimer les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre antérieures et projetées attribuables au secteur forestier. |
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Ressources naturelles Canada utilise des méthodes qui conviennent pour estimer les émissions et les absorptions de gaz à effet de serre antérieures et projetées attribuables au secteur forestier. |
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Environnement et Changement climatique Canada prépare des rapports qui présentent les renseignements sur les émissions et absorptions de gaz à effet de serre antérieures et futures attribuables au secteur forestier d’une manière transparente et cohérente. |
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Période visée par l’audit
L’audit a porté sur la période allant du 1er décembre 2019 au 31 octobre 2022. Il s’agit de la période à laquelle s’applique la conclusion de l’audit. Toutefois, afin de mieux comprendre l’objet considéré de l’audit, nous avons aussi examiné certains dossiers antérieurs à cette période.
Date du rapport
Nous avons fini de rassembler les éléments probants suffisants et appropriés à partir desquels nous avons fondé notre conclusion le 14 février 2023, à Ottawa, au Canada.
Équipe d’audit
L’audit a été réalisé par une équipe multidisciplinaire du Bureau du vérificateur général du Canada (BVG), dirigée par Kimberley Leach, directrice principale. La directrice principale est responsable de la qualité de l’audit dans son ensemble; elle doit s’assurer notamment que les travaux d’audit sont exécutés conformément aux normes professionnelles, aux exigences des textes légaux et réglementaires applicables ainsi qu’aux politiques et au système de gestion de la qualité du BVG.
Recommandations et réponses
Dans ce tableau, le numéro du paragraphe qui précède la recommandation indique l’emplacement de la recommandation dans le rapport.
Recommandation | Réponse |
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1.36 Pour veiller à l’atteinte des objectifs de plantation du programme 2 milliards d’arbres, Ressources naturelles Canada devrait :
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Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée. Ressources naturelles Canada convient de la nécessité d’entreprendre une planification rigoureuse pour garantir la réussite à long terme du programme. Le cadre de conception et d’application élaboré en 2021 servira de schéma directeur à la mise en œuvre du programme. L’équipe du programme documentera et renforcera également son processus de planification à long terme en s’appuyant sur les enseignements tirés pour élaborer un plan opérationnel à long terme. Cette mesure sera réalisée d’ici décembre 2023. Ressources naturelles Canada reconnaît que l’établissement d’accords à long terme est essentiel à la bonne mise en œuvre du programme. L’équipe du programme lancera un appel de propositions continu afin d’encourager la présentation de propositions en vue de l’établissement d’accords à long terme, et s’attachera tout particulièrement, en 2023, à conclure des accords avec les provinces et les territoires. Elle mettra également à profit le portail en ligne du programme 2 milliards d’arbres pour accélérer le processus de présentation de propositions. Le programme est tributaire de l’intérêt que les intervenants portent au financement de projets de plantation d’arbres; cependant, tout sera mis en œuvre pour mobiliser autant d’intervenants que possible et traiter les propositions le plus rapidement possible, une fois celles‑ci reçues, afin que des accords correspondant à l’essentiel de la plantation d’arbres soient signés d’ici juin 2027. |
1.43 Pour veiller à ce que Ressources naturelles Canada atteigne les objectifs du programme 2 milliards d’arbres, y compris ses cibles de réduction des émissions de gaz à effet de serre pour 2031 et 2050, le Ministère devrait se doter :
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Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée. Ressources naturelles Canada s’emploiera à établir un plan de suivi à long terme du programme 2 milliards d’arbres en affectant le financement alloué aux activités scientifiques à l’exercice d’un suivi et à l’élaboration de rapports. Cela suppose d’appliquer des systèmes de vérification et de surveillance des activités, ainsi que de nouvelles méthodes, issues des recherches avancées du Service canadien des forêts, pour assurer le suivi des résultats en matière de plantation. Ressources naturelles Canada s’appuiera sur son expérience pour intégrer au programme des systèmes de surveillance et de vérification axés sur la télédétection à mesure que l’activité de plantation d’arbres s’intensifiera. Ce plan sera achevé d’ici mars 2024. Ressources naturelles Canada définira des cibles quantitatives provisoires et finales pour les indicateurs de rendement du programme, et travaillera de concert avec Environnement et Changement climatique Canada et Agriculture et Agroalimentaire Canada pour mettre en œuvre ces cibles et les communiquer au travers du Rapport sur les résultats ministériels 2024‑2025. |
1.47 Pour renforcer les bienfaits à long terme liés à la biodiversité et à la restauration des habitats découlant du programme 2 milliards d’arbres et pour contribuer aux objectifs en matière de biodiversité du Canada, Ressources naturelles Canada devrait :
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Réponse de ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée en partie. Ressources naturelles Canada établira des critères applicables aux projets de plantation de monoculture et les communiquera aux intervenants d’ici décembre 2023. Ressources naturelles Canada travaillera de concert avec Environnement et Changement climatique Canada pour mettre à la disposition de tous les intervenants du programme, d’ici avril 2024, une orientation et un soutien spécifiques en ce qui concerne les besoins en matière de biodiversité et d’habitat. Ressources naturelles Canada continuera également de rendre admissibles les coûts engagés au titre des services professionnels (écologistes, biologistes, etc.), et d’encourager les demandeurs à consulter des professionnels dans le cadre des projets de restauration de l’habitat. Ressources naturelles Canada ne souscrit pas à la recommandation visant à offrir d’autres mesures incitatives sous la forme d’un nouveau financement ou d’une préférence dans l’octroi des projets. Étant donné que la restauration de l’habitat est beaucoup plus coûteuse, des incitations supplémentaires pour les travaux de restauration de l’habitat réduiraient le financement disponible pour atteindre les objectifs fondamentaux du programme concernant le nombre d’arbres plantés et les objectifs d’atténuation du climat. Ressources naturelles Canada travaillera de concert avec Environnement et Changement climatique Canada, d’ici mai 2024, pour améliorer les rapports sur les avantages en matière de biodiversité. |
1.64 Étant donné l’importance des forêts pour ce qui est des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre, et compte tenu des circonstances particulières du Canada, Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada devraient commander et publier un examen par des spécialistes indépendants et prendre des mesures pour corriger toute lacune et apporter des améliorations, le cas échéant. Cet examen devrait :
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Réponse de Ressources naturelles Canada et d’Environnement et Changement climatique Canada — Recommandation acceptée. Les ministères conviennent de l’importance d’un examen indépendant. Chaque rapport d’inventaire national et rapport biennal annuel est examiné par une équipe d’experts internationaux. Les examens sont publiés en ligne. La science qui sous‑tend la déclaration des émissions de carbone fait l’objet d’un examen par les pairs, tout comme les améliorations futures des modèles de carbone avant leur mise en œuvre dans le système d’inventaire. Les ministères conviennent également de l’importance de la mobilisation. Le gouvernement a mobilisé des experts et des intervenants dans le cadre de nombreux forums afin de cerner les lacunes en matière de connaissances et d’information et d’établir la priorité des contributions au processus scientifique qui sous‑tend la déclaration des émissions de carbone : Plan d’action sur la science du carbone forestier au Canada, Science du climat 2050, L’atelier sur le carbone de 2019 ou le récent rapport du Conseil des académies canadiennes sur les solutions climatiques fondées sur la nature. Par ailleurs, les ministères ont engagé un dialogue avec des groupes environnementaux qui ont publié des rapports critiquant la déclaration et la comptabilisation du carbone forestier. À court terme, les ministères s’appuieront sur les consultations existantes. Les lacunes connues en matière de connaissances, établies par ces récentes consultations d’experts, ainsi que les questions soulevées par les groupes environnementaux seront clairement abordées et publiées dans les futures versions du plan d’amélioration interministériel pour les estimations des gaz à effet de serre des forêts et des produits ligneux récoltés. |
1.65 Pour éclairer la prise de décisions stratégiques qui favorisent la réduction des émissions et qui améliorent la transparence, Environnement et Changement climatique Canada, en collaboration avec Ressources naturelles Canada, devrait, dans ses rapports sur les émissions antérieures et les projections d’émissions :
De plus, dans ses rapports sur les projections, le Ministère devrait :
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Réponse d’Environnement et Changement climatique Canada et de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée. Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada conviennent que la déclaration des émissions et des absorptions de gaz à effet de serre doit être cohérente et transparente, en veillant à ce que les renseignements soient clairement communiqués et facilement accessibles au public. Le Rapport d’inventaire national du Canada est un document scientifique conforme aux normes internationales, qui rend compte des émissions historiques par catégorie de sources d’émission. Cela garantit la précision de la communication et la transparence au sein de la communauté internationale des déclarants de gaz à effet de serre. Les ministères conserveront le même niveau de précision dans le langage du document, mais ils exploreront les possibilités d’améliorer la cohérence, la clarté et l’accessibilité des différents rapports sur les gaz à effet de serre. Les ministères continueront également à travailler avec les provinces et les territoires pour déclarer les données. Dans la 8e communication nationale du Canada et le 5e rapport biennal soumis à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques le 31 décembre 2022, toutes les politiques et mesures incluses dans la modélisation étaient énumérées et des estimations des réductions d’émissions projetées associées à ces mesures étaient fournies. Dans les futurs rapports, Environnement et Changement climatique Canada continuera à travailler avec Ressources naturelles Canada et d’autres ministères responsables ou pertinents pour communiquer plus clairement la façon dont les changements passés et futurs dans les pratiques de gestion des terres affectent les émissions/suppressions de gaz à effet de serre projetées, dans la mesure où cela est possible. Des données plus détaillées sur les émissions et les projections comptables du secteur de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie ont été publiées sur le portail de données ouvertes d’Environnement et Changement climatique Canada en 2022 et continueront à l’être chaque année. |
1.76 Pour que ses rapports permettent de favoriser davantage la réduction des émissions de gaz à effet de serre et le réchauffement planétaire, Environnement et Changement climatique Canada devrait :
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Réponse d’Environnement et Changement climatique Canada — Recommandation acceptée. Environnement et Changement climatique Canada et Ressources naturelles Canada sont d’accord que la méthode de comptabilisation du carbone forestier doit être fondée sur les meilleures données et méthodes scientifiques disponibles assurant une base solide pour éclairer les décisions politiques sur l’atténuation des changements climatiques. Environnement et Changement climatique Canada et Ressources naturelles Canada et les autres ministères concernés procèdent à un examen de l’approche comptable du secteur de l’utilisation des terres, du changement d’affectation des terres et de la foresterie du Canada y compris l’approche du niveau de référence présentement utilisée pour les forêts aménagées du Canada et les produits ligneux récoltés associés. Environnement et Changement climatique Canada et Ressources naturelles Canada notent que la présentation des chiffres de comptabilisation du niveau de référence en parallèle avec les émissions forestières antérieures dans le Rapport d’inventaire national du Canada pour estimer la contribution des forêts à l’atteinte de l’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Canada pour 2030 peut ne pas être efficace pour améliorer la prise de décisions pour les décideurs. Toutefois, les ministères conviennent que la clarté de la contribution des forêts aux objectifs de réduction pourrait être améliorée dans les documents de déclaration internationaux et nationaux. Environnement et Changement climatique Canada rendra compte de manière claire et cohérente de l’objectif de 2030 en matière de gaz à effet de serre. En plus du Rapport d’inventaire national et en concordance avec d’autres rapports, Environnement et Changement climatique Canada fournit des informations accessibles et transparentes sur les émissions et les projections de gaz à effet de serre du Canada par le biais du programme des Indicateurs canadiens de durabilité de l’environnement. Environnement et Changement climatique Canada envisagera d’inclure des informations contextuelles, telles que l’indicateur d’émissions et d’absorptions de gaz à effet de serre terrestres des Indicateurs canadiens de durabilité de l’environnement, lorsqu’elle rendra compte des progrès accomplis dans la réalisation de l’objectif de gaz à effet de serre de la Stratégie fédérale de développement durable de 2022 à 2026. |
1.84 Pour améliorer la qualité et la transparence de la modélisation des changements climatiques ainsi que la confiance à l’égard de cette modélisation, Ressources naturelles Canada, en collaboration avec Environnement et Changement climatique Canada, devrait renforcer le contrôle de la qualité et le processus d’examen de ses estimations projetées en augmentant :
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Réponse de Ressources naturelles Canada — Recommandation acceptée. Ressources naturelles Canada et Environnement et Changement climatique Canada sont d’avis que le contrôle qualité et l’examen sont des éléments essentiels pour assurer l’établissement d’estimations des émissions de gaz à effet de serre de manière transparente. Les ministères ont élaboré un processus d’assurance de la qualité et de contrôle qualité pour les estimations projetées des émissions liées aux forêts qui vise à trouver le juste milieu entre les vérifications automatisées, les procédures normales d’exploitation et le jugement d’experts. Les ministères s’affaireront à documenter officiellement le processus d’assurance de la qualité et de contrôle qualité pour les projections d’émissions de gaz à effet de serre des forêts, en veillant à ce qu’il soit transparent et facile à communiquer. De plus, Ressources naturelles Canada continuera de renforcer le transfert des connaissances et la planification de la relève pour les postes clés et essentiels liés à la production de projections d’émissions de gaz à effet de serre des forêts. Ces deux mesures seront achevées d’ici décembre 2024 et mises à jour périodiquement par la suite. Ressources naturelles Canada convient de collaborer avec Environnement et Changement climatique Canada pour assurer la tenue d’examens externes périodiques en vue de suivre les changements aux méthodes dès qu’ils surviennent. De tels examens s’ajouteraient aux mécanismes d’examen existants, notamment à celui selon lequel les rapports biennaux du Canada à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques sont assujettis à un examen par une équipe d’experts internationale, coordonné par le Secrétariat de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Ces examens détaillés donnent lieu à des recommandations propres au Canada sur la façon d’améliorer son approche. En plus du processus d’examen de la Convention-cadre, les projections d’émissions de gaz à effet de serre liées aux forêts font l’objet de consultations et d’examens externes par l’intermédiaire du Comité national des puits forestiers, composé de pairs experts des gouvernements provinciaux et territoriaux. |